[Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

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[Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 11 Nov 2009, 02:11

J'ai voulu tester Misspent Youth. Ce jeu Forgien est à sa phase finale, et l'auteur Robert Bohl était très content d'avoir un rapport de test supplémentaire, avant l'édition finale, d'autant plus quand je lui ai exposé un projet de partie assez éloigné des standards de ce jeu.
En effet, le jeu propose au départ de jouer des Jeunes Délinquants se rebellant contre un système qui pourrit le monde : l'Autorité. C'est un cadre générique mais aux thèmes fixés : amitié, rébellion, jeunesse naïve aux idéaux brillants, corruption, lutte désespérée. J'ai décidé de faire jouer ces Jeunes Délinquants dans le monde de Changeling the Dreaming, où des êtres mi-féériques mi-humains parcourent le monde, combattant la Banalité mais effrayés par elle. La Banalité, j'avais décidé que ce serait ça, le système pourrissant le monde, dans ma partie. Sans gouvernement qui la stipule, sans prêtres qui la prêchent, sans police qui la fait respecter, la Banalité est partout mais insaisissable. Normalement, comme beaucoup de jeux Forgiens, Misspent Youth propose que le groupe de joueurs créent le monde, la nature de l'Autorité et son but, ainsi que les groupe de Jeunes Délinquants. J'ai, en faisant le choix de l'univers pré-existant, zappé les deux premiers. J'ai donc fait une rapide présentation de l'univers de Changeling et nous sommes passé à la création des personnages.

Précisons tout d'abord qu'un des joueurs est un spécialiste de l'univers, il l'a fait jouer des dizaines de fois et connait très bien la majorité des suppléments, c'est BetterDayz (qui n'a jamais fait de jeux Indies). Il y a aussi Daniel (mon dévoué comparse en jeux Indies). Trois autres joueurs, n'étant pas habitués aux jeux Indies, ni ne connaissant Changeling étaient aussi présent : Vincent, Pascal et Noumalak.

La création de personnage s'est bien passé. On peut noter plusieurs choses cependant :
D'abord, le dépitement de BetterDayz lorsqu'il m'a demandé quels pouvoirs on pouvait avoir et que je lui réponds "ceux que tu veux" tout en expliquant qu'il n'y a pas de système qui les gère. Le fait qu'il n'y ai pas de limitations ote tout plaisir de prendre et de choisir ses pouvoirs avec soin. C'est, je pense, une sorte d'habitude Ludiste en création de personnage.
Deuxièmement, le fait que BetterDayz, connaissant l'univers et maitrisant bien l'opposition des concepts de Banalité et de Féérie, a commencé à pointé les incohérences d'appellation sur la feuille de personnage. Je vais développer ce point, qui n'a pas affecté la suite de la partie de façon visible, mais a sûrement joué dans nos esprits. Les cinq caractéristiques qu'un joueur fixe lorsqu'il crée son personnage sont ses Convictions, qui sont les valeurs morales et attitudes qu'il a tandis qu'il combat l'Autorité (dans note cas, la Banalité). Chacune d'entre elle a deux "états", une Libre et une Vendue. Au départ de la partie, les personnages ont toutes leurs Convictions à l'état Libre, et chacune pourra être Vendue de façon permanente à des instants dramatiques. Plus le personnage a de Convictions Vendues, et plus il est pris dans la corruption du système représenté par l'Autorité. Dans notre cas, cela signifiait donc qu'un personnage perdait sa créativité, son originalité et ses émotions pour sombrer dans la routine, le rationalisme et la grisaille. Le problème c'est que 3 des Convictions sur 5 sont des listes de cinq possibilités dont les deux états sont déjà écrits. Ils ont été pensé dans un esprit d'opposition Intégrité/Corruption, ou pour faire simple Bien/Mal à ce qu'il parait. Et c'est là que le problème s'est posé. Car ce sont deux axes perpendiculaires que le Bien/Mal et Féérie/Banalité. Il existe des Fées cauchemardesques comme bénéfiques, de même qu'il existe des Mères sur-Protectrices altruistes et de vilains professeurs de maths rationalistes. BetterDayz s'est presque insurgé de ce défaut de mon système et j'ai du trouver une solution d'improvisation pour qu'il puisse choisir ses caractéristiques. Je lui ai dit qu'il lui fallait s'écarter un peu du nom écrit, et penser à ce que serait la version Banale de la Conviction Libre. Il s'est mis à rayer l'état Vendu et à le ré-écrire selon ce qu'il voyait comme pendant Banal. C'est le premier problème que j'ai rencontré dans cet essai MY/CtD.

J'avais posé comme situation initiale des Changelings adolescents (puisque MY fait jouer des ados), tous dans le même lycée et constituant les membres du club de musique du lycée. Ils ont tout d'abord décidé que cela se passerait à Londres, où la musique a une histoire riche et passionnante. Puis ils ont créé un Reggae-man, un jeune bien sapé fan de rock sixties, un metalleux et un heavy-metalleux (ces deux-là ont fait des personnages assez proches, mais la partie les a assez différencié). Enfin, le dernier est le personnage haut en couleur de BetterDayz : un péruvien chanteur d'Opéra dont l'influence féérique est le lama. Il l'avait déjà imaginé avant la partie, alors que tout ce qu'il savait était qu'ils joueraient des Changelings adolescents combattant la Banalité. Nous avons passé trop de temps sur la création de personnage. C'est peut-être du à mon manque de cadrage (j'aurais en particulier du leur dire qu'on jouait en Narrativisme, et qu'ils devaient donc penser leur personnage comme un outil pour discuter des thèmes du jeu), mais je remarque ça dans Capes aussi. Je pense finalement que c'est juste une habitude des joueurs à peaufiner leur personnage, qui est en général leur seul point de crédibilité, donc qu'ils chérissent. Puis il a fallu créer les Figures d'Autorité. Je leur explique que chacun d'eux va devoir créer une Figure d'Autorité, un personnage qui incarne la Banalité et allait leur mettre des bâtons dans les roues. Ce premier exercice inhabituel en JdR classique les a étonné mais pas décontenancé, la plupart ayant été MJ au moins une fois. Mais la suite de la pré-partie a été plus problématique. Dans Misspent Youth, un des thèmes principaux est l'amitié adolescente, et le lien d'amitié n'est jamais brisé, jamais supprimé entre les Jeunes Délinquants, ils sont unis comme les doigts d'une main. Cela n'empêche pas cependant cette amitié d'être discuté. C'est pourquoi il y a une phase de questions d'amitié : chaque joueur pose une question in-character au personnage du joueur de gauche, et celui-ci y réponds in-character. Cette question doit être au sujet de leur amitié et relations. Les joueurs ont eu beaucoup de mal à imaginer des questions (même si finalement elles étaient intéressantes) et c'est la séquence qui a duré le plus longtemps, par rapport à ce qu'elle aurait du être. Je pense qu'ici, le problème vient du fait que dans un JdR classique les joueurs ne sont jamais en position de faire des méta-réflexions (sauf pour gagner), et donc de se poser des questions ne découlant pas logiquement de la mentalité de leur personnage. Là, je voulais juste qu'ils trouvent des questions intéressantes, et c'était pas facile pour eux. Ca n'est pas une considération de joueur, habituellement. Ca les a pris un peu à contre-pied.
Bon, suite à cela, la partie commence. Nouvelle surprise pour eux, je pointe un joueur et je lui dis : "choisis une Question d'Amitié qui sera discutée durant cette première scène ou alors une Figure d'Autorité qui sera au centre, puis décrit les cinq première secondes d'une scène". Il s'en sort très bien, en décrivant un moment calme dans la salle de musique, lorsque tout à coup ils sont convoqués par la vieille peau d'intendante (qui est la Figure d'Autorité qu'il a choisie parmi les cinq, et est donc complètement Banale).
Les premiers problèmes surviennent lorsque BetterDayz tente d'utiliser ses pouvoirs (dont je lui avais dit qu'ils étaient au choix, puisque non gérés par le système) pour tromper l'intendante : il transforme le règlement qu'elle montre en dessins de lamas animés. J'ai du lui dire que ça ne fonctionnait pas, et il s'est senti brimé. Précisons que si j'utilisais le système normal de Changeling (qu'il connait très bien) il n'aurait sûrement pas réussi, vu le score de Banalité qu'un être aussi routinier a, mais comme il n'y avait pas de lancer de dés, et qu'en plus je lui avais dit qu'il avait les pouvoirs qu'il voulait, ça ne lui a pas plu.

C'était la première occurrence d'un problème plus global : je n'avais pas insisté sur le fait que dans un jeu Narrativiste, chaque proposition que l'on formule doit avoir pour but de traiter du thème. Ici, les thèmes sont l'amitié, la lutte désespérée contre la Banalité, et son action n'interagissait avec aucun. Mais ça n'est pas l'exemple le plus frappant, seulement le premier.

Je teste leurs goûts et motivations afin d'assumer pleinement mon rôle d'Antagoniste et de frapper là où ils (les joueurs) détesteront le plus. L'occasion arrive lorsqu'un joueur annonce qu'un pote de son perso a ses entrées pour leur permettre de faire un petit concert dans un pub du quartier. Ils sautent tous de joie et j'appuie leur émotion en précisant que pour leurs personnages, ce sera la première représentation devant un public. Mon plan fonctionne. Je narre alors que le soir même, chacun de leur parent les appelle à une discussion sérieuse, une lettre à la main, et leur annonce que le lycée n'est pas content d'eux et qu'ils ont plusieurs heures de colle le samedi soir suivant. Paf ! En plein sur l'heure du concert au pub. Je sens que ça les embête, et je suis ravis. Leur parents insiste sur le fait que s'ils sèchent ces heures de colle, ils s'occuperont eux-mêmes d'une punition bien plus sévère.

C'est à ce moment-là que j'ai réalisé autre chose de très gênant pour la partie : des Changelings ne sont pas sujets aux pressions purement sociales, tout simplement parce qu'avec leurs pouvoirs, ils peuvent tous les éviter. La société Banale a une influence globale et à long terme sur de tels êtres, mais chaque occasion Banal ne les affecte pas, car ils ont tout loisir de l'esquiver. Des parents autoritaires ne sont pas un problème pour des Changelings, et c'était la base de mon antagonisme. Donc une base pas très solide...

Petite intermède créatif. BetterDayz a une idée d'utiliser des êtres féériques mineurs pour communiquer avec le reste de la Clique : il invente un petit bonhomme accroché à une pâquerette et se tourne vers moi, attendant que je l'interprète. Je lui rétorque alors que je représente la Banalité, je ne suis pas un MJ, et il serait donc étrange que j'interprète un être féérique. Il comprends alors que les autres joueurs sont là pour ça, et Daniel se lance pour jouer le petit bonhomme. Grâce à l'être, les Jeunes Délinquants se retrouvent (en faisant le mur) dans un squat d'artiste abandonné qui est leur Lieu Féérique.

Là, BetterDayz (toujours lui) propose qu'ils aillent au fin fond du Songe (un royaume séparé du monde réel dans lequel la Banalité n'a pas prise) pour retrouver les instruments légendaires des Cités Lama, qui leur permettrait de faire un concert inoubliable dans le pub. Deux choses sont alors confirmées dans mon esprit. 1) BetterDayz allait être très difficile à tenir sur les rails du thème (c'était le deuxième gros exemple où parlait plus de féérie que de combat contre la Banalité) 2) la perspective des heures de colle ne les a vraiment pas effrayé, donc mon plan semblait finalement échouer. Ils rentrent dans le Songe, et tout excités décrivent leur voyage merveilleux. Je commence à penser que la partie n'a plus rien à voir avec Misspent Youth. Je tente le tout pour le tout en annonçant qu'ils arrivent aux limites du Songe et que la Banalité a dévoré le reste, les Cités Lamas sont donc inaccessibles. Ils reviennent dans le monde réels, brimés. J'y suis peut-être allé un peu fort. Je désespère de réussir la partie. Je sens que pour redresser la barre, il faut que j'introduise un peu de nouveauté, je déclare alors le Conflit ("le" parce qu'il n'y en a qu'un par scène). L'Autorité annonce son Objectif (ce qui arrive si je gagne), ce que je fais = empêcher qu'ils aillent au concert. Puis les Jeunes Délinquants se concertent pour annoncer leur Espoir (ce qui arrive s'ils gagnent), ce qu'ils font = récupérer les instruments légendaires et faire un concert inoubliable.
Le mécanisme Fortune in the Middle les perturbe un peu, en particulier BetterDayz qui le fait savoir plusieurs fois ("eh mais c'est super restrictif ton système" que j'ai trouvé très paradoxal pour un jeu qui laisse une crédibilité énorme aux joueurs). Quand je leur dit "lance les dés, tu diras ce que tu fais ensuite", ça étonne et ça embrouille. Mais dès les premiers jets, ils s'en sortent très bien. Lorsque c'est le tour des Jeunes Délinquants, l'Autorité doit demander "qui s'oppose" et l'un des JD se lance. Ils ont rapidement mis en place un système tacite de roulement, pour éviter que ce soit toujours les mêmes qui parlent. Parfait.
L'autre chose qui les surprends et que je leur précise clairement, c'est que l'intelligence de leurs idées et leurs caractéristiques n'influeront en RIEN sur la réussite ou non du Conflit. Tout ce que ça changera, ce sera leur narration. Le résultat du Conflit est donc totalement aléatoire (avec un petit twist possible si jamais ils échouent, qu'on verra à la fin). Frustrant, surtout pour BetterDayz.

Ils arrivent à faire retrouver à un prof de maths sa passion de jeunesse pour le rock, et il se joint à eux. Finalement, les dés étaient contre moi, et ils remportent le conflit, décrivant un concert phénoménal.

Je déclare alors la seconde scène. Je demande au joueur suivant la même chose (Figure d'Autorité ou Question d'Amitié puis description des cinq premières secondes). Il choisit une question de rivalité entre deux des Changelings et il décrit le début de la scène. Exaltés par leur succès, les Changelings s'organise pour frapper un grand coup la Banalité, ils veulent pirater une émission de la Star'Ac anglaise (qu'il appellent "l'académie des étoiles" avec un accent anglais), symbole de l'art commercial. Réfléchissant, ils décident de monter un faux voyage scolaire pour aller à Londres, où est enregistrée l'émission. La scène 2 est notée comme étant celle qui doit voir apparaitre la question de l'épisode, celle dont la réponse sera donnée à la fin. Je l'entrevois à présent : "les Jeunes Délinquants arriveront-ils à faire un concert national à la télé en piratant la Star'Ac" et effectivement, ça éveillerait pas mal de gens. Maintenant, je les vois brainstormer pour déterminer leur plan. Oulala, je leur rappelle que ce n'est pas du Ludisme, et que le meilleur plan du monde n'a pas du tout plus de chance de marcher qu'un plan naze. Ils décident de se mettre à l'organisation du faux voyage scolaire. Je déclare le début du Conflit. Ils demandent l'aide du professeur de mathématique converti. Mais c'est là qu'une scène, la pire de toutes, est arrivée : Pascal se déclare comme volontaire pour convaincre le prof, et BetterDayz lui vampirise son moment créatif, sa crédibilité en lui proposant le plan (un plan complètement loufoque en plus). Il annonce que son personnage se transforme en Lama et demande au personnage de Pascal de monter dessus pour faire une entrée rigolote qui mettra de bonne humeur le prof. Non seulement il prends la parole à la place de quelqu'un (c'est très impoli) mais en plus, son idée ne rentre pas du tout dans le thème de la partie (la lutte désespérée contre la Banalité est loin avec ça). C'est la troisième occurrence où BetterDayz faisait une proposition complètement simulationniste et c'était la pire. Bon, passons. Plus tard, ils font une pétition dans le lycée pour que le voyage ne soit pas annulé. Je raconte que le caïd du lycée brutalise les gens car lui ne veut pas partir à Londres et leur pique leur argent. Là encore (mais pas sous l'initiative de BetterDayz), on assiste à une scène loufoque où un des deux metaleux prends le lama comme monture et arrive façon Clint Eastwood pour intimider le caïd. Finalement, ils arrivent à l'organiser. La Banalité n'est pas très effrayante, pour eux (c'est en grande partie du au fait que les joueurs classiques ne considèrent pas effrayant quelque chose qui ne peut pas les affecter à travers le système). Ca me fait penser que j'aurais du faire des choses bien plus horrible pour les faire flipper (profiter de la narration libre pour déclarer des actes ignominieux)

Enfin, la dernière scène arrive. Le troisième joueur décide de s'occuper d'une Figure d'Autorité un peu spéciale : c'est un producteur qui a contacté le rocker sixties, Jimmy, pour lui proposer un contrat. C'est un séducteur et il sait amadouer les ados. Daniel (qui jouait Jimmy) joue le jeu et raconte qu'il se sent tenté. Les autres vont tout faire pour l'empêcher de faire un bêtise. J'ai senti à ce moment-là que cette scène sortait un brin du cadre de Misspent Youth dans la mesure où elle risquait de briser l'intégrité du groupe, ce qui ne doit jamais être fait. Si le gamin acceptait le contrat, la partie ne pouvait plus continuer avec lui. Mais bon, la fin de la nuit de JdR approchait, j'ai laissé couler. Donc on lance un Conflit entre le producteur qui veut engager le gosse et les Jeunes Délinquants qui veulent ridiculiser et décrédibiliser le producteur. Après un peu d'aide de l'un et l'autre, on arrive à un jet où le producteur, après l'avoir fait visiter ses studios pour le faire rêver, est en position de gagner. Le principal mécanisme intéressant du jeu survient alors (mais qui ne peut se mettre en place qu'en cas de défaite des jeunes). Je dis à Daniel "Tu as maintenant le choix de laisser gagner le producteur ou de vendre une de tes convictions, te rapprochant un peu plus de la Banalité, pour gagner malgré tout" Daniel décide de jouer la conviction Fier vendue en Arrogant et nous a fait une narration brève mais superbe. La partie se conclue donc sur une victoire amère, où le producteur est ridiculisé devant ses employés, mais un des jeunes commence à sombrer.

Alors, les conclusions que j'ai tiré de cette partie :
1) l'univers de Changeling the Dreaming est très riche. Trop pour s'additionner aux thèmes déjà forts de Misspent Youth. Le surnaturel prenait trop de place, et leur a même permis de d'extirper de la réalité horrible, coupant toute oppression du système en place. Il y avait même quelques incohérences comme le fait que des Changelings obéissaient à leur parents et restaient sous leur joug alors qu'ils avaient les moyens surnaturels de les manipuler constamment. Cela s'applique aussi aux profs, qu'ils ont essayé d'embobiner surnaturellement.
2) la Banalité en tant qu'Autorité était un choix audacieux, mais trop. En effet, les Convictions fixées par le système ne collent pas avec le même axe (bien/mal contre rêve/routine). Avec un peu de recadrage, une Autorité très similaire doit être possible. Il faudrait par exemple exclure les cauchemars du rêve, contrairement à Changelings.
3) Si on ne prévient pas les joueurs clairement qu'on est en Narrativisme, ils risquent de partir dans des gros délires simulationnistes genre "tient, et si je faisais ça, ça donnerait quoi ?". Ca rend l'histoire totalement ingérable.
4) par contre, comme je le remarque à chaque fois, l'énorme dose de crédibilité qui leur est accordée ne les gène pas et ils l'utilisent pleinement. Les jeux Indies offrent au moins ça.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Lionel (Nonène) » 11 Nov 2009, 02:18

C'est dingue moins j'ai de temps (Démiurges en herbe, boulot, etc.) et plus les rapports de partie sur le forum sont fournis et intéressant.

Merci d'avoir mis un résumé, ça facilite pour connaitre l'essentiel. Mais comme je n'ai pas lu le post en entier, je ne vais pas donner mon avis.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Frédéric » 11 Nov 2009, 20:12

Guillaume, tu deviens un sérieux prétendant au titre de Mr. Pavé !
Vas-tu réussir à me détrôner ? ^^

Plus sérieusement, je suis très curieux de tes expérimentations univers de jeux mainstream + système indies. Donc, je vais lire ça dès que possible (mais ces derniers jours, le contrecoup de Nancy m'a éloigné des écrans).
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Christoph » 13 Nov 2009, 01:53

Hello Guillaume

Intéressant rapport de partie!

J'ai un peu de la peine à envisager la Banalité comme une Autorité: c'est plus une absence de quelque chose de désirable, qu'une oppression active par un système. En faisant quelque chose, les joueurs étaient donc forcément non-banaux. Seule l'inactivité pouvait les vaincre, or tu les poussait à se révolter, assurant leur réussite. A contraster avec un gouvernement qui interdit la musique punk et le skateboard, et qui envoie des flics tabasser les gamins qui obéissent.
Peut-être en personnifiant la Banalité par des agents moralisateurs et prudes, prêts à intervenir contre l'outrecuidance au nom de la vertu et de ce qui est séant, avec des machines pour laver les cerveaux ou des clones pour remplacer les emmerdeurs... en tout cas, il te faut quelque chose pour opposer une adversité durable aux PJ.

Je ne comprends pas ton emploi du terme "crédibilité". Il semble que dans ta vision des choses, le système octroie de la crédibilité aux gens. Qu'est-ce que ça veut dire concrètement? Est-ce que le système rendait vraiment les gens plus susceptibles de croire à une proposition? Au sens français et forgéen du terme, la crédibilité passe par un jugement de valeur ("Oui, je peux croire à cela, c'est vraisemblable", "Non, ça tient pas debout", etc.), est-ce que tu emploie également cela dans ce sens?
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 13 Nov 2009, 10:55

La Banalité n'était pas qu'une absence. Certaines personnes (les Figures d'Autorité) ont clairement des actes visant à la renforcer. Ce que tu décris était effectivement ce qui existait dans le monde que j'ai décrit. Les policiers qui tabassent les rebelles, les mères surprotectrices qui empêchent les gamins de s'amuser dans les terrains vagues, les professeurs qui insistent sur l'éducation comme moyen d'avoir un métier, les psychologues qui dévastent toute flamme de créativité artistique chez un enfant... La liste est longue. Le système lui-même oblige à "investir" l'Autorité dans des personnes, par son principe des Figures d'Autorité, et c'est ce que nous avons fait. Elles étaient cinq (autant que le nombre de Jeunes Délinquants) : Mr Porking, le professeur responsable des activité musicales, coincé et frustré par son manque de talent ; Joe, la brute de la récréation, qui ne cherche qu'à accumuler du pouvoir matériel (argent) et moral (par la terreur) ; Un producteur véreux, opportuniste, corrompu qui veut recruter Jimmy, un séducteur très malin ; Mrs Camus, la secrétaire intendante de l'administration, c'est à elle qu'il faut demander pour occuper la salle de musique, et elle est bornée et attachée à toutes les tracasseries administratives ; Un professeur d'Economie très strict qui pousse les élèves à se construire une carrière, à réfléchir en terme d'emploi. Avec ça, je pense que la Banalité était loin d'être passive, encore que c'est possible que ce soit l'impression que tu retires de mon rapport de partie, Christoph ?

J'emploie "crédibilité" dans le sens de "aval du système pour que les proposition du joueur soient acceptées par les autres dans la fiction". Dans les JdR classiques, la crédibilité des joueurs s'arrête aux décisions de son propre PJ, et la crédibilité du MJ s'étend sur absolument tout le reste. Dans Misspent Youth, et dans beaucoup de jeux Forgéens, le mécanisme de Fortune in the Middle et l'extension de droit de narration donnent bien plus de crédibilité aux joueurs, et elle est donc mieux répartie à la table (pour certains jeux Forgéens, elle est même équitablement répartie). On peut non seulement narrer que son personnage veut faire ça, mais en plus qu'il y réussit (si ça n'est pas gouverné par un Conflit), on peut narrer ce qu'un autre personnage (souvent non PJ) veut ou fait et on devient en ce sens MJ pour ce qui est de la définition classique. C'est pour ça que j'ai insisté auprès des joueurs, j'ai dit "je ne suis pas MJ, je suis l'Autorité, je suis juste chargé de faire en sorte que le monde vous met des barrières à travers la Banalité" car je savais bien que MJ était connoté au vu de leur expérience.
Il en découle que oui, ça se rapproche du sens courant et Forgéen que tu cites : si le système ne me donne pas la crédibilité sur quelque chose, les autres ne vont pas y croire (l'inclure dans la fiction) et le jugeront donc non-acceptable. A contrario, si j'ai la crédibilité sur un élément, les autres vont inclure tout ce que je dis dans leur fiction (en sachant que la clause de crédibilité inclut toujours, mais généralement implicitement, la notion de cohérence avec ce qui a déjà été narré).
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Christoph » 13 Nov 2009, 13:27

Hello

Effectivement, tu as donc bel et bien eu des personnages pour incarner la Banalité, ce n'est donc pas ça le soucis après tout. J'ai eu une absence cérébrale au moment d'écrire la fin de cette remarque, j'étais croché sur la remarque "Sans gouvernement qui la stipule, sans prêtres qui la prêchent, sans police qui la fait respecter, la Banalité est partout mais insaisissable," mais c'est évident dans ton rapport qu'il y avait d'autres personnages qui incarnaient la Banalité. Ça c'est réglé.
Je crois donc tout simplement avoir mal compris le "problème" qu'il y a eu en choisissant la Banalité que tu décris par exemple quand BetterDayz s'est insurgé. Peut-être que maintenant c'est un peu plus clair pour moi.
Lui voyait l'opposition Banalité/Féérie comme orthogonale à l'opposition Bien/Mal, et je peux être d'accord avec ça. Là où je ne suis pas votre raisonnement c'est que l'opposition entre résistance à l'Autorité et la collaboration avec elle soit équivalent à Bien/Mal. Aux yeux des personnages, oui (mais on peut faire le même argument pour la Banalité-Féérie dans ce cas.) Cela me semble très orthogonal aussi, s'il faut juger d'un point de vue du joueur. Il y a des manières de résister qui sont très douteuses (intégrisme et terrorisme notamment) et il y a quelques bons points possibles dans un système autoritaire (à l'Est, certains regrettent la disparition des crèches et autres services d'Etat)
Cependant, je peux comprendre que BetterDayz, en fin expert du canon de Changeling, se soit quelque peu offusqué, car comme tu le montres, les règles de Misspent Youth introduisent leur part de biais.


Sinon je vois ce que tu veux dire pour crédibilité, il me semble juste que le mot ne soit pas adapté. Les règles peuvent me dire ce qu'elles veulent, c'est pas pour autant que je serai plus susceptible de croire un mec qui raconte une ânerie avec son soutien. Au mieux, je l'accepte pour continuer, mais de là à dire que parce que le système soutien un gars, je le trouve crédible, il y a un pas.
Par exemple, la scène où BetterDayz veut entrer en scène sur un lama, même s'il a le droit de le proposer, je ne trouverai jamais cela crédible.
Ce que tu décris me semble être plus précisément rendu par le terme "responsabilité". Tu dis bien à tes joueurs que tu es chargé de jouer la Banalité: c'est clairement une forme de responsabilité. C'est pas pour autant qu'ils te trouveront crédible si tu raconte qu'ils se font attaquer par des aspirateurs maléfiques (sauf si cette proposition est vraiment cohérente dans le contexte, par rapport à ce qui a été joué auparavant).
Le système peut effectivement partager les responsabilités (et je suis d'accord que ça en déstabilise plus d'un au début). Avoir une responsabilité est communément accompagné de droits et compétences nous permettant de parvenir aux buts recherchés, ce que tu décris implicitement tout au long du rapport.
La crédibilité c'est la susceptibilité d'être cru (par les autres joueurs), la cohérence c'est le rapport logique, l'absence de contradiction, dans l'enchaînement d'éléments (ce qui en fait deux notions très liées). La responsabilité est ce qu'on nous demande de faire. Les droits sont ce que nous pouvons faire pour arriver à ce qui est demandé de nous.
A toi de voir si tu veux adapter ou non ce vocabulaire, je ne t'y obligerai évidemment pas.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 13 Nov 2009, 14:35

Ce que je voulais dire avec ma phrase poétique sur la Banalité, c'est que ça n'est pas une valeur unifiée prônée comme telle par un système, elle est constituée de pleins de petits principes qui suivent une même logique implicite, celle de la routine sans dangers ni surprises.
Le problème qui s'est posé, pour donner un exemple précis, est que les Convictions sont des couples de notions dont se servent les Jeunes Délinquants pour résister à l'Autorité. Il y a le Moyen (la façon qu'il a de résister), la Motivation (pourquoi résiste-t-il ?), l'Opportunité (qu'est-ce qui lui permet de résister sans se faire remettre à sa place automatiquement ?), le Modus Operandi (les techniques qu'il utilise pour résister) et le Trouble (son défaut pour résister). Chacune d'entre elle a deux états, Libre et Vendue. Toutes commencent à l'état Libre et pourront lors d'un Conflit être Vendue pour remporter le Conflit alors qu'il s'avérait perdu. C'est un moment dramatique où le Jeune Délinquant choisit de se rapprocher de ce qu'il combat pour mieux la vaincre, au risque de finalement devenir comme elle. Et bien, les trois premières Convictions sont des listes de cinq couples fixés dans les règles (par exemple, les cinq Motivations sont Altruisme/Intéressé, Optimiste/Cynique, Outré/Colérique, Fierté/Arrogance et Accroc aux Sensations/Nihiliste). Certains couples ne collent pas du tout avec une opposition Féérie/Banalité comme Outré Colérique. Il n'y a rien de Banal à être Colérique, alors que c'est effectivement dans le cadre d'une opposition morale Bien/Mal. De nombreuses fées sont Arrogantes, ça ne les rapprochent en rien de la Banalité. Voilà, le jeu, par ses règles même, fixe un axe d'évolution des Jeunes Délinquants du Bien vers le Mal (vision morale assez classique de l'Occident). Ca aurait parfaitement collé si on parlait uniquement d'Art créatif opposé à l'art corrompu et commercial, mais à partir du moment où l'on introduit des notions métaphysiques appuyées par du surnaturel, ça colle plus.

Pour tout t'avouer, j'utilise le sens de crédibilité que j'ai compris dans son utilisation sur The Forge. C'est peut-être une grosse incompréhension de ma part, mais j'ai cru comprendre qu'il ne l'utilisaient pas exactement dans le sens courant français de "crédibilité".
Pour régler une incompréhension, de ta part cette fois, la scène du lama ne posait aucun problème en terme de crédibilité. En effet, la race de Changeling qu'il a choisi pour son personnage lui donnait ce pouvoir, et de toutes manières, l'existence de chimères qui ont la forme de lama ne pose pas de soucis non plus. Le seul problème avec cette scène, c'est qu'elle brisait entièrement l'ambiance et les thèmes qui étaient au centre du jeu, et mettait en avant l'humour et l'incongru des Changelings. Dans un autre style de partie dans l'univers de changeling, ça serait passé parfaitement. (pour les aspirateurs maléfiques, c'est simplement que des éléments aussi féériques ne peuvent pas provenir de la Banalité. Mais si un des joueurs l'avait proposé, ça serait passé. Le monde des Changelings permet tout, et c'est parfois déroutant)
Quand tu parles de responsabilité, le sens ne colle pas exactement à ce que je veux dire. En effet, dans un JdR classique, les Joueurs ont effectivement la responsabilité des décisions de leur PJ (personne ne le fera à leur place, et s'ils n'ont pas de bonne idée, c'est dommageable à la partie), de même que le MJ a la responsabilité du reste du monde (personne ne décidera ce qu'il s'y passe à sa place, et s'il n'a pas de bonnes idées, c'est dommageable). En revanche, dans la plupart des JdR indies que j'ai lu, il n'existe que très peu de champs de responsabilité. J'avais effectivement la responsabilité de la Banalité, et eux des décisions morales de leurs Jeunes Délinquants, mais s'ils voulaient narrer la réaction d'un de leur professeur, le système l'autorise, et si moi je voulais narrer ce que leurs personnages accomplissaient à un moment, le système m'y autorisait. Ca n'est donc pas qu'une question de responsabilité, mais simplement de droit. Regarde également Shock qui dit bien qu'on peut narrer n'importe quoi, mais qu'il y a un droit de Veto, c'est le processus inverse d'un JdR classique, qui supprime simplement le droit de donner ses idées si ça n'est pas dans notre champs de crédibilité.
Donc j'utilise crédibilité dans un sens qui dépasse la responsabilité, et se rapproche de ce que tu appelles "droit". Ce qui fait que j'avais non seulement la crédibilité sur la Banalité, mais aussi la responsabilité (ça ne va pas forcément avec). Dans une partie de Capes, en revanche, il y a très peu de responsabilité, mais énormément de crédibilité. C'est l'un des principes du jeu d'inciter à prendre les choses en mains, mais sans jamais forcer qui que ce soit à s'occuper d'un aspect de l'histoire. Donc je suis parfaitement d'accord avec toutes les définitions que tu donnes à la fin de ton message, mais j'avais cru que le vocabulaire Fogéen donnait un autre sens à "crédibilité" que le sens courant, justement. Remplace chaque fois que je l'utilise par "droit dans la fiction" si tu préfères.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Christoph » 13 Nov 2009, 16:31

Okay pour le premier point, je pense comprendre désormais.

Pour moi aussi tout t'avouer, je prends le terme de responsabilité directement depuis un podcast avec Ron (si je retrouve je te file le lien, je ne l'ai pas sous la main). Il remplace celui d'autorité qu'il utilisait auparavant.
Une responsabilité peut tout à fait être partagée entre plusieurs participants (MJ ou joueurs.) Le fait que j'aie la responsabilité de quelque chose n'implique pas non plus que je sois le seul à faire des propositions sur le sujet en question (mais j'ai le dernier mot.) C'est ce qui se passe dans Shock: où la responsabilité est donnée à chacun de proposer des choses et de se prononcer si quelque chose ne lui convient pas (personne d'autre ne le fera à sa place, et il serait donc "lésé", il en est donc bien responsable).
Quand tu dis: "si je voulais narrer ce que leurs personnages accomplissaient à un moment, le système m'y autorisait", je vois deux manières de comprendre. Soit tu parlais des professeurs dont les joueurs décrivaient les actions (et alors on est dans le cas d'une responsabilité partagée), soit tu parles des PJ et tu décris la responsabilité des situations, dont une technique classique est le cadrage de scènes: en effet, quand tu poses une scène, il est souvent nécessaire de préciser ce que faisaient les PJ à ce moment-là et personne ne s'en offusque.
Ceci étant dit, dans mon vocabulaire, le coup du lama n'était pas crédible, justement parce qu'il brisait l'ambiance et les thèmes. Dans une "bonne histoire", jamais le personnage n'aurait fait cela! Ça ne s'y prêtait pas du tout. J'utilise vraiment la définition de crédibilité tirée d'un dico, ça m'arrange de ne pas avoir à inventer un nouveau mot (et ça coïncide avec le Provisional Glossary sur la Forge.) Nonobstant (ça aussi je l'ai trouvé dans le dico...), BetterDayz avait tout à fait le droit de dire une chose pareille (les règles de MY et le background de Changeling lui donneraient raison). Et il est évidemment responsable de ses propos, dont leur crédibilité. Aucune règle ne peut juger de la crédibilité d'un propos, seul les joueurs peuvent décider ce qu'ils pensent d'une déclaration.

Ceci n'enlève rien à la force de tes constatations, qui restent tout à fait valables! Je dirais même que je suis tout à fait d'accord avec tout ce que tu dit à ce sujet.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 16 Nov 2009, 13:35

Nous sommes d'accord, la responsabilité et le droit de narration (que j'appelle crédibilité, en général) sont deux choses différentes, et on peut avoir soit la responsabilité et le droit, soit le droit simple, soit aucun des deux, et ce pour chacun des éléments de narration. Cet ensemble de paramètres, souvent défini dans les règles du jeu, constitue ce que j'appelle la distribution de la crédibilité. Dans Capes, par exemple, tout le monde à un droit de narration maximal (les seules restrictions sont de ne pas résoudre un conflit avant sa résolution par le système, et de ne pas briser le Comics Code) et une responsabilité minimal (il faut narrer quelque chose, lorsque c'est notre tour). En revanche, dans Misspent Youth, le droit de narration est plus restreint, mais pas aussi strict que dans un JdR classique. On a le droit de narrer des actions des autres Jeunes Délinquants, mais il faut un accord du joueur, et on ne peut pas narrer les actions ou réactions des Figures d'Autorité (pour garder une sorte de parti pris par les joueurs). La responsabilité est qu'il faut narrer les actions de son Jeune Délinquant/Autorité lorsque vient son tour, mais c'est tout. Contrairement à un JdR classique, ça n'est pas au MJ de dire comment se déroule une action qu'un JD tente, ou de décrire la scène (cette responsabilité-là va de joueur en joueur).

"si je voulais narrer ce que leurs personnages accomplissaient à un moment, le système m'y autorisait"
Les joueurs avaient effectivement droit de narrer les actions des professeurs, s'ils le souhaitent (sauf si ce sont des Figures d'Autorité), mais il n'y a aucune responsabilité et s'ils n'ont pas d'idée, ils peuvent laisser ça à l'Autorité, ou à un autre joueur. Il n'y a pas de responsabilité partagée, puisqu'il n'y a pas de responsabilité du tout, il n'y a que du droit.
L'Autorité n'a pas le droit de narrer les actions des JD, encore une fois pour mettre une sorte de parti pris.
Pour ce qui est de poser une scène, je repète qu'un joueur doit présenter un cadre de scène chacun son tour. Et dans ce cas, effectivement comme dans tout JdR, il faut qu'il aie un minimum de droit de narration sur les actions des autres protagonistes, JD ou Figures d'Autorité. Mais le système restreint ceci en limitant aux "5 premières secondes de la scène" la description que le joueur peut faire.

Le coup du Lama n'était effectivement pas crédible si tu prends en compte le thème et l'ambiance. Peut-être n'es-tu pas habitué à jouer avec des rolistes expérimentés, mais qui découvrent l'Indie et sa liberté créative, contrebalancé par un système plus contraignant car orienté G, N ou S et plus précisément encore. En tout cas, sache que le fait de devoir cadrer à un thème ou à des enjeux narratifs est au mieux une règle implicite dans l'esprit de la plupart des joueurs (énoncée souvent comme "ne pas pourrir le scénar du MJ") et comme dans MY (comme beaucoup de jeux Indies), il n'y a pas de scénar à pourir, les joueurs se sentent plus libres. Ils sont plus prompts encore à faire du Simulationnisme de Situation, donc à essayer des trucs et à en apprécier l'Exploration. Ils ne sont pas habitués à respecter un thème narratif. Je comprends donc parfaitement que la création d'une "bonne histoire" n'aie pas été dans les priorités de BetterDayz. J'aurais tout simplement du leur expliquer ce qu'impliquait de jouer en Narrativisme, et leur poser clairement les thèmes et enjeux. Je le saurais pour la prochaine fois.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Frédéric » 17 Nov 2009, 02:30

C'est drôle, mais mis à part l'apparition ponctuelle de lamas, j'ai eu l'impression en lisant le rapport de partie que l'histoire aurait finalement très bien pu se dérouler dans notre monde.

L'idée de jouer dans l'univers de Changelings n'a-t-il vraiment fait que parasiter la partie ?

Auquel cas je m'interroge : qu'est-ce qui te motive à faire ces mélanges jeu forgien + univers de jeu mainstream ?
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 17 Nov 2009, 03:20

Ce qui me motive à faire ce mélange : deux choses.
D'abord, c'est pratique parce que je propose la plupart de mes parties dans le cadre des Nuits Tenebrae (le mec en bas de la page en pull rouge c'est moi). Cette association se concentre sur les jeux du Monde des Ténèbres et lors des nuits, seul 1 partie peut être proposée avec un jeu n'en faisant pas partie. Afin de pouvoir proposer mon jeu comme Monde des Ténèbres, j'ai annoncé vicieusement une partie Changeling (en disant en filigrane que je n'utiliserai pas le système White Wolf). Ca a l'avantage non-négligeable d'attirer un max de monde, parce que c'est pour le Monde des Ténèbres que les gens viennent à Tenebrae.
Ensuite, c'est un essai qui m'attirait. J'aime beaucoup Misspent Youth (même en ayant fait qu'une seule partie), et des parties dans d'autres univers me plairaient énormément. Mais Changeling est un coup de coeur, et j'ai pensé à cet univers lorsque j'ai lu le jeu en pensant "tiens, et si... ?"
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Frédéric » 17 Nov 2009, 07:59

Ok ! (Il a pas l'air de faire très chaud dans votre salle malgré les convecteurs qui pendent du plafond ^^)
Christoph : c'est pas le principe de Czege qui dit qu'on peut jouer à n'importe quel jeu dans n'importe quel univers ?
Est-ce qu'ici on a un contrexemple (les principes métaphysiques de l'un en contradiction avec les thématiques de l'autre) ou ais-je mal compris ce principe ? Ou troisième option ?
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Christoph » 18 Nov 2009, 00:10

Hello

Guillaume: merci pour les précisions sur MY, je vais m'y intéresser de plus près!
Je me rends tout à fait compte des difficultés que tu évoques (comme peuvent l'attester mes nombreux rapports de partie), mais cela n'a rien à voir avec mon propos. Mon seul but était de présenter la manière dont j'utilise les différents termes: crédibilité, cohérence, et responsabilité, directement repris des discussions sur la Forge (je ne tiens pas particulièrement au terme de "droit" que j'ai utilisé, c'est probablement un peu superflu dans le cadre que je présente). Tu es libre de ne pas les adopter dans ce fil et je ne vais pas argumenter davantage dans ma direction.
Tu peux trouver le podcast ici (la discussion que je cite se déroule à partir de 31:00 environ).

Je suis d'accord avec toi que "surprendre les gens avec du narrativisme" (ou autre démarche créative) n'est pas très efficace, c'est en tout cas mon expérience également. Il faut être clair sur les buts et les techniques, expliquer ce qu'on va faire. En revanche, je déconseille de parler de théorie trop abstraite. Utilise plutôt tes connaissances théoriques pour te guider dans le choix d'une explication compréhensible de tout rôliste. Une sorte de vulgarisation adaptée au jeu et aux gens. Ça, ça marche du tonnerre, pour moi.

Frédéric: Clinton Nixon aurait dit un jour qu'on peut faire du Star Wars avec n'importe quel jeu. Je pense que cette idée peut être étendue à d'autres "backgrounds": ne serait-ce qu'avec notre monde quotidien. Etant donné un contexte suffisamment riche, on peut en tirer des sous-ensembles pour constituer des Univers s'intégrant à divers jeux. L'Univers n'est pas dans le Jedi, mais dans la structure des objets par rapport auxquels s'articule l'action de la partie (phrase horrible, c'est la première fois que je suis amené à mettre des mots sur l'idée).
Dans la partie de Guillaume, les cours des fées ont probablement joué un faible rôle, mais l'axe Banalité/Féérie était central (ça fait partie de l'Univers Changeling qui a effectivement migré dans Misspent Youth), car cela nous permet de donner un sens aux actes des personnages.
Partant, on peut sûrement imaginer une sorte de Changelings dans la banlieue sur des règles proches à celle de Dogs in the Vineyard, où l'on joue des fées investies de l'autorité d'une certaine cour pour juger les autres fées par rapport à leurs excès de Banalité (pour autant que cette question n'ait pas de réponse univoque). Enfin, je ne connais pas très bien le contexte de Changeling, mais l'idée est là.
Il y a donc pour un "background" donné plusieurs Univers (au sens du "Setting" de Ron Edwards) à extraire et à greffer sur des jeux aux propositions très diverses. Les mariages peuvent ensuite être plus ou moins heureux, comme nous le montre Guillaume à travers sa série de rapports.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Frédéric » 18 Nov 2009, 00:15

Ah, oui, ça me paraît plus cohérent comme ça.
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Re: [Misspent Youth+Changeling] essai peu concluant

Message par Nocker (Guillaume) » 25 Nov 2009, 17:37

Je te rassure, Christoph, je n'avais pas l'intention de faire une conférence sur le GNS avant chacune de mes parties Indies.
Non, j'ai appris, en particulier avec le Podcast, à trouver des mots plus communs et des définitions parlantes pour expliquer ce que la théorie GNS peut apporter pour améliorer une partie.

Et maintenant que j'accumule les parties Indies, je peux encore mieux pointer ce que je n'aime pas, et même donner des exemples de choses à ne pas faire.
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