Bonjour,
Voici un petit récit de partie pour me présenter. Je n’attends donc pas un retour particulier sur la partie présentée, mais tout commentaire et toute question sont les bienvenues.
Je fais du jdr depuis le milieu des années 80, où j’ai commencé avec la boite de base de D&D, directement en tant que MJ et n’ai depuis jamais vraiment cessé de jouer (mais plus à D&D depuis fort longtemps). Il y eu, bien entendu, des périodes riches et des périodes creuses, que ce soit en fréquence ou en intensité.
Aujourd’hui et depuis quelques années, je joue essentiellement avec le même groupe central d’amis, auquel vient se greffer d’autres joueurs, qui sont toujours les bienvenus (au moins pour un essai). Pour le moment je participe à trois tables de jeu : en tant que joueur à une table med-fan (univers et système maison) et dans une campagne Néphilim (2e éd., Chroniques de l’Apocalypse) ; en tant que meneur à une table med-fan (même univers et système que l’autre table où je suis joueur). Je pense bientôt démarrer une nouvelle table med-fan, c’est d’ailleurs la raison de ma venue - nous en reparlerons une autre fois. Globalement je m’amuse bien, bien mieux qu’il y a quelques années ou j’ai franchi une période très creuse.
Le souvenir que je vais retracer céans vient de la première table citée, une table médiévale fantastique, et date d’avant cette période creuse. Le jeu est centré autour d’une ville, mélange de quêtes “obligatoires”, facultatives, intérêt personnel des joueurs/personnages et bac à sable.
L’explication est longue et je me doute que, malgré mes meilleurs efforts, l’anecdote sera sans doute peu intéressante pour vous. Mais il s’agit là d’un de mes meilleurs souvenirs de jeu de rôle, c’est pour cela que je l’ai choisi.
Les noms des protagonistes, tant joueurs que personnages, ont été changés pour faciliter la compréhension : les noms des joueurs et de leur personnages respectifs commencent par la même lettre.
Moi, Ajax, j’y joue Anardil, prêtre elfe et voleur, très altruiste et préoccupé par le bien-être du royaume. Il est issu d’une famille nombreuse et assez soudée.
Des trois à cinq autres joueurs / personnages qui étaient présents lors des séances - l’organisation de la table étant assez lâche à ce moment -, une seule est réellement pertinente et je vous la présenterai plus tard. Les autres n’ont pas d’importance pour cette anecdote. Ils resteront anonymes.
Un PNJ, au contraire, joua un rôle focal. Le meneur, Manu, jouait (entre autres) Malek, mage surpuissant. Anardil avait rencontré Malek lors d’une de ses toutes premières aventures (jouées). Malek avait voulu embrigader de force Anardil et quelques autres jeunes prometteurs dans ses servants, sous menace indirecte mais très réelle de mort. Anardil s’en était sorti et avait sauvé les autres d’une forme de servitude (en vérité, Manu n’avait pas vraiment prévu qu’à ce stade les PJ puissent s’en sortir avec leur libre arbitre entier), et garda naturellement rancune envers le mage. Malek considéra depuis Anardil avec un fort mépris apparent, mais trouvait son appréciation de la valeur du jeune prêtre confirmée. Il parvint régulièrement à forcer la main de celui-ci pour lui confier des tâches (ou - plus rarement - à lui apporter un support non désiré mais bien utile), par la tromperie, par le chantage, par la menace et par la manipulation. Bien qu’influent, Malek vaillait farouchement à rester dans l’ombre, et leurs tractations restent entièrement clandestines. Le goût du mage pour les apparences illusoires et les sort d’oubli ne facilitaient pas les choses à Anardil.
Le temps passe et “le groupe” auquel Anardil appartenait originellement fini par se disloquer. De nouveaux joueurs, de nouveaux personnages arrivent. L’organisation de la table étant, comme vous le savez déjà, assez lâche à ce moment, deux groupes de joueurs y jouaient simultanément, un groupe environ un week-end sur deux, l’autre la semaine, et certains plus disponibles, dont j’étais, faisaient l’aller-et-retour, de manière occasionnelle ou régulière avec un même personnage ou un autre pour l’occasion. Ajoutez à cela quelques solos occasionnels...
Voici le moment d’introduire le dernier protagoniste. Barbara, privée de son personnage habituel car il est mobilisé dans des actions simultanées dans la fiction mais engagées précédemment à l’autre table, se cherche un nouveau personnage. Après discussion, elle se retrouve à jouer un personnage déjà présent dans le monde : la sœur aînée d’Anardil, au départ “rien que pour quelques parties”. Barbara joue donc Barberine, bardesse talentueuse et effacée (jusque là.…).
Quant à moi, pour les mêmes raisons que Barbara, je me retrouve également à jouer un autre personnage, qui n’aura ici qu’un rôle de figurant.
Rencontres, coïncidences, intersection des histoires personnelles des personnages, et voici que se forge un nouveau groupe. Pas de héros, ni d’aventuriers adédéesques, mais un groupe de personnalités.
Je me vois forcé d’arrêter de jouer quelques séances et, comme d’habitude, le jeu se poursuit avec les joueurs présents. Je reste en contact avec Manu et lui indique dans les grandes lignes ce que fait mon second personnage durant ce temps, le gardant impliqué dans les développements du monde mais éloigné des autres protagoniste.
Lorsque je reviens à la table, il est temps de revenir à Anardil : les huits joueurs nécessaires peuvent enfin être réunis pour poursuivre un des rares “donjon” de la campagne : l’exploration d’une antique nécropole (et, non, nous n’y avons pas rencontré de morts vivants). Anardil est “libéré”, il peut donc revenir. Pas très joyeux, car il vient de perdre, juste après l’avoir enfin retrouvé, son frère aîné disparu depuis des années.
De retour chez lui, Anardil apprend naturellement tout ce qui est arrivé entretemps à sa soeur Barberine et s’en inquiète. Il veut la retrouver, mais elle est partie en voyage. Il se renseigne auprès de ses nouveaux compagnons, qui sont plutôt méfiants envers ce petit frère intrusif. I fini par apprendre (et moi aussi) entre autres choses que sa soeur est maintenant quasi fiancée avec un elfe, inconnu de lui, mais bien mis de sa personne et que c’est d’ailleurs avec lui qu’elle est partie. Du coin de l’oeil, je m’aperçois que Manu, le meneur, a l’air un peu embêté... et puis nous continuons sur d’autres choses.
Deux séances après, Anardil rentre chez lui pour trouver une missive de sa soeur, qui l’invite à une soirée qu’elle organise. L’adresse n’est celle de Barberine, mais celle d’une maison parmi les plus huppées de la ville. Il ne parvient pas à croiser sa soeur auparavant et, le jour dit, se rend à la soirée, fort en retard bien malgré lui.
Il arrive pendant le repas. Sa soeur lui présente son futur fiancé et l’installe à ses côté à la table d’honneur... quelque chose cloche. Et puis, en un instant, sur une description apparemment anodine qui cachait un faible indice, le déclic. Le fiancé est le détesté Malek, sous sa véritable apparence. La surprise, le choc, … les soupçons… Anardil sait. Malek sait qu’il sait. Les salutations sont glaciales. Tout le monde est surpris, personne (personnage et joueurs) ne comprend ce qu’il se passe. La conversation qui était gaie et facile se fige autour des futurs beaux frères, qui s’adressent des propos venimeux. Barberine, blessée, finira par fuir sa propre soirée, les larmes courantes.
Mais ils sont vraiment amoureux. Barberine est sincère, et furieuse que son frère et son futur fiancé gâchent ainsi cette importante soirée.
Sur ces scènes de fête qui s'effondre, le jeu d'acteur fut impeccable, l’immersion profonde et les sentiments violents. Nos personnages ont pris vie et il nous a semblé qu’ils décidaient eux-mêmes de leurs actions.
Seul Manu connaissait les tenants et aboutissants d’une coïncidence orchestrée accidentellement par les joueurs eux-mêmes, autour du meneur et à sa grande surprise. Aucun autre personnage, ni aucun autre joueur, ne connaissait Malek, qui n’avait plus fait d’apparition depuis quelques temps. Le premier jour d’absence d’Anardil, il était présent comme élément de décor et d’ambiance dans l’auberge où Barberine animait la soirée. C’est Barbara qui a décidé que Barberine s’y intéressait, qui a orienté le jeu vers une séduction mutuelle, en toute méconnaissance de cause.
Cela reste un de mes meilleurs souvenirs de jeu de rôle. Il est un peu frustrant de le devoir autant à la chance, mais je ne crois pas que nous aurions pu sciemment construire cette situation et y être aussi impliqué. Je pense aussi qu’une bonne part de la qualité de cette séance venait simplement du fait que nous étions tous, joueurs, en forme, sans soucis, dans le bon état d’esprit. Cela, malheureusement, ne se contrôle pas facilement.
A ceux qui auront eu le courage de tout lire : merci de votre patience, j’espère que vous y aurez trouvé quelque chose.
Ajax
[edit] PS : mon "vrai" prénom est Philippe. Mais par compassion pour les lecteurs de passage, je préfère que l'on utilise mon pseudo dans les discussions.