J'ai fait jouer le premier scénar de la campagne de Démiurges (en cours d'écriture) à Frédéric, mon pote parisien.
Il a créé un perso, zou une mission et là ! Bonnes et mauvaises surprises :
Le temps de découvrir la situation d'une façon un peu plus globale, le jeu s'est orienté vers la résolution d'épreuve. C'était vraiment fun, si ce n'est que je ne suis pas satisfait par mon système de points de difficulté alloués au MJ.
Donovan Dantès (le PJ) est envoyé par l'Agora à Chartres avec la description de 4 dissidents. Il doit les observer, découvrir les raisons de leur présence à Chartres et agir en conséquence selon les règles de l'Agora (à savoir, il vaut mieux mourir que révéler aux destinés l'existence des démiurges).
J'ai écrit le scénario d'une façon assez ouverte et là, je dois dire que ça me conforte dans une idée : le mode d'écriture, du fait qu'il influence la révélation de la fiction me semble primordial pour orienter une partie vers une démarche simulationniste.
Donovan a choisi de prendre une chambre d'hôtel dans le même hôtel que les Grigori. Il a dit qu'il avait croisé l'une des Grigori plutôt jolie au réceptionniste et en a profité pour repérer le numléro de sa chambre. Puis il a voulu utiliser son pouvoir d'électricité pour débloquer le verrou de la porte afin de fouiller sa piaule. Là, n'étant pas familier avec le matériel électronique, il a merdé et a du trouver une autre solution : il a généré une flaque d'eau pour faire croire à une inondation et faire sortir la belle de son antre.
Idée saugrenue, j'ai souri et je me suis contenté d'y répondre. Il est descendu dans l'accueil au niveau du bar et a donc vu descendre la jeune démiurge, mais faute de réceptionniste à 23h, elle est remontée en colère.
Là, il a décidé de l'aborder, jouant le faux séducteur.
Réaction un peu vive de la demoiselle, qui retourne dans sa chambre et déclenche une aura lumineuse en lui faisant un grand sourire (elle observe sa réaction, pour savoir s'il est un Démiurge ou un Destiné). Il feint d'être étonné, puis remonte dans sa chambre, attend un peu, réfléchis, puis redescend écouter à la porte. Là, il entend "mais entrez donc !" et la porte s'ouvre devant lui (la fille manipulant les rayons de lumière ne l'a pas quitté des yeux à distance depuis qu'ils se sont croisés). Deux des 4 dissidents sont là. Il tente de les convaincre qu'il trouvait juste la fille jolie, mais eux, pensent que c'est lui qui a déclenché l'innondation (qui a totalement disparue puisque le deuxième possède le pouvoir de l'eau et a donc a tout dissipé).
Il pensent aussi (à raison) que l'Agora l'a envoyé pour les espionner. Ils parlent donc entre eux de le supprimer. Lui essaye de feindre la naïveté mais la fille se retourne et lui dit "Ta gueule !" dans une onde transformée et d'un impact psychologique augmenté. Fred choisi de s'y soumettre pour ne pas perdre de points de psychisme (équivalant à la Santé mentale).
Puis il lance rapidement son kunaï électrifié dans le plafonnier et crée un court circuit et en profite pour fuir de la pièce. La fille déclenche alors une aura de lumière autour d'elle et lui court après, elle se jette sur lui, mais lui se retourne en lui assénant un coup de kunaï (sorte de poignard de jet japonais qu'il a relié à un câble pour pouvoir l'électrifier). La belle tombe au sol, sous le choc.
Le deuxième Grigori se précipite vers lui et déclenche une traînée de flammes dans sa direction qui déclenche l'alarme à incendie et les extincteurs au plafond. Donovan ne parvient pas à l'esquiver et subit une brûlure au bras. Il lui lance de nouveau son kunaï, mais l'autre se protège avec un mur de flammes affaibli par les jets d'eau.
Là, les lumières des chambres voisines s'allument, le Grigori court s'enfermer dans la chambre, mais Donovan lui plante son Kunaï dans le dos et le laisse en mauvais état, alors, les portes des chambres voisines s'ouvrent et les gens se mettent à hurler et à composer le n° de la police sur leurs portables. Donovan s'enfuit, laissant une image assez improbable dans la tête des témoins oculaires.
Ensuite, il s'est passé beaucoup de choses, Donovan s'est allié à Ménélas, un des Grigori qui lui ne supporte pas ses camarades. Et ils se sont mis à faire équipe ensemble. Un grand moment que leur discussion entre négociation amusée et vannes non dissimulées.
Grâce aux traits et à la boussole démiurgique, qui permet d'évaluer la tendance politique des PJ, Fred s'est rapidement dit : l'Agora, c'est pas fait pour moi, je vais rejoindre les Grigori. Puis, les Grigori, après ce que j'ai mis à leurs potes vont me faire chier, il vaut mieux que je monte mon propre ordre.
J'étais aux anges. Un véritable projet est né. Il ne pourra aboutir qu'à long terme, mais le tandem est un bon début.
Cela s'est enchaîné avec la découverte de l'univers mental d'un enfant autiste habité par un cauchemard, et la découverte d'une pièce secrète sous la cathédrale de Chartres... bref, découverte, découverte !
Concernant la résolution d'épreuves, cela se déroule comme suit : le MJ estime un niveau de difficulté et l'annonce aux PJ.
Le MJ annonce la compétence et la caractéristique à utiliser pour y parvenir. Le joueur peut narrer son action pour essayer de gagner des bonus de la part du MJ, ou utiliser ses points de trait. Il n'en a pas beaucoup, mais chaque trait utilisé accorde un bonus. Enfin, s'il n'atteint toujours pas le seuil de difficulté, il peut encore changer de mode opératoire et utiliser un pouvoir pour ajouter un nouveau bonus, celui de sa compétence démiurgique. Dernière solution : lancer un dé, sachant que c'est à double tranchant.
Ainsi, certaines actions sont réussies automatiquement, d'autres nécessitent une prise de risque et dans l'ensemble, l'imagination du joueur est mise à contribution.
Du côté MJ, j'ai essayé de gérer les niveaux de difficulté avec un capital de points, mais je ne suis pas convaincu, car il est arrivé que des épreuves qui auraient du s'avérer difficiles étaient d'un niveau de difficulté moyen... Je n'aime pas décider arbitrairement d'un niveau de difficulté, donc il faudra que je réfléchisse activement à une amélioration de ce système. La question est : est-ce que je pars de données fictionnelles pour déterminer un niveau de difficulté crédible ? Ce qui me semble une usine à gaz (un mur de 3m = difficulté 25... mais s'il pleut, s'y agripper doit être plus difficile... et s'il est fait de moellons, je peux m'appyuer dessus pour faire un saut en deux coups...).
Actuellement, j'ai un niveau de difficulté moyen à 20. Si je veux qu'une épreuve soit simple, je peux le baisser, je gagne alors de jetons que je pourrai utiliser plus tard pour augmenter la difficulté d'une autre épreuve. Si une épreuve est simplifiée ou rendue plus difficile, je dois le justifier dans la fiction (par exemple : la serrure semble un peu rouillée) chaque jeton confère +5 points à la difficulté. L'idée de base me plait, mais ce qui m'a manqué, c'est de définir quand est-ce que ça valait de monter ou descendre une difficulté...
***
Je me pose la question : si l'on considère que la résolution d'épreuves tend vers le ludisme si c'est prédominant, comment puis-je étouffer ce ludisme pour que l'exploration et donc le simulationnisme soit centrale ?
D'une certaine façon, l'exploration peut passer par la résolution d'épreuves : j'explore mon personnage, je découvre de nouvelles parts de l'univers, je pense que mis à part le tout début de la partie, la démarche créative était assez claire.
J'ai donc l'impression qu'à partir du moment où le joueur a une prise sur sa façon d'explorer, que les épreuves sont choisies par le joueur et que les surmonter est prétexte à de l'exploration, on tend vers le simulationnisme : "Ok, le gars détient une relique, alors on va négocier, on le tabasse, ou on la vole discrètement ?" Faire un choix de ce genre définit fortement votre personnage.
Si les épreuves ne valent que dans une causalité linéaire sans choix réel concernant l'exploration de la fiction : "pour atteindre Athena, il faudra franchir les douzes maisons des signes du zodiaque, gardées par les douze chevaliers d'or". Là, peut être qu'on s'oriente plus facilement vers du ludisme...
Voilà, je me pose toujours la question de : comment rendre Démiurges simulationniste. Je pense que développer les sociétés secrètes démiurgiques en laissant les PJ naviguer dedans et changer de camp est un très bon point. L'exploration de l'univers est central. Enfin, la méthode d'écriture scénaristique me semble aussi être un très bon stimulant simulationniste : des lieux, des objets, des gens, leurs objectifs et les PJ au milieu. En prenant bien soin de laisser les choses se modifier en fonction des actes des PJ, mais sans le prévoir à l'avance.
Simplement, si le boss des Grigori veut s'emparer d'une arme pour détruire l'Agora, les PJ pourront l'aider ou l'en empêcher. S'ils y parviennent, l'Agora sera détruite ou non selon leurs réussites, leurs échecs et leurs choix.
Ainsi, les joueurs ont une prise sur la fiction et son devenir, ce qui me semble indispensable.
Qu'en pensez-vous ? Ne vais-je pas trop loin dans mon interprétation des termes GNS ?