Avec Sylvie nous avons fait une courte partie de Psychodrame/Les Cordes Sensibles, version refonte 5.5. Ça faisait trois ans que je n'avais plus joué à ce jeu ! J'étais tout motivé à m'y remettre, les développements me semblant très réjouissants (et je vais casser le suspens tout de suite, la dernière version est vraiment très très bonne).
Préparation
Nous jouions un couple, elle l'homme (Grégoire Sonnay, 30 ans, Post-Doc en génétique) et moi la femme (Élisabeth Sonnay-Jolliat, 28 ans, enseignante de bio & chimie au lycée). Un couple qui répond bien aux stéréotypes (femme un peu plus jeune, même classe sociale, des études un peu moins avancées). Nous avons décidé de jouer avec des Problèmes à 3 points de résolution.
- Grégoire était sous l'emprise de sa directrice de laboratoire, qui lui dit que pour réussir il faut faire tout ce qu'elle lui dit.
- Élisabeth avait peur que le couple éclate.
- Grégoire : mon absence crée une distance entre Élisabeth et moi.
- Élisabeth : Je travaille à 60 % pour que Grégoire puisse se concentrer à fond sur son post-doc.
Partie
Nous avons joué quatre ou cinq scènes en plus de la première exposition pour chaque personnage. Grégoire essayait de gérer sa cheffe du mieux qu'il le pouvait tout en essayant de ménager du temps pour Élisabeth. J'ai introduit son collègue Jeff qui avait de la peine pour Grégoire qui se faisait plus que les autres descendre en réunion de groupes et qui était prêt à l'écouter. Élisabeth quant à elle était plutôt triste et un peu résignée. On la voit rentrer seule, manger seule, se coucher seule. Elle obtient quand même de Grég qu'il n'annule pas le souper qu'ils avaient prévu chez Francine (listée comme Trait : Francine doute que Grégoire soit quelqu'un de bien pour Élisabeth.) Mais comme il devait absolument ne pas laisser crever un rat de laboratoire, il le prend avec dans sa petite cage. Je pensais que ça allait donner une partie un peu burlesque, alors on a coupé la scène là, et le souper n'a été relaté qu'après coup quand Élisabeth parle à sa mère au téléphone (le rat malade étant juste un prétexte pour parler de l'obsession de Grégoire avec son boulot). Je cadre ensuite une scène où Grégoire surprend Jeff en train de sortir des toilettes des femmes, un soir alors qu'il était resté tard au boulot. Son pote se sauve après avoir bredouillé une excuse à deux balles, et Grégoire reste planté là pour voir qui sortirait... et c'est bien sûr sa cheffe ! S'enclenche alors un processus de remise en cause de l'autorité de sa supérieure, et Grégoire commencera à se défendre et à contre-manipuler sa supérieure. En parallèle à ça, Élisabeth obtient plus de temps avec Grégoire (qui ne se gêne plus de rentrer à des heures raisonnables) et on assiste même à une scène romantique.
On approche donc rapidement la résolution des deux problèmes.
Vous avez bien lu, il n'y a encore eu aucun conflit. Élisabeth et Grégoire étaient trop malins pour s'engueuler et ont préféré la voie du dialogue, le destin donnant un petit coup de pouce sous la forme de l'épisode aux WC.
Je propose tout de même un Conflit entre Grégoire et sa cheffe. Sylvie ne voulait pas trop risquer une pantalonnade qui ferait durer la partie plus longtemps, mais je lui ai rappelé que je n'aurais que peu de cartes à jouer contre elle. La pauvre professeure tente à une séance commune d'humilier Grégoire devant tout le monde, mais celui-ci, calmement, lui rappelle les conditions de son contrat, l'indépendance à laquelle il a droit pour mener ses recherches, etc. preuves à l'appui et avec le soutien du chef du personnel en prime. Bref, il lui cloue le bec comme il se doit, et on finit par une scène d'exposition qui est également une scène d'expression de sentiment (fierté). Grégoire ayant tout de même écopé de 4 points de répercussion, il diminue à un point une de ses deux Croyances : « Je ne mérite pas ma vie [professionnelle] actuelle. » (Il pensait avoir été engagé malgré un défaut de compétences, mais au fil des scènes il a bien réalisé qu'il était tout à fait apte à conduire ses recherches.)
La résolution du problème d'Élisabeth était désormais assurée.
Réflexions
Nous avons bien aimé la structuration qu'apportent les règles à la partie, même sans exploiter à fond les Conflits.
J'ai choisi un Problème inadapté pour Élisabeth : vu le contexte, c'était essentiellement Grégoire qui pouvait le résoudre, en consacrant plus de temps au couple. J'aurais dû le tourner d'une manière qui fasse que Élisabeth avait quelque chose à se reprocher (visées sur un autre mec, ou que sais-je). Élisabeth a donc de facto été un personnage secondaire. En plus, Sylvie avait le cul entre deux chaises quand elle devait cadrer des scènes pour mon personnage : pour illustrer le problème, elle devait mettre Grégoire en faute, alors que dans les autres scènes, il faisait son mieux pour sauver le couple. Ce n'était pas impossible, mais un troisième joueur n'aurait pas eu ce conflit d'intérêt (mais en même temps, aurait-il eu le droit de cadrer des scènes avec un autre personnage joueur ?) J'ai l'impression que j'aurais mieux fait d'impliquer un personnage non-joueur dans mon Problème.
Pour les Conflits, je crois avoir compris que le Protagoniste peut appeler plusieurs Traits à la rescousse, mais tour à tour. Sauf que l'adversité se joue avec un nombre de cartes fixe calculé indépendamment de ce qui se trame dans la fiction, je ne vois donc pas vraiment de quoi un tour de l'adversité pourrait être constitué. D'ailleurs, ce nombre de cartes fixe doit-il aussi être utilisé si l'adversaire du Protagoniste est un PJ, ou est-ce seulement pour les personnages secondaires ?
La Jauge de Sentiments augmente inexorablement ! On ne peut gagner qu'un seul nouveau sentiment à exprimer quand on reçoit des retombées, mais la jauge augmente au moins de un en parallèle. Pour cette partie courte, ça n'a néanmoins pas poussé à un acte irréversible. Les conflits sont la seule manière d'amener à des expressions de Sentiments. D'un côté ce n'est pas grave, parce que si on évite les conflits, on se moque d'avoir des cartes. D'un autre côté, ça fait que les gens qui fuient les conflits ont moins de chances de commettre un acte irréversible, ce qui me semble étonnant. À force de ravaler sa fierté, on peut aussi péter un câble, non ? Peut-être pourrait-on donner un point de Répercussion quand quelqu'un évite un conflit alors que les joueurs sont d'avis qu'il devrait se défendre ? Du coup, ça donnerait un peu plus de mordant mécanique à certaines scènes sans Conflit.
Pourquoi est-ce que le Problème est un Trait, quand en fait c'en est pas un ?
Est-ce qu'un Trait peut concerner un autre personnage ? En plus de celui contenant Francine, déjà évoqué plus haut, j'avais ajouté pour Élisabeth « Ma mère, avec laquelle je parle beaucoup au téléphone », ou Sylvie pour Grégoire « Narovitch [la cheffe] m'a "donné ma chance" ». Est-ce que c'est en ordre ? Ou faut-il les formuler autrement ?
La fiche de personnage est très belle ! Je trouve juste un peu dommage que les cercles « Résolution » et « Cartes » soient dans leur coin, alors que si j'ai bien compris, « Résolution » va plutôt avec le Problème et « Cartes » avec la jauge de Sentiments.
Voilà Fréd', le jeu nous plaît beaucoup ! J'espère que t'auras des questions !