[Monostatos] Le temple enfoui

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[Monostatos] Le temple enfoui

Message par Fabien | L'Alcyon » 30 Août 2010, 14:04

Voici le compte-rendu de ma douzième partie de Monostatos, jouée le 22 août en famille dans la cour de la maison de vacances mes grands-parents dans le Doubs. J’ai fait jouer une des intrigues (=scénario) de l’histoire (=campagne) Les cendres Zakkat la Magnifique.

Pour vous donner une idée du contexte, cette histoire se passe à Zakkat l’Industrieuse, une des grandes villes du Royaume Fauve, dirigée par des mages-forgerons ayant créé des sceaux qui fondent leur pouvoir. En effet, appliqué sur un objet, ce sceau le rend « magiquement » plus désirable et plus précieux, et le propriétaire de l’objet avec. La ville est divisée en trois grands quartiers : le Pyroxène où vivent les Cyclopes, les maîtres de la ville, qui conçoivent les sceaux et organisent leur exploitation ; les Tephras où vit la population miséreuse et subjuguée qui produit les objets marqués d’un sceau ; le Lahar où les marchandises sont achetées avec un enthousiasme religieux. Je précise (c’est important pour comprendre le rapport) que la vieille ville a été presque entièrement ensevelie sous la lave il y a longtemps. Une petite lecture critique pour expliciter le symbole : No Logo de Naomi Klein. J’envoie l’histoire complète (20 pages word) à qui en fait la demande à dworkin.barimen(AT)hotmail.fr (remplacez (AT) par @). C’est cette histoire que j’utiliserai pour mes tests de l’automne, je me dois donc de préciser :

Attention SPOILER pour ceux et celles qui souhaiteraient tester Monostatos cet automne ! Néanmoins vous pouvez lire l’analyse du CR, il n'y a pas de spoiler dedans.

Les seuls changements récents au système de jeu sont l’utilisation de 2d10 plutôt que 1d20 (merci Bichette !) et le fait que les Carcans s’appellent à présent des Idoles, terme plus dans l’esprit du « Crépuscule des idoles »…

Les joueurs (en fait joueuses) étaient :
Guy (mon père) interprétant le Morholt, croquemitaine passionné
Bérengère (ma sœur) interprétant Amerolqis, artiste fabuleux et orgueilleux
Dominique (ma mère) interprétant Aletheia, médecin révoltée
Alice (ma compagne) interprétant Ninmah, danseuse et musicienne dompteuse du désert

Je commence par l’exposition du monde, du rôle des personnages, la distribution des personnages pré-créés et l’explication des règles. 40 minutes. Guy finit par quitter la table pour faire la sieste.

Je commence par décrire l’arrivée des personnages dans le Lahar et je demande aux joueuses ce que font leurs personnages. Moments de flottement. Alice part avec une idée :
Les personnages achètent un pot en terre portant un sceau, puis s’éloignent pour gratter le sceau. L’objet redevient laid et quelconque. Les joueuses abandonnent l’idée. J’avoue que je n’ai vraiment pas su quoi inventer. J’aurais peut-être dû leur demander ce qu’elles espéraient.

Nouveau moment de flottement. Je décris les Tephras (pauvres hameaux disséminés dans un immense champ de lave refroidi et stérile, parcouru de rivières de lave). Dominique décide que les personnages ont faim, soif et sommeil. Amerolqis façonne donc une cavité où dormir dans la lave. J’en profite pour embrayer sur une des intrigues prévues. Au fond de la cavité, Amerolqis découvre le sommet d’une tour magnifique, prise dans la lave.

Arrivent cinq prêtres de la Secte du Fer (l’armée de Monostatos) qui viennent voir ce que font les personnages. Il s’agit d’une Idole 2 / Ardue. Ninmah entame un air de musique pour les apaiser. Echec : Ninmah prend un niveau d’Epuisement. Aletheia « remarque » qu’un soldat est blessé et propose de le soigner. Réussite : Dominique fait baisser l’Idole d’un point et raconte comment Aletheia administre un médicament-drogue au jeune prêtre et instaure ainsi une atmosphère plus détendue. Sur une suggestion de Bérengère, Alice raconte (jet de dé réussi cette fois-ci, l’Idole disparaît) comment Ninmah entame un nouvel air de flûte et commence à faire danser les prêtres et les dirige, joyeux et dansant, vers une rivière de lave où ils disparaissent. Je demande si le prêtre soigné par Aletheia y part aussi, elles précisent que ce n’est pas le cas, il est trop ivre pour y parvenir ; il ne sera pas réutilisé par la suite, mais c’est un personnage intéressant quand même. Pour l’action subversive et élégante, je distribue à Alice et Bérengère une marque chacune.

Les personnages dorment. Au matin, ils trouvent des offrandes à l’entrée de la cavité. Un peu plus loin des habitants des Tephras les observent, avec un mélange de respect et de crainte. Après une courte discussion, les personnages sont conduits dans un hameau où ils rencontrent un homme appelé Joas qui leur explique comment Zakkat la Magnifique fut enfouie sous la lave, et parvint à rester intact grâce à la puissance des Artisans (les mages-forgerons) qui l’avaient élevée. D’habitude les habitants des Tephras vivent en travaillant dans les ateliers du Pyroxène et en creusant dans le sol en espérant tomber sur un ancien bâtiment de Zakkat : la revente des morceaux de l’un d’entre eux peut nourrir une génération entière. Récemment, un hameau a déterré la tour d’un temple au dieu Souffle (dieu des arts, de la technique et de la domination de l’homme sur le désert) ; rapidement, la Secte du Fer a fait évacuer la zone et a recouvert le site de lave. Ca paraît long à lire comme ça, mais c’est très rapide en jeu, moins d’une minute.

Jonas était celui qui a découvert le site et compte bien le découvrir à nouveau pour restaurer le culte du dieu Souffle. Il a besoin de l’aide des personnages pour ramener une statue du dieu Souffle à la surface, il a besoin qu’ils protègent le chantier et détournent l’attention des prêtres de la Secte du Fer et de la Poussière. Avec cette statue, il veut détourner les Tephras de Monostatos pour les rallier au dieu Souffle. Les personnages acceptent.

Ninmah se met alors à jouer de la flûte. Elle attire les animaux des environs pour envahir Zakkat et occuper les prêtres de la Secte du Fer. Pas de jet de dés, je demande juste à Alice de beaucoup développer. Amerolqis aide à excaver la tour en utilisant ses techniques d’Artisan. Là non plus, je ne demande pas de jet de dés, je demande seulement à Bérengère de décrire en lui fournissant quelques impulsions : les fidèles du dieu Souffle et Amerolqis descendent le long de la tour dorée, aux formes géométriques pures et nettes, jusqu’à arriver à une fenêtre qu’ils parviennent à ouvrir. L’intérieur est complètement brûlé, l’air est plein de cendres, ils retrouvent des cadavres de prêtres calcinés. Au fond, une immense pièce ovale, dont les portes sont fermées par endroit. Au font de la pièce une statue gigantesque d’un homme debout, portant un masque en triangle vers le bas et au corps ruisselant d’or. Les fidèles du dieu Souffle se prosternent devant elle.

J’inclus Aletheia à l’histoire, Dominique trouvait (un peu à juste titre) que son personnage manquait de capacités agressives. Je précise que toute Idole peut être éliminée par n’importe quel moyen, pourvu que ce soit crédible ; ça marche, comme on va le voir. D’autres prêtres de la Secte du Fer s’approchent du « chantier », accompagnés cette fois en plus d’un homme entièrement couvert de voiles, de tissus, y compris le visage enveloppé dans un turban, les mains cachées dans des manches longues, les traces de pas balayés par sa tunique (un prêtre de la Secte de la Poussière non dissimulé sous une fausse identité). A nouveau Idole 2 / Ardue, j’aurais peut-être dû faire 2 /Extraordinaire, mais ça me semblait un peu excessif. Aletheia affirme qu’elle est prêtresse de la Secte de l’Ether (presque vrai) et le convainc qu’elle peut le soigner. Dominique réussit son jet de dés, diminue la valeur de l’Idole de 1 et raconte la suite : elle parvient à pousser le prêtre de la Secte de la Poussière à découvrir ses mains : il se cache parce qu’il a la lèpre, ses mains ne sont que des moignons. Elle décide de le soigner. Jet à nouveau réussit, l’Idole disparaît : Le prêtre se laisse soigner et s’en va, plein de gratitude, et Aletheia en a profité pour lui inoculer un poison qui le tuera le lendemain. Alice me confie après qu’elle aurait aimé que les prêtres restent pour protéger les personnages, mais qu’elle n’a pas osé le suggérer, en partie parce qu’elle ne pensait pas avoir le droit de le faire. Ici on fait une pause.

Reprise : Joas remercie les personnages et leur demande de continuer à les aider en faisant du prosélytisme dans les Tephras pour les rallier au culte du dieu Souffle. Les joueurs cherchent en quoi leurs personnages croient (Amerolqis : rien sauf en son propre génie ; Aletheia : rapport très conflictuel avec Monostatos ; Ninmah : dédain considérable envers tous les dieux) et concluent que leurs personnages n’ont aucune envie de les aider. Entre parenthèses, j’aime bien cette manière de choisir, très en cohérence avec l’univers, même si elle me pose problème pour la suite de la partie.

Alors que les personnages discutent de la question un soir, ils voient des formes sombres se déplacer à la lisière du hameau. Ils s’en approchent et distinguent trois masses bouffies couvertes de papillons nocturnes. Lorsque les papillons s’en écartent des rayons d’une puissante lumière s’en échappe. Les formes expriment que le Maître est très satisfait de la tournure des évènements et qu’il veut en remercier les personnages (Pour l’histoire, le dieu Souffle estropié suite à son combat avec Monostatos a disparu, sa dépouille n’a jamais été retrouvée. Plusieurs décennies après, des rumeurs d’un « Maître Souffle » sont apparues dans les Monts Ciselés) Elles proposent aux personnages d’adorer le Maître Souffle pour gagner grands pouvoirs en échange. En termes techniques, c’est le gain d’une Cicatrice en échange de grandes ressources. Les personnages refusent tout net, les formes sombres, avant de disparaître dans le sol, leur expriment néanmoins qu’ils peuvent faire appel à la gratitude du Maître Souffle. J'ai trouvé ce moment plutôt réussi, malgré sa rapidité.

On arrête la partie là : l’intrigue patine un peu et les signes de lassitude des joueuses sont plus qu’évidents : la gratitude du Maître Souffle est comparée à des bons de réduction pour les pizzas et les personnages quand ils se déplacent font « pompompom » (bruit de Nounours dans Bonne nuit les petits). Je ne l’ai pas mal pris, mais je n’ai pas voulu charger la mule.

La partie a duré environ 2 heures.

***

Fin du SPOILER

Critiques générales sur Monostatos
Cette partie illustre bien les deux gros reproches que j’ai pour mon propre jeu : il est très long à exposer et la structure des scénarios est très loin d’être au point. Ca, avant les présentations en convention de cet automne, ça pose vraiment problème.

Pour le côté très long à exposer, je peux atténuer un peu la difficulté : je ne parlerai plus que du Culte et de ses Sectes, ainsi que des fantômes du désert et des Ogres ; le reste se trouve dans la description des personnages pré-créés et sinon les joueurs me poseront la question. Pour les règles, je me limiterai au rôle des personnages, au don de dés et à la résolution d’action de base. Mais ça fait encore beaucoup.

Pour la structure des scénarios, là c’est plus complexe. Ici, c’est surtout le début du scénario qui a beaucoup merdé : trop de liberté ça tue le jeu. Je commencerai par des scènes d’ambiance fortes en gueule pour mettre les joueurs dans le bain. Mais pour ne pas trop forcer les joueurs à prendre une décision… j’ai du mal à savoir comment faire. Mon problème central pour les structures de scénario de Monostatos, c’est que chaque Idole est souvent le symbole de quelque chose dans la réalité, je ne peux donc pas la laisser à la créativité des joueurs. De plus, j’ai beaucoup développé cet univers intérieurement et j’ai un peu de mal à le laisser dans les mains d’autres (même si j’ai plusieurs fois eu de bonnes surprises venant des joueurs qui connaissaient également bien l’univers).
Pour rendre les scénarios plus souples, je pense que je vais réécrire le système de jeu en précisant que le meneur a la responsabilité des Idoles (les forces oppressantes de l’univers de Monostatos), les joueurs auront la responsabilité de leurs personnages et que les comportements des humains esclaves des Idoles seront une responsabilité partagée entre le meneur et les joueurs. De plus, je vais orienter chaque scénario vers la destruction d’une Idole, et bien faire la différence entre une Idole et ceux qui la servent (par exemple, les prêtres de Monostatos décrits plus hauts ne sont pas vraiment une Idole, ils n’en sont que l’extension physique et idéologique). Il faut que je régule l’utilisation des Idoles et de leurs fidèles par le meneur de jeu. Il faut aussi que je définisse ce que gagnent les personnages à vaincre une Idole, en termes techniques (en termes narratifs c’est plus facile : la reconnaissance de ceux qui ont été libérés par exemple).

Par ailleurs, il faut que j’arrive à rendre inévitable pour les joueurs le fait de raconter des actions héroïques (= élégantes et subversives) pour leurs personnages. Il faut donc que je calibre mon système pour que les marques soient inévitables, qu’on ait en permanence besoin d’elles pour faire avancer l’histoire (de même qu’on a besoin de dés d’Offrande à Prosopopée). Mais il faut également que je donne à mes joueurs les moyens d’inventer ces comportements élégants et subversifs. Et ça c’est plus dur. La partie de Prosopopée « Vitrail » m’a permis de prendre conscience de la conception du système de jeu comme fertilisateur de parole, mais je n’ai pas encore la recette miracle. Le don de dés à la Prosopopée que j’utilise pour le moment ne me satisfait pas vraiment (trop subtil et puis une règle de jeu c’est un peu comme une brosse à dents : on peut utiliser celle des autres, mais c’est quand même meilleur quand c’est la sienne). J’ai quelques idées que j’espère tester prochainement et dont je vous donnerai plus de nouvelles.
Par exemple, le système utilisé pour la partie de St Malo était opaque, mais il forçait au moins les joueurs à rechercher ces actions héroïques tout le temps, parce que les dés étaient précieux. Mais les joueurs étaient suffisamment inventifs pour ne jamais tomber à court d’idées, ce qui n’est pas le cas de la plupart des joueurs lambda.
Encore du travail, donc.

Enfin, je me fais la réflexion que les Singularités doivent être utilisées autrement. Ici, en donnant un bonus au jet de dés, elles ont tendance à remplacer l’utilisation de marques héroïques et donc à permettre aux joueurs de se passer de ces marques. Ce n’est pas du tout ce que je recherche.

Réflexions intéressantes des joueurs
Les joueuses ont eu plusieurs réflexions intéressantes sur le jeu, que je retranscris ici.

Bérengère, quand j’ai parlé des dons de marques (quasiment le même mécanisme que les dons de dés d’Offrande à Prosopopée) a immédiatement dit « c’est des chaudoudoux ! » ; les chaudoudoux symbolisent, dans ce conte pour enfants de Steiner, des échanges affectueux (je ne connais pas le terme technique) entre deux individus dans l’analyse transactionnelle. Ce qui est amusant, c’est que c’est un mécanisme repris de Prosopopée pour exprimer une certaine admiration d’un joueur pour un autre. Je pense que Frédéric le savait déjà, mais je trouve intéressant que ça revienne comme remarque de ma sœur, qui n’a pas de formation en psychologie.

Amerolqis est obnubilé par la recherche du Sculpteur qui a créé la Statue parfaite dont il est tombé amoureux. Bérengère, en parlant de la statue du dieu Souffle : « Elle a été faite par mon Sculpteur, cette statue ? »
Moi : « Je ne sais pas, qu’est-ce que tu en penses ? »
Bérengère : « Nooon, elle n’est pas assez parfaite pour ça ! »
Moi : ^^
J'aime cette manière de raconter : Bérengère aurait pu faire dans la facilité de s'ouvrir une histoire pour elle, mais elle préfère placer la barre plus haut, augmenter la grandeur de son but (retrouver le Sculpteur).

Enfin, ma mère a trouvé agréable de ne pas avoir à atteindre son tour et d’avoir une plus grande liberté de choix et de créativité, par rapport aux quelques parties qu'on avait faites ensemble au par avant (je m’essaie à la Loi de la Monarde : ne jamais dire non). J’aime ce que ça signifie : les efforts théoriques que je fais pour mon jeu se retrouvent dans le plaisir de la partie elle-même, c’est rassurant.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Frédéric » 04 Sep 2010, 16:57

La première question que je me pose, sachant que tu souhaites laisser une immense liberté aux joueurs, c'est : les PJ ont déjà un objectif : renverser Monostatos et "contaminer" ce monde rigide froid et ordonné de leur chaos créatif.

(Les propositions que je vais faire à présent ne sont que des suggestions, à toi d'en faire ce que tu veux).

- Pourquoi ne pas simplement dire que les PJ savent qu'ils ne pourront pas vaincre Monostatos sans avoir mené plusieurs quêtes avant (subvertir les fiefs de l'ennemi, acquérir l'aide des divinités prisonnières ou que sais-je ?).

- Ensuite, tu construis ton monde en profondeur avec la précision d'un monde de jeu vidéo d'aventure, en prévoyant des choses en lien avec leur deuxième quête, qui en fait n'est qu'une étape vers leur quête principale. Enfin, quand je dis la précision d'un jeu vidéo, c'est uniquement pour détailler des éléments de quête potentiels, pas les meubles et la poterie qu'on trouve chez chaque habitant ^^. Le plus utile est donc de détailler quelques PNJ importants et leurs motivations en conflit ou en soutien à celles des PJ.

- Et tu prévois des évènements possibles en fonction des régions que tu exploites pour rythmer la partie et y mettre de la tension dramatique (attaques de brigands, manifestations divines, interventions immorales des prêtres de Monostatos, Ogres etc.), bref des choses pour pimenter un peu.

- Je ne sais pas si les PJ gagnent à rester soudés dans Monostatos. Si tel est le cas, je te propose de créer une situation initiale comme tu le fais généralement, la coalition des PJ peut aller dans le sens de leur quête. Sinon, il est intéressant de tisser des liens entre les PJ et les conséquences de leurs actions (on parle d'Amerolqis pour avoir délivré une ville, et ça arrive aux oreilles de Aléthéia...) pour qu'ils soient amenés à se croiser facilement et faire en sorte que tant que c'est logique et crédible, un joueur peut greffer son personnage sur une scène jouée par un autre et de laquelle il était précédemment absent.

- Ce qui serait cool, c'est que les joueurs n'aient pas besoin de découvrir tout le monde pour pouvoir s'attaquer à Monostatos himself. De cette manière, chaque campagne jouée avec des joueurs différents pourra amener les joueurs à explorer de nouveaux lieux, rencontrer de nouveaux personnages et arriver à la même finalité.

- Dernier point : on a tendance à aimer créer la fascination en dévoilant les nouveaux lieux visités petit à petit. Mais si on veut que les joueurs entreprennent vraiment des actions libres, il vaut mieux qu'ils connaissent le gros du lieu où ils se trouvent. Après tout, ils sont de ce monde. Certains connaîtront peut être mieux certaines régions et d'autres les leurs. Donc on peut imaginer que les lieux secrets ou mystérieux se découvrent par la fascination et les lieux "publics" sont révélés dans les grandes lignes quand les personnages éclairent leur destination, puis de manière plus détaillée une fois qu'ils ont choisi de s'y rendre effectivement. Mais comme un tout, pas seulement comme une description

De cette manière, avec un travail de la qualité qu'on te reconnaît, je pense que tu pourras te passer complètement de scénario (et j'insiste là dessus, je pense que les scénarios font du mal à ton jeu : en soi, ils tendent à inhiber la liberté des joueurs). Les joueurs pourront s'inventer assez librement toutes sortes de quêtes secondaires, ou se mêler à des intrigues tertiaires liée à des PNJ décrits dans ton monde, ou inventés à la volée comme éléments perturbateurs. Je pense que la force de ton jeu serait que les joueurs puissent (potentiellement) tout éviter, mais qu'ils ne le fassent pas parce qu'ils aiment l'aventure et l'univers qu'ils explorent.
Par exemple : les prêtres de Monostatos ont attrapé un PNJ avec qui les PJ se sont liés et vont le torturer en public. Il fait des aveux qui conduisent les prêtres de monostatos aux PJ, admettons que ceux-ci les battent (ils auraient tout aussi bien pu se la jouer Kevin Costner et aller libérer leur ami sur l'échafaud) mais que les renforts arrivent vite avec quelque chose de terrifiant et que cette fois-ci leur combat est un échec, ils pourraient être trainés en prison ou s'enfuir mais quoi qu'il en soit, il faut que l'exploration, les rencontres et les conflits potentiels se poursuivent. Le rythme n'a pas besoin d'être soutenu à 100% du temps. Certains jeux en ont besoin, mais je ne suis pas sûr que ce soit utile pour Monostatos qui est une belle pièce de poésie parfois contemplative. Il faut laisser les conflits arriver par la conjugaison des perches tendues par le MJ et des décisions des joueurs, plutôt que les provoquer de manière inéluctable.

***

Les personnages achètent un pot en terre portant un sceau, puis s’éloignent pour gratter le sceau. L’objet redevient laid et quelconque. Les joueuses abandonnent l’idée. J’avoue que je n’ai vraiment pas su quoi inventer. J’aurais peut-être dû leur demander ce qu’elles espéraient.

Il n'y a pas eu d'épreuve pour ça ?
C'est toi qui a décidé que le pot redevenait laid et quelconque ?
Mais quand on propose aux joueurs de narrer la fin d'un conflit, c'est important d'avoir le but de leur personnage avant de lancer les dés pour donner une direction à leur narration de victoire.

***

Je trouve l'idée que le MJ est responsable à 100% des idoles tout à fait acceptable, même si l'idée de subvertir le monde pour les PJ me semble une démarche qui pourrait être très récente dans ton jeu, car elle a un fort potentiel ludique (pas ludiste hein !) et fictionnel. Donc si le MJ a le contrôle absolu sur les idoles, il serait fertile de jouer le jeu de laisser les PJ les transformer ou les détruire, même si c'est lui qui en fait la narration.

***

Il faut que je régule l’utilisation des Idoles et de leurs fidèles par le meneur de jeu. Il faut aussi que je définisse ce que gagnent les personnages à vaincre une Idole, en termes techniques (en termes narratifs c’est plus facile : la reconnaissance de ceux qui ont été libérés par exemple).

Les idoles sont prévues dans le scénario ? Dans ce cas tu pourrais les prévoir à l'avance dans chaque partie du monde.
Pourquoi ne pas faire comme récompense aux joueurs que détruire les idoles, subvertir des humains affaiblirait Monostatos (techniquement : il perdrait des points sur sa fiche) de cette manière, au départ, Monostatos est bien trop puissant pour être affronté, mais à mesure que les joueurs lui mettent des bâtons dans les roues, il s'affaiblirait jusqu'à devenir un adversaire abordable.

***

Ta remarque sur les marques et les singularités est pertinente. Il faut tester, re-tester et -re-retester avec des variantes (d'ailleurs, je n'utilise absolument pas les mêmes "chaudoudous" pour Prosop' que pour Démiurges ou Psychodrame).

***

la partie de St Malo était opaque, mais il forçait au moins les joueurs à rechercher ces actions héroïques tout le temps, parce que les dés étaient précieux. Mais les joueurs étaient suffisamment inventifs pour ne jamais tomber à court d’idées, ce qui n’est pas le cas de la plupart des joueurs lambda.
Encore du travail, donc.


Ça c'est une question de fond : si j'en fais appel à l'inventivité de chacun, le jeu fonctionnera mieux avec ceux qui ont une imagination débridée. Je peux faire un jeu grand public, mais il n'aura pas les qualités que tu recherches. À toi de choisir un équilibre. Mais je te conseille de ne pas trop chercher à dompter les néophytes, Monostatos me semble par essence un peu trop hermétique (dans le bon sens du terme, je pense la même chose de Sens et de Démiurges).

***

Les retours de tes joueuses sont très bons ! Bravo, ton projet s'épanouit !
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Fabien | L'Alcyon » 13 Sep 2010, 22:35

Salut Fred et merci de ta réponse, ça m’est très précieux !

Je n’ai pas eu le temps de te répondre entretemps pour diverses raisons (retour à Paris, rentrée, préparation du Monde du Jeu…) mais j’ai bien exploité tes conseils dans ma nouvelle (et septième) version des règles, en particulier tes remarques sur la structure des scénarios. Ce qui est dingue c'est que tu arrives à formuler une idée générale que j'avais déjà sans pouvoir l'expliciter. Voilà la structure que j’ai utilisée non seulement pour une partie à Strasbourg avec des habitués, mais également pour les deux parties du Monde du Jeu et qui on bien porté leurs fruits.

Responsabilités
Désormais les responsabilités sont réparties ainsi :
  • le meneur de jeu a la responsabilité des Idoles (les forces oppressives de l’univers de Monostatos) et tout ce qui en dépend, notamment les Fidèles (les êtres humains au service direct de ces Idoles)
  • chaque joueur a la responsabilité de son personnage
  • tout le reste (essentiellement les êtres humains sous la coupe des Idoles et l’environnement des villes) est en responsabilité partagée entre meneur et joueurs :
    • au début de la partie tout est sous la responsabilité du meneur (puisque tout est contrôlé par l’Idole de l’endroit) ;
    • au fur et à mesure que les personnages affaiblissent l’Idole et ses Fidèles, cette responsabilité se transmet du meneur à eux (les joueurs racontent le comportement des humains libérés et comment ils reprennent possession de leur environnement) ;
    • à la fin de la partie, une fois que l’Idole est brisée, le meneur ne peut plus parler, sauf pour faire des suggestions : les joueurs, après avoir raconté comment la ville s’est libéré et ce qu’ils en font, sont obligés de raconter comment leurs personnages voyagent vers une nouvelle ville et une nouvelle Idole à briser, afin que le meneur de jeu puisse reprendre la parole
Structure de l’histoire
De ce transfert de responsabilités du meneur vers les joueurs découle la forme générale de l’histoire.
Il existe au départ des Plaies : les éléments narratifs qui représentent les conséquences honteuses et révoltantes des Idoles. La révolte des personnages envers ces Plaies va attirer vers eux des Fidèles. En combattant et en détruisant ces Fidèles, les personnages vont affaiblir l’Idole, jusqu’à ce qu’ils puissent la briser enfin pour de bon : fin de l’histoire.
Le meneur de jeu envoie donc ses Fidèles contre les personnages progressivement, en fonction des décisions des joueurs.
Je pense avoir avec ça une bonne amorce de structure d’histoire « libre », c'est-à-dire non prévue par le meneur, mais avec suffisamment d’éléments structurant pour que l’improvisation en cours de jeu puisse être effective. Je crois que j’arrive à me « débarrasser du scénario ». Jusque là, ça marche assez bien.

Les tests du Monde du Jeu ont montré que cette structure marche assez bien, même s'il faudra apporter des éléments supplémentaires pour qu'elle ne devienne pas trop monotone (alliés potentiels des personnages, forces oppressives tentatrices, révélations sur les personnages...). Il y a par ailleurs un gros travail à faire sur l'équilibrage des marques, mais c'est une autre histoire.

Je vais essayer de continuer à poster des rapports de partie de Monostatos, pour montrer ce que ça donne et pour faire avancer le jeu, mais j’avoue que je manque de temps pour ça.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Frédéric » 13 Sep 2010, 22:45

Merci pour le bon mot ! ^^
J'ai hâte de lire les prochains rapports de partie. Tu as raison, pour un jeu en campagne comme Monostatos, il faut trouver un moyen d'éviter qu'une monotonie s'installe dans la répétition du schéma narratif. Généralement les jeux que je connais qui ont ce type de schéma assez stricts permettent de changer complètement de monde d'une partie à l'autre, ou sont assez libres pour que les joueurs s'approprient complètement l'esthétique de l'univers. Pour Démiurges, j'ai la même problématique, on va voir les pistes qu'on dégage. ;)
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Christoph » 30 Sep 2010, 17:17

Hello Fabien

Comme tu m'en as confirmé l'intérêt par message privé, voici un peu de théorie edwardsienne brute. Ce que tu appelles des responsabilités sont plutôt des propriétés (dis-je, tout en concevant parfaitement que ce sont des concepts théoriques balbutiants, par rapport à, mettons, les démarches créatives). Une responsabilité est quelque chose de plus dynamique et recouvre un certain nombre de fonctions qui doivent être assumées, faute de quoi la partie s'effondre :
  • Contenu : les choses qui existent dans la fiction avant que la partie commence (personnages, lieux, constructions, organisations, etc).
  • Situation : quels personnages se trouvent où, à quel moment, dans quel état.
  • Intrigue : révélation de contenus (synchronisation des connaissances à la table, si on veut), la personne qui détient cette responsabilité est celle qui décide qu'il y a révélation, même si ce n'est pas elle qui la décrit (peut-être parce qu'elle ne connaît pas le contenu en question)
  • Narration : qui décrit quels moments de jeux significatifs (avec ou sans contraintes), en particulier les conséquences de résolutions de conflits, les descriptions pittoresques d'un château ne font pas vraiment parties de ça.
Il est assez facile de voir qu'aucun joueur n'a l'exclusivité de la responsabilité de contenu. Le MJ a classiquement le monde, les joueurs ont leurs persos. Dans une large mesure, cette remarque vaut pour les trois autres responsabilités aussi, même dans les pratiques classiques. L'idée c'est qu'on a une responsabilité d'un certain type au sujet d'un élément imaginé donné (c'est très abstrait).

Un de tes questionnements pour Monostatos semble provenir du grand contenu à introduire pour pouvoir jouer. En effet, tout ce monde qui est dans ta tête n'existe pas tant qu'il n'a pas été communiqué, mais comme tu es le seul à le connaître, tu es aussi le seul à parler. Il n'est probablement pas toujours clair si ce que tu as dévoilé au début de la partie était, rétrospectivement, vraiment utile, mais on a facilement l'impression qu'il fallait le dire quand même pour que ça se sache.
Une perspective à envisager selon cette théorie c'est d'axiomatiser le monde, le réduire à ses grands principes. Le MJ garderait un contrôle très fort sur la couleur, mais tu permettrais aux joueurs de faire des narrations, voire de la création de contenu, selon des principes systémiques (Innommable et ses monologues structurés sont un exemple, peu contraignant, de ce que je veux dire). Je pense notamment aux Idoles. Le principe est clair. Est-ce qu'il y a besoin de les créer à l'avance ? Est-ce qu'un joueur ne pourrait pas en suggérer qui soient de parfaits antagonistes pour son personnage ? Partant, est-ce que Monostatos lui-même aura effectivement pris le pouvoir de la même manière et pour les mêmes raisons à chaque campagne jouée (dans les grandes lignes, c'est difficile à contester, mais dans les détails...) ?

Tu peux même pousser le truc assez loin : un joueur aurait le droit de demander une scène où il découvre une nouvelle Idole (responsabilité d'intrigue), toi tu lui en crées une (responsabilité de contenu) à la volée en te basant sur diverses informations (feuille de personnage, événements vécus jusque là, le monde tel que décrit, etc.) et tu donnes à un troisième joueur la responsabilité de cadrer la scène de la rencontre (responsabilité de situation). Cet exemple est mauvais pour Monostatos, mais il permet de mettre en avant à quel point un élément imaginé peut prendre vie par l'interaction de différents joueur, de manière structurée. Ce partitionnement de qui apporte quelle pierre à l'édifice doit, à mon avis, s'inscrire dans quelque chose de cohérent pour le joueur, à l'échelle de la partie. C'est ça sa propriété (son fief, son steak, ce pour quoi il se bat).

Souvent, il se trouve que la propriété se retrouve 1:1 avec des éléments de la fiction. Classiquement, le personnage joueur. Dans S/lay w/me, c'est déjà moins clair. Les règles permettent explicitement au joueur du héros de déborder sur la description de l'univers et de ses adversaires, et au joueur non-héros de décrire des choses que dit ou fait le héros. Sauf quelques points bien particuliers, soigneusement délimités par les règles. Chaque joueur défend son steak créatif, alors même que les joueurs s'échangent couteau et fourchette pour certaines choses. Voir ce rapport pour plus de détails.

Pour revenir à mon point de départ donc, il n'est pas 100% clair pour moi que les Idoles doivent être sous le contrôle exclusif du MJ, et peut-être même les héros ne le sont pas par rapport à leurs joueurs. Le MJ possède l'oppression, la « masse », l'aliénation, etc. Les joueurs l'héroïsme, la liberté, etc. Clairement, un héros peut être opprimé, voire induit en erreur ; est-ce qu'un MJ ne devrait pas pouvoir dans certains cas décrire ce personnage de certaines manières ? Il s'agit de trouver comment répartir le contrôle sur un élément imaginé (via les responsabilités), tout en respectant la propriété fondamentale de chaque participant (qui ne doit pas être lié 1:1 à un (ou plusieurs) élément imaginé donné). L'intérêt est, à mon avis, que beaucoup de contenu (ou du moins de suggestions pour des éléments « contenuifiables » par la personne qui en détient l'autorité) se crée ainsi par le simple fait de l'échange d'idées entre joueurs. Tout le monde réfléchit un peu plus loin que le bout de son nez, chacun ajoute un petit bout tout en s'inspirant de ce qui a été dit auparavant, il y a des contraintes (et c'est une bonne chose si c'est bien fait), etc. Avec ça, il est envisageable de diminuer la part de contenu que le MJ doit « charger de manière frontale » en début de partie.


C'est la première fois que j'essaie d'articuler les choses de cette manière, je ne m'attends pas à ce que ce soit très clair. Il ne faut pas hésiter à poser des questions pour m'obliger à affiner mes élucubrations.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Fabien | L'Alcyon » 08 Oct 2010, 11:21

Salut Christoph et merci de ton message !

La preuve, si besoin en était, que la théorie est un terreau fertile à la création : tu touches à un point central de ma réflexion autour de Monostatos.

J'ai pris globalement le partie de développer Monostatos au départ comme un jeu mainstream au thème original, et de remettre progressivement chaque partie en cause, aux vues des théories forgiennes. Ca a d'abord été le système de jeu (ouf que ça a été long ! et c'est même pas fini !), puis les personnages (définir leur rôle et leur identité, y 'a encore des trucs à peaufiner), puis la forme des scénarios (ça non plus c'est pas encore calé). Reste l'univers et son dévoilement : jusque là, ça reste un univers à la structure « classique » - entendez par là, un univers qui existe entièrement avant les personnages et qui ne dépend pas de la narration des joueurs en cours de jeu. Pour le moment, je n'ai pas encore eu le courage d'affronter cette remise en cause du plus important élément de mon jeu.

La réflexion qui découle de ton commentaire, ce serait que les joueurs et le meneur, d'une manière ou d'une autre, construisent le contenu (= l'Idole, les Fidèles essentiellement) en interagissant ensemble. (L'intrigue, la situation ne me posent pas de problème, je suis en train de réfléchir à leur sujet.)
Pourquoi cela me pose-t-il problème ?
Je comprends bien la richesse d'une telle possibilité. Ca élargit les horizons créatifs, ça permet aux joueurs de faire également travailler l'imaginaire, ça permet d'éviter toute prévisibilité... Enfin et surtout, le jeu gagne en ergonomie : pas besoin de travailler des heures pour pouvoir jouer.
Néanmoins, ça pose un problème quant à l'aspect « symbolique » de Monostatos. Même en faisant beaucoup confiance à mes joueurs, je ne pense pas qu'ils possèdent une culture critique assez importante pour créer rapidement des Idoles (sauf à être militants chez Casseurs de Pub, mais je n'ai pas encore eu la chance de les rencontrer et de les faire jouer à Monostatos - pourtant qu'est-ce que j'aimerais ça !). Or manipuler des symboles d'oppression et de se les approprier fait fondamentalement partie de la démarche créative de Monostatos. On pourrait raconter de belles histoires se passant dans un univers de désert, avec des dieux-insectes, un dieu dominateur, des monstres symboliques... avec des héros se révoltant contre de vagues idoles sans force symbolique, mais à ce moment-là, on ne jouerait plus vraiment à Monostatos, il faudrait plutôt partir des règles In a Wicked Age, je crois (ce qui pourrait être intéressant aussi, notez bien).
Même « axiomatiser » les principes du jeux ne semble pas être la réponse à ce problème, parce que l'oppression des êtres humains dans la réalité est trop complexe pour être ainsi résumée (enfin, si quelqu'un y arrive, je suis preneur !). J'ai pensé faire appel, par exemple, à des concepts comme les sources de l'indignation de telle ou telle critique du capitalisme (cf. Le Nouvel Esprit du Capitalisme), mais je ne crois pas que ça marche. Néanmoins, si vous voyez un moyen d'axiomatiser Monostatos, je suis extrêmement intéressé !
Ca rejoint la question de la création des personnages. Je crois que les personnages pré-créés sont les plus intéressants parce que j'ai pu leur donner à chacun une symbolique forte, liée à la question de la révolte. J'ai eu effectivement deux personnages vraiment intéressants créés par des joueurs (Edipios créé par Sylvain et Pangea créée par Eric), mais ils n'ont pas été créés « sur le pouce », les joueurs se sont beaucoup intéressés à l'univers pour cela.

Je me sens donc un peu « forcé » par ces conclusions à proposer des histoires avec un contexte relativement précis (on est bien d'accord que l'intrigue n'est pas prévue à l'avance) :
  • Un aperçu politique, géographique et historique de l'endroit, pour donner de la couleur et des éléments au meneur pour comprendre la symbolique et pour fertiliser son imagination.
  • Une description de l'Idole et de ses Plaies possibles (étant entendu que le meneur peut tout à fait en inventer d'autres)
  • Une description des Fidèles possibles à utiliser (idem)
  • Une description des Tentateurs et des Compagnons possibles à utiliser (idem)
  • Quelques idées pour introduire des Dévoilements (idem)
En somme, la description de l'histoire serait la description des jouets du meneur, au même titre que la feuille de personnage est la description du jouet de chaque joueur. Dans les deux cas, ce sera l'auteur (moi) qui les prévoira à l'avance, tout en laissant mes recettes de cuisine disponibles pour que d'autres puissent également écrire. Mais le jeu, de base, devrait avoir assez de matériel (12 personnages précréés et 12 lieux à libérer) pour faire jouer longtemps sans avoir à préparer quoi que ce soit (ce qui permet de regagner en ergonomie : le meneur de jeu n'a pas à créer de scénario, il a juste à avoir lu le contexte de l'histoire). La liberté créatrice des participants sera durant le jeu lui-même, dans les actions des personnages, la prise en main de l'environnement et leurs décisions, dans les nombreux appels à la narration que font les règles.

Ce n'est pas que je tiens absolument à un contexte préparé à l'avance et à un univers fixe à absorber, mais je vois difficilement comment faire autrement. Si quelqu'un a des solutions à proposer, je suis absolument preneur !
Pour relativiser un peu mon propos de ce poste, je me suis rendu compte que la présentation de l'univers peut se faire assez rapidement, en parlant uniquement de Monostatos, des Sectes du Fer et de la Poussière, et des humains enfermés dans les villes et les oasis pour échapper au désert. Plus la présentation du lieu à libérer. Christoph et Adrien, qu'en avez-vous pensé à OctoGônes ? Est-ce que c'était long ? Est-ce que c'était suffisant pour profiter pleinement du jeu ?
Je me dis enfin que même si j'aime beaucoup la théorie forgienne, il ne faut pas que je tombe dans le piège de faire du forgien pour faire du forgien. Il faut avant tout que j'écrive mon jeu, que j'arrive à retranscrire pleinement et le plus justement possible, en utilisant les outils forgiens avec toute leur richesse (j'essaie aussi de créer mes propres outils théoriques, mais c'est moins évident). Romaric a fait avec Sens un jeu sacré, à l'identité surpuissante, en utilisant des théories forgiennes et qui pourtant est très atypique en regard de ces mêmes théories (présence très forte du meneur de jeu, scénario très préparés...). Je voudrais arriver à faire l'équivalent avec Monostatos.

Est-ce que je réponds bien à ta réflexion ?
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Christoph » 08 Oct 2010, 11:46

Hello Fabien

Oui tu réponds à mes questions et me permets d'affiner ma compréhension de tes buts. Je propose de continuer la discussion de fond dans le fil que je viens d'ouvrir, à partir d'exemples concrets. Tu verras que je ne propose plus la création des Idoles en commun.

Remarque pour la postérité : Romaric a commencé l'écriture de ses jeux avant de connaître les théories diffusées ici, je ne pense donc pas qu'on puisse dire qu'il les a vraiment utilisées. Renaissance n'est pour ainsi dire pas influencé (peut-être la deuxième édition ?), Mort un peu et on verra bien pour Néant. Ce qui n'enlève rien à son mérite, mais ça explique pourquoi son jeu est atypique vis-à-vis de ces théories. D'ailleurs je pense que même si Romaric avait connu ces théories plus tôt, il n'aurait pas conçu ses premiers jeux différemment.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Chemeeze (Adrien) » 08 Oct 2010, 12:30

La présentation était effectivement plus que suffisante. C'est toujours long en conv' vu que personne ne connait le jeu, le système, l'esprit etc. (Sens ça me prend 1h pour BG + création des persos). Plus de détails m'aurait peut-être refroidi. Quand le MJ commence à décrire son univers en faisant apparaître plein de noms, plein de royaumes, de villes, etc. J'ai souvent la triste impression de tomber dans une parodie de Fantasy (ou SF). La il y avait le détail suffisant, c'était concis et indispensable.

Pour ce qui est de l'application des théories Forgiennes comme vous dites (j'avoue ne pas être trop au courant, j'ai survolé ça de temps en temps pour comprendre un peu vos arguments). Je reste persuadé que vouloir donner un maximum (voire toute) les responsabilités naratives aux joueurs n'est pas La solution pour un Bon JDR.

Comme le disais ma mémé, il faut de tout pour faire un monde. J'apprécie beaucoup Prosopopée pour son côté onirique. Mais dans Monostatos comme je l'ai dit à Fabien après la partie, il manque une vrai opposition du MJ face aux joueurs. C'est bien d'être libres de raconter et décrire. Mais au final le scénario était une succession de descriptions de victoires. Pas de rebondissement, pas de fuite stratégique, pas d'opposition en somme. Certes, il y a quelques échecs, mais ça n'a pas de répercussion significative. Tandis que dans Prosopopée, les joueurs jouant aussi l'opposition, le scénario a des rebondissements parcequ'on met des batons dans les roues, parcequ'on réorriente, parceque des révélations peuvent être amenées etc.

C'est pour ça que je suis tout à fait d'accord avec Fabien quand il dit souhaiter garder le contrôle sur le BG, le lieux, l'idôle, les Fidèles etc. Si je participe trop à la description de la ville, je ne suis plus émerveillé quand c'est décrit. Parceque ce n'est plus un lieu que j'explore, c'est un lieu que je décide. Donc personnellement j'apprécierai pas mal de vraies Surprises dans le scénar.

Enfin, je n'ai après tout qu'un scénar de Monostatos dans mon bagage mes remarques sont donc à ponderer via votre expérience personnelle.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Christoph » 08 Oct 2010, 14:04

Je souscris à ce que dit Adrien en tout point.
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Re: [Monostatos] Le temple enfoui

Message par Frédéric » 17 Oct 2010, 15:16

En fait, chaque jeu de rôle est un subtil agencement de dur et de souple. Pour chaque nouveau jeu que je crée, je travaille (souvent longtemps) pour trouver cet équilibre.
Dans Prosopopée, les joueurs ont l'impression d'être complètement libres, d'avoir une souplesse maximale, mais ce n'est pas vrai : ils doivent suivre une quête imposée et régler des problèmes qui surviendront forcément. Il n'y a pas de conflits d'intérêt. Les Médiums ne peuvent pas être inquiétés personnellement par les problèmes, tout peut être modifié, sauf ce qui est noté sur le cercle des couleurs etc.

Dans Démiurges, l'univers appartient au MJ, les PJ aux joueurs, mais chacun peut empiéter sur le terrain de l'autre grâce au système.

...........

Il n'y a aucun mal à laisser l'univers au MJ dans Monostatos, tant que tu offres des souplesses sur d'autres aspects du jeu, pour que les joueurs ne se contentent pas de suivre la création du MJ. D'où l'importance des espaces de créativité.

P.S. : Christoph et Adrien : excellents posts, j'ai pas arrêté d'acquiescer en vous lisant ! :)
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