Je viens de faire un playtest de Psychodrame (je suis en train de réfléchir à un nouveau nom pour le jeu) avec Magali, avec pas mal de modifications de règles du jeu.
Pour commencer on a créé deux PJ :
Magali
En premier lieu, le joueur écrit une présentation de son personnage en 40 mots environ (technique empruntée à The Pool) :
Rebecca est étudiante en arts plastiques. Elle est à la fois très secrète, bornée et bordélique, et a un univers fantasmatique très développé.
Elle vit seule dans un appartement en pleine campagne qui regorge de ses œuvres insolites.
Lieu principal de la partie : Poitiers (par commodité on a choisi notre ville de résidence).
Nom : Rebecca Poulain
Âge : 22 ans
Métier : étudiante en arts plastiques et job étudiant : travaille dans une bibliothèque.
Personnalité : schizoïde (je me demande si ces personnalités sont encore valables avec la nouvelle méthode de création des PJ).
Problème : les gens ont peur d'elle, elle a du mal à se faire accepter.
Croyance (sur soi, les autres ou le monde) : Je suis trop différente pour être aimée.
3 colère/amour 2
4 peur/confiance 1
2 tristesse/joie 3
TRAITS (6 points au départ, reste 4)
- Sœur de Johan (5) (les relations avec les PJ ne coûtent rien)
- A peur de la "bête" qui sommeille en elle (5) (Trait en lien avec son problème)
- Passe beaucoup d'énergie à mieux se connaître et se comprendre (5)
Moi
Description : Johan est ingénieur de formation, il rêve d'être musicien, mais il a choisi cette autre voie ne pensant pas pouvoir vivre de la musique.
Lieu principal de la partie : Poitiers
Nom : Johan Poulain
Âge : 27 ans
Métier : ingénieur au chômage
Personnalité : narcissique
Problème : au chômage depuis 2 ans, Johan est découragé, il ne sait plus quoi faire de sa vie.
Croyance : je n'ai pas le talent pour me lancer dans une vie de risques.
2 colère/amour 3
4 peur/confiance 1
3 tristesse/joie 2
TRAITS (6 points au départ, reste 4)
- Rebecca ma sœur (5)
- Se donne des airs (3)
- a peu confiance en lui (7)
Premier constat : en permettant aux joueurs de développer de nouveaux traits de personnages pendant la partie, il leur suffit de créer deux traits + des relations avec les autres PJ, ce qui rend la création de PJ beaucoup plus rapide. De plus, le fait de créer des problèmes et des croyances personnelles rend les personnages profonds dès le départ (encore faut-il que j'arrive à expliquer la manière dont Magali et moi concevons chaque étape de la création du personnage).
Enfin, créer un problème personnel pour chaque personnage plutôt que d'en créer un commun, ça aide à les approfondir.
La fiction
Première scène : Metteur en scène : Frédéric.
Où se déroule la scène ?
Dans l'appartement de Rebecca, à l'étage de la maison d'un vieil homme.
Qui est là ?
Rebecca et Johan
Que se passe-t-il ?
La petite fille du propriétaire joue du piano
En entrant, Johan est comme absent, il fixe la pianiste et suit sa sœur sans décoller les yeux de ses mains.
Rebecca : viens, suis-moi, je vais te montrer ce dont je t'ai parlé. Ils entrent dans sa chambre. Rebecca : Regarde... alors, qu'est-ce que tu en penses ?
Johan : euh... c'est quoi ?
Rebecca : à toi de me le dire !
Johan : ben, chai pas, c'est abstrait, c'est... de la peinture sur une toile, tu as dû faire ça en 10 minutes, non ?
Rebecca : mouais... oookkk
Johan prend une bande dessinée dans une étagère et commence à la feuilleter machinalement.
Scène 2 : Metteur en scène : Magali
Où : à la fac, pendant un atelier
Qui : Rebecca et sa classe
Que se passe-t-il ? Chaque élève présente son travail de sculpture devant leur prof.
Après plusieurs élèves, le prof passe à Rebecca. (Je lui demande de me décrire sa sculpture) La sculpture de Rebecca est une imposante sculpture abstraite en ferraille représentant plusieurs états de la ferraille dans l'architecture avec le temps. Rebecca s'abrite quasiment derrière son œuvre.
Je joue le prof : OK, c'est au tour de Rebecca, comme je le disais, j'aimerais que chacun donne son avis et pose ses questions sur le travail de chacun, qui commence ?
Un élève, en baggies, l'air nonchalant (Rebecca sait que c'est un gros fumeur de haschich) : moi j'y vois un effondrement de l'orgueil architectural de l'Europe des lumières, dont le symbole est la tour Eiffel.
Rebecca se sent humiliée... Magali prend le paquet de cartes pour tenter une résolution de conflit : le but de Rebecca est de l'humilier lui pour se protéger.
Elle rétorque un "Mais non, tu n'as rien compris" assassin, d'un air dédaigneux et a l'impression de passer pour une extra-terrestre devant toute sa promo.
Elle utilise le trait "a peur de la bête qui sommeille en elle" à 5 et pioche donc 5 cartes.
Pour le PNJ, j'en pioche autant (5 étant une difficulté moyenne pour un PNJ). Magali gagne, elle décrit donc ce qui se produit en conséquence (elle peut contrôler les autres personnages que le sien) : il baisse le regard, tout le monde se fout de sa gueule...
On, a arrêté là le playtest.
Remarques :
Magali m'a fait la remarque suivante : c'est chouette que chaque PJ ait son propre problème, ça ressemble plus à la vraie vie ou à Six feet under. Je trouve ça plus riche et j'ai l'impression que les conflits sont moins propulsés dans l'histoire de manière artificielle. Ce playtest est une vraie réussite dans le sens que je voulais. Je pense avoir du mal à vous transmettre la qualité émotionnelle de nos deux scènes, mais ça nous a enthousiasmés ! (Après, il faut dire que Magali et moi on se régale à chaque fois qu'on joue tous les deux à ce jeu, mais on a senti un vrai mieux).
Je pense aussi que de cette manière, le jeu offre de meilleures possibilités, plus vastes et plus riches.
Concernant les conflits, ils se résolvent en une fois, avec possibilité de relance.
- Chaque participant pioche 3 cartes de base, plus d'autres cartes en fonction du (ou des, je ne sais pas encore) trait(s) impliqué(s) dans le conflit ;
- Le joueur qui veut clore une scène en "forçant une victoire" pioche des cartes pour signifier un conflit. Le ou les adversaires peuvent décliner le conflit en laissant l''autre joueur atteindre son but ;
- Celui qui tire la plus haute carte gagne le conflit et gagne le droit de narration de victoire ;
- Les combinaisons de cartes (paire, brelan, carré) d'un joueur constituent les retombées de son ou ses adversaires : des points qui vont modifier la fiche de perso (soit augmenter les émotions, soit créer ou modifier un trait) ;
- Chaque joueur choisit avant sa croyance (nouvelle règle) son type de jeu psychologique gagnant. Un "jeu psychologique" est une sorte de "jeu dans le jeu" défini par Eric Berne, le fondateur de l'Analyse Transactionnelle auquel se livrent de façon inconsciente les gens au quotidien. Ce n'est pas un conflit banal, c'est une sorte de scène qu'on rejoue fréquemment mais avec des variantes. Le but pour chacun est de confirmer ses croyances en créant une situation propice à cela.
Par exemple, il existe le jeu : "donne-moi des coups de pieds". celui qui joue à ce jeu (en fait on joue à plusieurs jeux, mais on a des préférences) va adopter de manière assez récurrente un rôle de persécuteur de façon à ce que son camarade de jeu finisse par se rebeller et par devenir persécuteur, le rendant soudainement victime. Ayant suscité chez l'autre la réaction voulue, il confirme sa croyance que par exemple pour une femme : les hommes sont tous des salauds.
Dans Psychodrame, le joueur doit commencer persécuteur et finir victime. S'il parvient à faire cela, il gagne le droit de narrer l'issue du conflit, même s'il a perdu (en respectant la victoire et l'échec) et de distribuer lui-même ses points de retombée, autrement, c'est toujours un autre joueur qui le fait. (N'hésitez pas à poser des questions si mes explications sont trop inintelligibles). - Un joueur ayant perdu, peut faire une "relance" : il peut faire une nouvelle narration, amenant ses adversaires à faire de même et piocher de nouveau des cartes pour renverser la vapeur. Toutes les retombées se cumulent, mais s'il ne gagne pas ce coup-ci, il ne peut pas relancer. La relance permet toutefois de tenter de rattraper le coup en utilisant son jeu psychologique. SI plusieurs joueurs ont utilisé leur jeu psychologique, chacun raconte sa version des faits.
- Enfin, à chaque conflit, chaque joueur ne participant pas au conflit peut piocher 3 cartes et les donner au joueur de son choix pour le soutenir arbitrairement ou pour récompenser sa prestation.
Voilà, vous avez presque tout le système du jeu. Il s'est simplifié, mais emprunte une voie nouvelle qui devrait l'enrichir. Il reste à l'éprouver et à l'affiner. Le jeu devrait permettre de jouer plus facilement dans toutes sortes d'univers, tant qu'on garde à l'esprit que c'est le chemin psychologique de chaque personnage qui importe avant tout.