Hello,
Lors de la convention "Sous l’œil de Mélusine", j'ai eu le loisir de jouer une partie de Psychodrame avec 3 joueurs (dont une joueuse).
Voici un arc de la partie jouée :
Chez Reine, décoratrice d'intérieur sont invités Raphaël son petit ami, Élisa sa sœur et Pierre, un ami de Raphaël.
Élisa arrive en retard et tient tout le monde à distance par manque d'authenticité, mais finit par dévoiler à sa sœur discrètement que le gars avec lequel elle avait une relation l'a plantée.
Plus tard, une dispute éclate car Raphaël veut sortir pour régler un truc perso alors qu'il leur a plusieurs fois posé des lapins et donne l'image de quelqu'un en qui on ne peut pas avoir confiance.
La dispute est partie assez vite et a fini en rupture de couple entre Reine et Raphaël.
La scène était censée tourner autour du problème d'Élisa (les règles actuelles proposent que le metteur en scène cadre la scène sur le pb d'un autre personnage), mais à fini par la scène de ménage des deux autres. J'hésite à insister sur le fait qu'un cadrage doit placer directement une situation problématique (qui ne doit pas forcément dégénérer en Conflit) plutôt qu'une situation stable qui produit artificiellement des conflits.
Plus tard, Reine et Élise se retrouvent et parlent de leur problèmes respectifs, mais faute d'écoute, ça tourne aux reproches respectifs, le problème s'envenime à cause d'un paquet visiblement adressé à Élisa et de la part de Raphaël, contenant une bague. Reine finit par couper les ponts avec sa sœur (le problème de Reine était qu'elle craignait de perdre ses proches).
La dispute était intéressante et crédible, mais le paquet avec la bague me paraissait un peu dissonant, on s'embarquait du coup sur une question de quiproquo, vilaine manigance de la part du joueur qui n’était ni aberrante ni suffisamment mauvaise pour que je demande au joueur de changer ou d'annuler sa proposition, mais qui n'élevait pas vraiment le débat (je ne prends qu'un exemple parmi tant d'autres, mais un problème récurrent dans ce type de parties).
Ah, et désolé au joueur en question s'il se reconnait, je n'ai vraiment pas détesté, mais il s'agit juste d'une divergence d'appréciation de ce que le jeu devrait permettre de faire, il s'agit de trucs minimes, mais que j'aimerais arriver à rectifier (est-ce que bannir les quiproquos suffirait ?).
Deux ans plus tard elles se croisent fortuitement dans un magasin, Élisa est désormais en couple avec Raphaël. Élisa va voir Reine et lui demande comment elle va depuis tout ce temps. Reine lui répond à peine. Élisa lui dit que sa sœur lui manque et qu'elle serait prête à rompre avec Raphaël si ça pouvait leur permettre de renouer. Reine lui demande si elle aime Raphaël, Élisa lui répond que oui. Reine détourne le regard...
Tel quel, c'est plutôt pas mal, mais je sentais moins de tension et d'intimité entre les joueurs que la partie avec Gaël et Fabien. L'un des joueurs m'a même dit pendant une pause que ça tournait pas mal au pathos.
Dans un bouquin de dramaturgie, je me rappelle que l'auteur distinguait le mélodrame du drame dans ce que le drame était un habile mélange de problèmes internes et externes au protagoniste (interne = lié à lui, à sa psyché, à ses actes ; externe = lié à d'autres personnages, des évènements indépendants de sa volonté). Le mélodrame se contentant de problèmes externes. Il faut peut-être que je vérifie comment amener ce mélange pendant les parties.
J'ai parlé à Fabien du côté Pathos qui m'a dit que c'était pas du tout l'impression qu'il avait eue dans la partie que nous avions jouée.
Du coup je m'interroge : est-ce que le jeu défend suffisamment bien son sujet ?
Si je veux défendre un tel sujet, ne devrais-je pas éviter que deux joueurs ne s'entendent pas à table (ou s'ennuient) parce que l'un joue du Six feet under ou du Lars von trier pendant que l'autre joue du Plus belle la vie ou Les feux de l'amour ? (Autant dire bien entendu que les derniers exemples ne m'intéressent pas à développer dans ce jeu).
Bon, je ne dirais pas que le fossé était tel, mais bon, j'ai ressenti une vraie différence avec l'autre partie. Ne devrais-je pas mettre une incitation à explorer des thèmes forts et riches et de pousser les joueurs à sortir de leur zone de confort ?
Prosopopée ne souffre pas de ce genre de problèmes : la plupart des parties que je joue sont riches et ne dérapent que très rarement. L'implication des joueurs crée une rupture avec le monde autour d'eux, il y a une sorte de communion. Peut-être est-ce parce que les rôlistes sont plus le public de Prosopopée ?
J'imagine demander aux joueurs de juger les prestations des autres y compris hors conflit. (Par exemple : estimer quand un personnage se confronte à son problème pour le faire avancer vers sa résolution, mais puis-je aller plus loin ?)
Je pense que je ne jouerai plus ce jeu en convention, contexte peu propice à l'intimisme.
Ensuite, je me pose des questions au sujet du Contrat social, de la manière dont je peux l'aborder dans le texte du jeu :
- Je pense dire que ce jeu se joue entre personnes intimes, qui n'ont pas peur de se dévoiler.
- Je pense aussi offrir la possibilité d'arrêter la partie aux joueurs qui le voudraient pour des raisons de limites personnelles.
- J'ai déjà mis dans le texte que les problèmes choisis devaient toucher les joueurs ou avoir un sens particulier pour eux (ce qu'on n'a pas fait pour la partie de la convention suite aux protestations des joueurs)
(J'ai essayé le système de Conflit intérieur, d'un personnage avec lui-même, ça fonctionnait du tonnerre, technique approuvée).
Il y a longtemps, j'avais mis dans le livre des règles : choisissez le ton de votre partie avant de commencer : comédie ou drame. En fait ça n'avait aucun effet sur le ton de la partie : on annonçait drame et on jouait comédie, c'est là que j'ai compris l'importance de la relation entre les joueurs pour pouvoir aborder le jeu pour ce qu'il offre.
J'aimerais discuter des points abordés dans ce sujet, par des personnes qui aborderont cela sereinement et sans hostilité ni a priori.