Un déterminisme c’est une valeur influente qui s’ignore (ou feint de s’ignorer).
Je me souviens de l’exemple pris par ma prof de philo en terminale à ce sujet :
Un penseur se pose la question type « déterminisme total contre liberté de choix absolue ».
Pour prouver que la vraie liberté existe il décide de faire un acte gratuit.
Il pousse alors un homme hors du train.
Il clame ensuite qu’il n’avait absolument aucune raison de faire ce geste et que donc c’est la preuve que la liberté posée comme absolu existe bien.
Mais on peut faire remarquer qu’il a poussé cet homme pour prouver qu’il pouvait faire un acte gratuit, et ce par ce que le problème de la liberté le hante, et que résoudre ce dilemme philosophique insoluble était devenu d’une importance excessive pour lui…bref une somme de déterminismes puissants et assez évidents, cachant sans doute d’autres déterminismes psychologiques, sociaux, etc.
Faire passer un déterminisme vers le statut de valeur influente c’est le reconnaître, l’identifier, et créer la possibilité de ne pas laisser ses actions être déterminées par le déterminisme.
Exemple simple :
Si j’ai faim c’est un déterminisme.
Si je n’y pense pas je risque de manger sans vraiment y réfléchir.
Si j’observe le fait que j’ai faim puis compare cette donnée à d’autres, (Quelle heure est-il ? A quelle heure est mon prochain repas ? Dois-je manger avec des amis ? Etc.) alors le déterminisme de la faim devient une valeur influente parmi d’autres valeurs influentes.
Je peux alors, et seulement alors, faire un choix.
Celui qui mange sans réfléchir pourra rétorquer que c’est sa liberté.
Il aura philosophiquement tors.
C’est sa liberté seulement si il choisi entre plusieurs valeurs influentes.
Sinon il est juste victime du déterminisme de sa faim.
On observe aussi que celui qui réfléchis se pose des questions à propos d’un certain nombre de règles de vie (Heures fixes des repas, valeurs conviviales…).
Choisir de se soumettre à l’une de ces règles sera toujours une forme de liberté très largement supérieure à celle de celui qui mange sans réfléchir.
J’espère que ce petit exemple vous aidera un peu à vaincre en vous la pensée commune extrêmement tenace qui soutiens mordicus que se soumettre à des règles est une réduction de la liberté.
Une règle est une réduction de la liberté uniquement si elle est obligatoire et n’admet aucune alternative.
Sinon on obtient immédiatement l’effet inverse : + de règles = + de libertés.
Ensuite on observe une autre donnée d’importante centrale : c’est la connaissance.
La connaissance des valeurs influentes.
Les déterminismes transformés en valeurs influentes et les règles considérées comme des possibilités.
Ce qui nous amène à une autre évidence logique.
Si ma connaissance des règles est insuffisante, ma liberté de choix est réduite.
Alors soit, la multiplication des règles engendre une liberté potentielle plus importante.
Mais uniquement si je suis capable de toutes les poser comme choix possibles.
C’est particulièrement patent dans les activités ludiques qui posent les règles comme base de toute forme de liberté.
Ainsi, dans le cadre d’un jeu complexe, un joueur qui connaît toutes les règles est bien plus libre qu’un joueur débutant qui doit apprendre à inventer sa Légaliberté.
Un joueur qui croit que sa liberté consiste à se passer de règles est ainsi dans l’erreur la plus totale.
Il se place hors jeu et sera certainement un mauvais joueur (dans tous les sens du terme) ou un tricheur.
Ceci nous indique aussi qu’un jeu trop complexe engendre de grandes difficultés pour les joueurs dans l’exercice de leur Légaliberté.
A moins, et cela devient intéressant, Antoine l’a d’ailleurs abordé succinctement, que les règles soient principalement composées d’options et non d’obligations croisées et cumulées.
C’est un phénomène qui est largement observé en JDR.
Les valeurs influentes du jeu en général et de la fiction, puis jeu de rôle pratiqué, puis des personnages et du scénario créent de grandes quantités d’options.
Le rôle du MJ est aussi de permettre une certaine fluidité dans le passage entre différentes règles, déterminismes ou valeurs influentes.
Il pourra tour à tour appuyer ou relativiser l’importance de n’importe quelle valeur influente de l’activité. Il sera en retour influencé par les joueurs qui feront de même.
Plus le JDR, le MJ et les joueurs (re)connaîtront de valeurs influentes et de règles, plus le choix sera vaste, plus leur liberté sera grande.
Le JDR, plus que bien d’autres activités est exploration infinie des valeurs influentes.
Chaque règle crée une liberté de plus et chaque fiction met en scène des valeurs mythiques d’une grande variété.
Plus nôtre connaissance s’accroît, plus nôtre liberté augmente.
On peut se voir privé de choix par ignorance de ce qui nous détermine.
On peut se voir hésitant et perdu devant trop de possibilités de choix.
Dans un cas comme dans l’autre, le seul individu libre, c’est celui qui SAIT.
Je reviens bientôt pour vous parler un peu de choses que j’ai appris à propos du développement identitaire (approche psychologique).
Nous verrons à quel point l’élément central est proche du JDR.
Tellement proche et tellement évident que c’est tout simplement stupéfiant (et édifiant).
Nous verrons également que cela reste au cœur du sujet proposé par Antoine : le choix comme élément central en JDR.