J'ai hybridé mon système de façon à ce que les joueurs explorent des objectifs et problèmes intimes de leurs personnages, tout en y greffant une intrigue préparée à l'avance par le MJ. Jusqu'ici rien de particulier, si ce n'est que la préparation du MJ est une refonte d'un scénario que j'ai écrit pour ma campagne il y a maintenant plusieurs années.
La réelle particularité de cette partie est donc que j'ai renoué avec une façon de mener assez classique que j'avais complètement abandonnée depuis plusieurs années, avec des descriptions très construites, des discours écrits à l'avance, un univers très détaillé, une intrigue constituée de secrets et de faux semblants. Et ce, avec un système très moderne et inspiré de jeux de The Forge. ET par système, je n'entends pas uniquement « les mécaniques de résolution », non, ça va bien plus loin que ça.
L'idée de cette hybridation est née d'une frustration multiple :
- j'ai toute une campagne de scénarios « classiques » d'Harry Potter que j'ai adoré écrire et faire jouer, mais j'ai été frustré à mort de n'avoir sous la main qu'un système pourri : le BaSIC qui m'a saboté une grande partie de ces parties (à en pleurer tant il est nul) ; et quand je l'ai écrit, j'étais pétri d'idées préconçues sur la façon d'amener et de résoudre les enjeux ; j'avais donc envie de récupérer le bon en améliorant le moins bon, voir le mauvais ;
- ces anciennes parties souffraient d'un gros manque : ok, les intrigues et l'exploration de l'univers étaient cools, mais quid des moments intimistes ? Des histoires d'amour de collégiens ? Des rivalités, de l'amitié, la trahison, les disputes, les examens ? … Ces choses là manquaient vraiment et une grande partie de mon travail sur Bienvenue à Poudlard depuis consistait à les réintégrer naturellement ;
- j'ai beaucoup moins d'appétence et d'excitation pour les jeux où la préparation est pré-mâchée ou inexistante (bien que l'expérience puisse être exceptionnellement forte et plaisante, voire enrichissante) ; je suis nostalgique de cette frénésie jubilatoire qui s'emparait de moi quand j'étais sur le point de faire jouer un scénario sur lequel j'ai beaucoup bossé ; c'est un point qui me paraît important : plus on s'investit avant la partie, plus on est motivés à la faire jouer et ça me manque avec des jeux sans préparation, ou même avec une préparation minimale (Démiurges, rônin, Innommable etc.) ou je me sens assez détaché de l'intrigue créée à l'avance ;
- j'aime le confort que procurent les narrations, descriptions et intrigues de MJ bien préparées pendant les parties, avec l'impression que ce que je donne aux joueurs est posé avec une aisance, une assurance et un aplomb qui lui donnent une épaisseur et une densité sans égal à la partie ;
- en tant que MJ, je me sens parfois en difficulté quand il y a trop d'improvisation et j'ai l'impression que l'effort n'est pas toujours récompensé du fait que mes joueurs n'ont pas toujours autant de facilités avec l'impro que mes exigences le voudraient (c'est ce que j'ai ressenti avec Polaris, My Life with Master, Démiurges et d'autres jeux que j'aime et adule) ; (je m'excuse d'avance pour les joueurs concernés, ce n'est pas une critique ou un regret, juste le constat que ces jeux me satisfont plus avec des joueurs très imaginatifs et très à l'aise avec l'impro) ;
- j'aime les jeux « forgiens » pour leur fonctionnalité, leurs thèmes parfois inattendus, leur capacité à créer une dynamique sociale et créative stupéfiante, l'importance qu'ils donnent aux joueurs, leur capacité à enrayer les problèmes que l'on rencontre dans les JDR, et tout simplement l'expérience qu'ils procurent, mais j'ai toujours gardé une frustration et une nostalgie de ne plus pouvoir vivre les anciennes expériences qui n'avaient pas que du mauvais.
Pour cette partie, j'ai donc pris un parti égoïste : bordel, je veux revivre tout ça !
Bienvenue à Poudlard est un jeu qui intellectuellement me laisse indifférent, contrairement à mes autres jeux (sauf Gloria qui m'a posé le même problème que BaP) je n'ai donc aucun intérêt à m'y investir, en dehors d'une petite revanche mesquine sur le gâchis qu'a été ma chère campagne qui m'a demandé tant de sueur et qui, malgré de grandes qualités a été vraiment en dessous de son potentiel.
Eh puis merde ! Bienvenue à Poudlard, c'est de la célébration des films et des romans Harry Potter, je me jette à l'eau et j'essaye de faire ça bien : de garder tous les avantages du classique et du forgien sur ce projet !
La fiction
Je vous propose ici le scénario et la préparation du contexte que j'ai utilisées : http://froudounich.free.fr/PDF/l%27orbe ... efonte.pdf
(Le contexte est censé servir pour la campagne entière, en y intégrant des ajouts petit à petit).
Les joueurs sont Gaël, Lionel (Arkel) et Louise.
- Gaël joue Mary-ann Waldorf, Gryffondor gosse de riche un peu manipulatrice ; veut retrouver le trésor des Waldorf et veut intégrer le club de l'élite de Poudlard.
- Lionel joue Alex Nebriam, Serpentard impulsif et décalé pour sa maison composée de sinistres individus peu scrupuleux ; il veut devenir populaire ; il veut trouver de vraies fées (il a du sang d'être féérique en lui) ; et il veut surmonter sa différence avec les autres Serpentard.
- Louise joue Penny Walnut, Gryffondor ; elle veut réussir brillamment son année pour pouvoir devenir préfet plus tard ; elle veut découvrir le secret de sa bague (liée à la magie noire) ; elle veut venger la mort de son frère.
Déjà on sent le potentiel pour une histoire formidable.
Les PJ ont tous 11 ans et entrent en première année à l'école, je commence donc par une introduction assez longue pour leur décrire brièvement leur voyage, puis leur arrivée à l'école, la cérémonie etc. (Voir le scénario pour plus de précisions.)
Puis, chaque joueur à tour de rôle lance une scène en expliquant ce qu'il veut faire (ou en indiquant l'objectif qu'il veut aborder pendant cette scène).
Le MJ fait la plupart des mises en scène, mais parfois les joueurs l'ont entreprise d'eux-mêmes, notamment quand les éléments nécessaires à la mise en scène étaient déjà connus.
Quand chaque joueur a joué une scène, le MJ place une de ses scènes préparées à l'avance.
Voici un florilège des scènes de joueurs :
Meilleur scène de bibliothèque ever :
Louise décide de jouer une scène où son personnage, Penny se rend à la bibliothèque pour aller voir si elle ne peut pas en apprendre plus sur sa bague. (Pour l'anecdote, Louise et Lionel sont tous deux bibliothécaires, ce qui nous a fait sourire et du coup, elle s'est avérée particulièrement intéressante pour une simple scène de bibliothèque qui s'est toujours résumée à une recherche d'indices sommaire et absolument pas »mise en situation »).
Elle emprunte des livres de cours et dessine un symbole sur un bout de papier (que Louise a directement copié d'un élément de motif présent sur le mur derrière moi) et demande au bibliothécaire si des livres en parlent. Il dit qu'il n'a jamais vu ça mais qu'il peut aller jeter un œil dans la réserve. La réserve est un bazar sans nom, le jeune bibliothécaire fait du rangement. Il disparaît un long moment sous une pile de livre et Penny est contrainte de l'attendre puisque la réserve lui est interdite.
Le bibliothécaire reparaît au bout d'un instant un livre à la main et lui explique qu'elle devrait abandonner ses recherches sur ce symbole, elle est beaucoup trop jeune pour tremper dans des choses aussi sombres.
Ce qui ne transparaît pas dans le CR, c'est que les éléments de couleur dans cette bibliothèque étaient nombreux et naturels, à la fois de la part de Louise et de la mienne : les comportements du bibliothécaire, le fait que Penny vienne emprunter des livres, les descriptions diverses etc. C'était vraiment, pour une scène en apparence anecdotique très vivant.
J'ai vraiment eu l'impression que la charge esthétique des scènes du MJ (en plus des références communes très riches et précises entre les joueurs) a retenti de manière bénéfique sur l'ensemble de la partie, y compris les scènes des joueurs : d'une part, ça m'a galvanisé, créant une ébullition imaginaire dans mon cerveau, m'aidant par exemple pour cadrer les scènes que je n'avais pas prévu à l'avance, mais j'ai l'impression que ça a retenti sur l'imagination des joueurs, (Lionel et Gaël, si vous pouvez me dire ce que vous en pensez).
Une scène de confessions intimes
Louise cadre elle-même une scène où dans le dortoir de Gryffondor, Penny avoue à Mary-ann qu'elle a vu son frère mourir il y a quelques années et qu'elle ne peut pas s'empêcher de le ressasser, Mary-ann en retour lui explique que son père qui travaillait au ministère a disparu cinq ans plus tôt. Cette scène a resserré le lien entre les deux personnages, je ne m'y attendais pas du tout, c'était gratuit de la part des joueurs, ça n'a rien rapporté, d'un point de vue mécanique et il n'y a pas eu de Conflit (et pourtant, Louise n'est pas du tout une habituée de mes tables, à la Guilde elle est plutôt habituée aux parties plus classiques, elle a été particulièrement à l'aise et entreprenante).
La course à la popularité
La question de popularité est un élément central dans Harry Potter, voici le résumé de plusieurs scènes où la question a été abordée :
Mary-ann, Penny et Alex se tirent un peu la bourre sur leurs performances scolaires, mais pas seulement : Mary-Ann cherchant à entrer dans les bonnes grâces du professeur Slughorn de manière à entre dans son club de célébrités cherche un moyen d'approcher un élève bien plus âgé, coqueluche de l'école. Il est entouré de filles lui tournant autour. Les amis de Mary-Ann la laissent en plan pour rejoindre le cercle des admirateurs de James (le garçon en quetsion). Mary-Ann approche alors et se présente, expliquant bien qui est son père. Le garçon impressionné discute avec elle, il fini par accepter de soumettre sa candidature au professeur.
Plus tard, Mary-ann est acceptée dans le club, elle doit se trouver un cavalier pour le bal. Elle demande donc à James qui décline à cause de leur différence d'âge. Lionel en profite pour faire intervenir son personnage Alex, qui cherche à être populaire, et propose d'être son cavalier. Mary(ann accepte malgré les avertissements de James quant au fait qu'elle ne peut pas faire venir « n'importe qui » dans ce club sélect.
Durant le bal, tout le monde ignore Alex, y compris le professeur Slughorn qui exprime à Mary-ann combien il est triste que son père ait disparu... et James finit par venir dire à Mary-ann qu'elle n'aurait pas dû choisir Alex comme cavalier, il juge ça indigne d'elle et il pense faire en sorte qu'elle ne fasse plus partie du club. Alex et Mary-ann lui balance les ragots au sujet de sa propre cavalière, (Conflit) suite à quoi James sourit et dit : « très bien, je vois que vous avez compris l'esprit de ce club, vous y avez peut être finalement votre place ». (C'est Gaël et Lionel qui on fait la narration de victoire au Conflit).
Ce qui m'a marqué concernant ces scènes, c'est qu'elles étaient à leur juste place : les joueurs ne se forçaient pas, j'ai éprouvé une étonnante facilité à jouer mon rôle de MJ, ça ne se parasitait pas avec les scènes du MJ, les joueurs étaient vraiment concernés par les enjeux plutôt anecdotiques et intimistes et je pense avoir réussi à éviter tout passage en force et désappropriation des personnages joueurs.
Quelques scènes du MJ à présent :
Scène 2 : le professeur Liedes
Dans l'une des salles de cours du cachot éclairée par des chandeliers, le professeur tentera d'expliquer à des enfants de onze ans que ce n'est pas la nature d'un être qui le rend mauvais mais ses actes. « On ne naît pas mauvais, on le devient par intérêt ou par rage. Certains parmi vous se laisseront tenter par l'attrait de la magie noire, mais vous êtes les seuls à pouvoir combattre votre monstre intérieur. » (discours que j'ai préparé avant la partie et ressorti tel quel pendant, c'est le genre de détails qui donnent toute leur substance aux scènes de cours, j'ai essayé divers moyens pour pouvoir les improviser, mais c'était toujours décevant.)
« Quoi qu'il en soit, il est primordial de vous apprendre à vous défendre contre les choses les plus sombres qui peuplent ce monde. Nous allons commencer par le sortilège du saucisson... »
Là, le professeur leur indique quelle formule et comment lancer le sort et les joueurs doivent lancer les dés pour avoir une chance d'apprendre le sort.
Alex, raillé par les autres Serpentard s'entraîne avec Philip Londubat (un aïeul du Londubat des romans), un de ses amis PNJ (les joueurs inventent des PNJ avant de commencer la partie). Alex veut tellement se faire bien voir de ses pairs qu'en lançant son sort d'immobilisation, il ridiculise Londubat, raillé par les Serpentard. Celui-ci lui en veut.
Je finis la scène en faisant parler des camarades de classe à la sortie du cours, disant que deux élèves : Walter Conroy et Lucy Midgewell ne sont pas venus en cours. Ce qui conduira à la scène suivante plus tard :
Scène 3 : le tableau du troisième étage
Alors qu'un PJ se rend en cours, il voit sur le sol, des traces de nourriture étrangement colorées. Soudain, un grand tableau représentant un puits l'avale. Il se retrouve dans un décor peint, permettant d'accéder à tous les autres tableaux de Poudlard. Il retrouve Walter Conroy et Lucy Midgewell coincés là. Alex saute dans le puits pour essayer d'en ressortir et il se retrouve dans un tableau donnant sur la salle des potions, il voit le professeur Slughorn (professeur des potions) donner une potion de couleur rouge sombre au professeur Liedes (professeur de défense contre les forces du mal), celui-ci la boit et semble pris de convulsions. Quelques instants après, il se relève, le remercie et s'en va, après des remarques désobligeantes de Slughorn.
Soudain, le tableau recrache Alex et les deux autres prisonniers, c'est Dumbledore qui leur explique que ce tableau n'en fait qu'à sa tête. Il leur dit qu'il est pressé et entre dans le tableau où ils le voient s'en aller.
Scène finale :
Fallen le père de Mary ann est reparu rachitique et prématurément vieilli. Il lui explique qu'il a travaillé pour Grindelwald, le terrible mage noir et que celui-ci lui a lancé une malédiction. Il demande à sa fille de trouver un orbe qui a été caché dans Poudlard, c’est le seul moyen de le sauver. Il ne peut pas entrer dans Poudlard car les sorciers le pensent encore mage noir, mais il s'est repenti. Mary-ann accepte.
Elle réunit ses amis Alex et Penny et ils trouvent l'orbe dans un dortoir. À ce moment-là, une brume étrange envahit les couloirs et des mains d'ombre griffues en émanent et essayent de s'emparer de l'orbe.
Les PJ lancent des sorts, courent et là, ils voient que la brume change de direction et en sortant, prend l'apparence d'êtres humanoïdes à tête de chauve souris.
Les PJ appellent les loups comme ils l'ont appris dans un cours au début de l'année, les loups se battent contre les créatures.
Fallen apparaît àç la lisière de la forêt et demande à sa fille de vite lui donner l'orbe.
Le professeur Liedes surgit en traversant une vitre et leur crie « ne faites pas ça ! ». Mary-ann veut donner l'orbe à son père, mais Alex lui lance un sort pour l'immobiliser. Il prend l'orbe de ses mains et le donne au professeur Liedes mais celui ci a les crocs qui poussent et les yeux injectés de sang, il dit qu'il ne peut pas garder l'orbe, qu'il doit le donner à un autre professeur. Alex court, entre dans le château, trouve un professeur et lui remet l'orbe.
Pendant ce temps, Fallen est capturé par Liedes.
Je fais un épilogue où le professeur Liedes leur explique ce que les joueurs n'avaient pas encore compris et voilà. Fin de la partie.
J'ai prévenu dès le départ les joueurs que ces scènes pouvaient avoir un aspect « cinématique » comme dans un jeu vidéo, ou parfois leur placer des enjeux à résoudre. Le fait de jouer « par scènes » avec des codifications connues à l'avance a aidé à l'intégration de scènes si différentes.
Remarques
Au final, j'ai quand même dû sacrifier quelques trucs :
- la rapidité de mise en œuvre : en effet, écrire un scénar, fut-il de trois pages (Ce scénario en faisait 14 la première fois que je l'ai fait jouer), sous la forme d'une intro cinématographique, de cours récités, de longues descriptions et d'une intrigue complexe, c'est plus long et complexe qu'une situation initiale d'une page (comme je le proposais dans la précédente version de BaP, bien plus « académiquement forgien » si vous me permettez l'expression).
- On n'avait pas énormément de temps pour jouer tout ce que le jeu exigeait : scènes des joueurs + scènes du MJ ; donc je me suis permis de couper court à la plupart des enjeux des scènes de MJ, pour en faire des successions de révélations, « révélées activement », cad, sans que les joueurs cherchent vraiment des solutions, en amenant des évènements assez rapidement les uns à la suite des autres.
Gaël était déçu qu'on n'ait pas placé les enjeux liés aux scènes du MJ, et donc à l'intrigue, plus tôt dans la partie, puisque tel qu'on l'a joué, c'est vraiment à la fin que l'intrigue s'est précisée et que des dangers sont survenus. Je pense que la prochaine fois j'essaierai pour voir si ça ne se parasite pas, de placer ces enjeux plus tôt dans la partie. Il n'empêche que le fait que les mystères (« c'est quoi ces voix dans ma tête ? » « Pourquoi tel prof est louche ? » Etc.) aient précédé les grande révélations, ça leur a permis d'être plus intenses et plus attendues.
L'aspect scénario n'est quand même pas aussi libre que dans un jeu classique : je m'astreins à beaucoup de contraintes et je compte écrire dans le texte du jeu un cadre et des règles précises pour écrire cette partie « scénar », sans forcément une structure préformatée.
Ce qui est remarquable, c'est que Gaël et Lionel avec qui je joue souvent ont découvert une autre facette de ma façon de mener théâtrale, énergique et enjouée et ça leur a plu, pourtant, ils sont rompus aux jeux forgiens, particulièrement Gaël qui est devenu très critique sur les jeux classiques.
Comment cette hybridation improbable a-t-elle fonctionné ?
De toute évidence, grâce aux fortes contraintes induites par la fiction qui tient pour modèle (les livres et films d'Harry Potter) et quelques parties rigides du système :
- tout se passe dans une école fermée (on peut en sortir, mais ce n'est qu'élargir un peu ses frontières), tout le monde peut donc être présent à chaque scène facilement s'il le veut ;
- le temps est prédécoupé : un épisode = une année scolaire. Donc, j'ai adapté ça sur une partie (plus ou moins longue) et ça oblige à ce que l'un des participants marque l'évolution du temps (bon, dans cette partie précisément, c'était pas clair puisqu'on a raccourci le temps de jeu et donc éludé la chronologie) ce qui justifie le fait d'imposer des scènes ;
- le fait que les PJ soient dans une école, ils sont un emploi du temps imposé, ainsi, tout le monde trouve ça normal que j'impose des cours préparés en avance ;
- comme dans la série des Harry Potter, il y a pas mal de « discours » sous forme de monologues de la part des professeurs, notamment pendant les cours, c'était bienvenue que je les prépare à l'avance pour les déclamer par cœur ou avec un peu de reformulation (voir en lisant un peu ou en se reportant au texte pour suivre sa structure) ce qui renforce la théâtralité de ces scènes et leur effet de réel ;
- le découpage du jeu en scènes avec des règles précises : une scène par joueur centrée sur leurs objectifs (ou ce qu'ils veulent en réalité, mais les objectifs sont très importants pour augmenter ses chances de succès à la fin puisque chaque objectif résolu augmente le nombre de dés du joueur) puis, une scène du MJ ciblée sur des cours, des événements indépendants de la volonté des joueurs / une intrigue.
- l'adaptabilité des mécaniques de résolution à toute situation, épreuve ou conflit ;
- la suppression d'une dimension enquête au jeu (bien qu'elle demeure un peu dans la fiction et que le MJ peut amener des enjeux cool de type « que faire de l'orbe que le père de Mary-ann nous a demandé de trouver ? » ou « on est attaqués par des créatures vampiriques »...) ;
- parce que l'ensemble du jeu converge vers un même point : les ados règlent leurs problèmes quotidiens pour pouvoir mieux affronter la puissante menace qui plane sur eux et sur ce qui est important pour eux ;
- le canon d'Harry Potter est assez riche et le fait que tout le monde à la table ait lu les bouquins et vu les films a facilité grandement la cohésion autour de l'Espace Imaginé et Partagé.
Le fait d'avoir quelque chose d'extrêmement resserré en terme de structure nous a permis de varier grandement ce qu'il se passait dans chaque scène.
L'exact opposé est Démiurges : comme on n'a aucune idée des incidences géographiques, temporelles, humaines... des objectifs que vont choisir les joueurs (on peut jouer une campagne à huis clos dans un studio, ou durant un voyage, une épopée sur plusieurs pays), j'ai compris qu'il me fallait réduire le champ d'exploration que proposait le jeu afin d'en garantir la cohérence, la force et l'unité.
C'est Bliss stage de Ben Lehman qui m'a permis de comprendre cela.
C'est comme un vent libérateur qui souffle sur mes projets rôlistes.
Mon objectif de game design est réussi, il me reste à continuer les playtests, à affiner certaines choses et expliquer un maximum les mécaniques à l’œuvre (ce qui n'est pas une mince affaire).
J'aimerais avoir des retours des joueurs si possible et bien sûr pour les autres, n'hésitez pas à intervenir dans le sujet si vous avez des remarques, questions etc.