Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

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Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 19 Nov 2011, 18:00

Bonjour à tous, vendredi nous avons joué une partie de Bienvenu eà Poudlard un peu spéciale.
J'ai hybridé mon système de façon à ce que les joueurs explorent des objectifs et problèmes intimes de leurs personnages, tout en y greffant une intrigue préparée à l'avance par le MJ. Jusqu'ici rien de particulier, si ce n'est que la préparation du MJ est une refonte d'un scénario que j'ai écrit pour ma campagne il y a maintenant plusieurs années.

La réelle particularité de cette partie est donc que j'ai renoué avec une façon de mener assez classique que j'avais complètement abandonnée depuis plusieurs années, avec des descriptions très construites, des discours écrits à l'avance, un univers très détaillé, une intrigue constituée de secrets et de faux semblants. Et ce, avec un système très moderne et inspiré de jeux de The Forge. ET par système, je n'entends pas uniquement « les mécaniques de résolution », non, ça va bien plus loin que ça.

L'idée de cette hybridation est née d'une frustration multiple :
  • j'ai toute une campagne de scénarios « classiques » d'Harry Potter que j'ai adoré écrire et faire jouer, mais j'ai été frustré à mort de n'avoir sous la main qu'un système pourri : le BaSIC qui m'a saboté une grande partie de ces parties (à en pleurer tant il est nul) ; et quand je l'ai écrit, j'étais pétri d'idées préconçues sur la façon d'amener et de résoudre les enjeux ; j'avais donc envie de récupérer le bon en améliorant le moins bon, voir le mauvais ;
  • ces anciennes parties souffraient d'un gros manque : ok, les intrigues et l'exploration de l'univers étaient cools, mais quid des moments intimistes ? Des histoires d'amour de collégiens ? Des rivalités, de l'amitié, la trahison, les disputes, les examens ? … Ces choses là manquaient vraiment et une grande partie de mon travail sur Bienvenue à Poudlard depuis consistait à les réintégrer naturellement ;
  • j'ai beaucoup moins d'appétence et d'excitation pour les jeux où la préparation est pré-mâchée ou inexistante (bien que l'expérience puisse être exceptionnellement forte et plaisante, voire enrichissante) ; je suis nostalgique de cette frénésie jubilatoire qui s'emparait de moi quand j'étais sur le point de faire jouer un scénario sur lequel j'ai beaucoup bossé ; c'est un point qui me paraît important : plus on s'investit avant la partie, plus on est motivés à la faire jouer et ça me manque avec des jeux sans préparation, ou même avec une préparation minimale (Démiurges, rônin, Innommable etc.) ou je me sens assez détaché de l'intrigue créée à l'avance ;
  • j'aime le confort que procurent les narrations, descriptions et intrigues de MJ bien préparées pendant les parties, avec l'impression que ce que je donne aux joueurs est posé avec une aisance, une assurance et un aplomb qui lui donnent une épaisseur et une densité sans égal à la partie ;
  • en tant que MJ, je me sens parfois en difficulté quand il y a trop d'improvisation et j'ai l'impression que l'effort n'est pas toujours récompensé du fait que mes joueurs n'ont pas toujours autant de facilités avec l'impro que mes exigences le voudraient (c'est ce que j'ai ressenti avec Polaris, My Life with Master, Démiurges et d'autres jeux que j'aime et adule) ; (je m'excuse d'avance pour les joueurs concernés, ce n'est pas une critique ou un regret, juste le constat que ces jeux me satisfont plus avec des joueurs très imaginatifs et très à l'aise avec l'impro) ;
  • j'aime les jeux « forgiens » pour leur fonctionnalité, leurs thèmes parfois inattendus, leur capacité à créer une dynamique sociale et créative stupéfiante, l'importance qu'ils donnent aux joueurs, leur capacité à enrayer les problèmes que l'on rencontre dans les JDR, et tout simplement l'expérience qu'ils procurent, mais j'ai toujours gardé une frustration et une nostalgie de ne plus pouvoir vivre les anciennes expériences qui n'avaient pas que du mauvais.

Pour cette partie, j'ai donc pris un parti égoïste : bordel, je veux revivre tout ça !

Bienvenue à Poudlard est un jeu qui intellectuellement me laisse indifférent, contrairement à mes autres jeux (sauf Gloria qui m'a posé le même problème que BaP) je n'ai donc aucun intérêt à m'y investir, en dehors d'une petite revanche mesquine sur le gâchis qu'a été ma chère campagne qui m'a demandé tant de sueur et qui, malgré de grandes qualités a été vraiment en dessous de son potentiel.

Eh puis merde ! Bienvenue à Poudlard, c'est de la célébration des films et des romans Harry Potter, je me jette à l'eau et j'essaye de faire ça bien : de garder tous les avantages du classique et du forgien sur ce projet !

La fiction
Je vous propose ici le scénario et la préparation du contexte que j'ai utilisées : http://froudounich.free.fr/PDF/l%27orbe ... efonte.pdf
(Le contexte est censé servir pour la campagne entière, en y intégrant des ajouts petit à petit).

Les joueurs sont Gaël, Lionel (Arkel) et Louise.
- Gaël joue Mary-ann Waldorf, Gryffondor gosse de riche un peu manipulatrice ; veut retrouver le trésor des Waldorf et veut intégrer le club de l'élite de Poudlard.
- Lionel joue Alex Nebriam, Serpentard impulsif et décalé pour sa maison composée de sinistres individus peu scrupuleux ; il veut devenir populaire ; il veut trouver de vraies fées (il a du sang d'être féérique en lui) ; et il veut surmonter sa différence avec les autres Serpentard.
- Louise joue Penny Walnut, Gryffondor ; elle veut réussir brillamment son année pour pouvoir devenir préfet plus tard ; elle veut découvrir le secret de sa bague (liée à la magie noire) ; elle veut venger la mort de son frère.

Déjà on sent le potentiel pour une histoire formidable.
Les PJ ont tous 11 ans et entrent en première année à l'école, je commence donc par une introduction assez longue pour leur décrire brièvement leur voyage, puis leur arrivée à l'école, la cérémonie etc. (Voir le scénario pour plus de précisions.)

Puis, chaque joueur à tour de rôle lance une scène en expliquant ce qu'il veut faire (ou en indiquant l'objectif qu'il veut aborder pendant cette scène).
Le MJ fait la plupart des mises en scène, mais parfois les joueurs l'ont entreprise d'eux-mêmes, notamment quand les éléments nécessaires à la mise en scène étaient déjà connus.
Quand chaque joueur a joué une scène, le MJ place une de ses scènes préparées à l'avance.

Voici un florilège des scènes de joueurs :

Meilleur scène de bibliothèque ever :
Louise décide de jouer une scène où son personnage, Penny se rend à la bibliothèque pour aller voir si elle ne peut pas en apprendre plus sur sa bague. (Pour l'anecdote, Louise et Lionel sont tous deux bibliothécaires, ce qui nous a fait sourire et du coup, elle s'est avérée particulièrement intéressante pour une simple scène de bibliothèque qui s'est toujours résumée à une recherche d'indices sommaire et absolument pas »mise en situation »).
Elle emprunte des livres de cours et dessine un symbole sur un bout de papier (que Louise a directement copié d'un élément de motif présent sur le mur derrière moi) et demande au bibliothécaire si des livres en parlent. Il dit qu'il n'a jamais vu ça mais qu'il peut aller jeter un œil dans la réserve. La réserve est un bazar sans nom, le jeune bibliothécaire fait du rangement. Il disparaît un long moment sous une pile de livre et Penny est contrainte de l'attendre puisque la réserve lui est interdite.
Le bibliothécaire reparaît au bout d'un instant un livre à la main et lui explique qu'elle devrait abandonner ses recherches sur ce symbole, elle est beaucoup trop jeune pour tremper dans des choses aussi sombres.
Ce qui ne transparaît pas dans le CR, c'est que les éléments de couleur dans cette bibliothèque étaient nombreux et naturels, à la fois de la part de Louise et de la mienne : les comportements du bibliothécaire, le fait que Penny vienne emprunter des livres, les descriptions diverses etc. C'était vraiment, pour une scène en apparence anecdotique très vivant.

J'ai vraiment eu l'impression que la charge esthétique des scènes du MJ (en plus des références communes très riches et précises entre les joueurs) a retenti de manière bénéfique sur l'ensemble de la partie, y compris les scènes des joueurs : d'une part, ça m'a galvanisé, créant une ébullition imaginaire dans mon cerveau, m'aidant par exemple pour cadrer les scènes que je n'avais pas prévu à l'avance, mais j'ai l'impression que ça a retenti sur l'imagination des joueurs, (Lionel et Gaël, si vous pouvez me dire ce que vous en pensez).

Une scène de confessions intimes
Louise cadre elle-même une scène où dans le dortoir de Gryffondor, Penny avoue à Mary-ann qu'elle a vu son frère mourir il y a quelques années et qu'elle ne peut pas s'empêcher de le ressasser, Mary-ann en retour lui explique que son père qui travaillait au ministère a disparu cinq ans plus tôt. Cette scène a resserré le lien entre les deux personnages, je ne m'y attendais pas du tout, c'était gratuit de la part des joueurs, ça n'a rien rapporté, d'un point de vue mécanique et il n'y a pas eu de Conflit (et pourtant, Louise n'est pas du tout une habituée de mes tables, à la Guilde elle est plutôt habituée aux parties plus classiques, elle a été particulièrement à l'aise et entreprenante).

La course à la popularité
La question de popularité est un élément central dans Harry Potter, voici le résumé de plusieurs scènes où la question a été abordée :
Mary-ann, Penny et Alex se tirent un peu la bourre sur leurs performances scolaires, mais pas seulement : Mary-Ann cherchant à entrer dans les bonnes grâces du professeur Slughorn de manière à entre dans son club de célébrités cherche un moyen d'approcher un élève bien plus âgé, coqueluche de l'école. Il est entouré de filles lui tournant autour. Les amis de Mary-Ann la laissent en plan pour rejoindre le cercle des admirateurs de James (le garçon en quetsion). Mary-Ann approche alors et se présente, expliquant bien qui est son père. Le garçon impressionné discute avec elle, il fini par accepter de soumettre sa candidature au professeur.
Plus tard, Mary-ann est acceptée dans le club, elle doit se trouver un cavalier pour le bal. Elle demande donc à James qui décline à cause de leur différence d'âge. Lionel en profite pour faire intervenir son personnage Alex, qui cherche à être populaire, et propose d'être son cavalier. Mary(ann accepte malgré les avertissements de James quant au fait qu'elle ne peut pas faire venir « n'importe qui » dans ce club sélect.
Durant le bal, tout le monde ignore Alex, y compris le professeur Slughorn qui exprime à Mary-ann combien il est triste que son père ait disparu... et James finit par venir dire à Mary-ann qu'elle n'aurait pas dû choisir Alex comme cavalier, il juge ça indigne d'elle et il pense faire en sorte qu'elle ne fasse plus partie du club. Alex et Mary-ann lui balance les ragots au sujet de sa propre cavalière, (Conflit) suite à quoi James sourit et dit : « très bien, je vois que vous avez compris l'esprit de ce club, vous y avez peut être finalement votre place ». (C'est Gaël et Lionel qui on fait la narration de victoire au Conflit).

Ce qui m'a marqué concernant ces scènes, c'est qu'elles étaient à leur juste place : les joueurs ne se forçaient pas, j'ai éprouvé une étonnante facilité à jouer mon rôle de MJ, ça ne se parasitait pas avec les scènes du MJ, les joueurs étaient vraiment concernés par les enjeux plutôt anecdotiques et intimistes et je pense avoir réussi à éviter tout passage en force et désappropriation des personnages joueurs.

Quelques scènes du MJ à présent :
Scène 2 : le professeur Liedes
Dans l'une des salles de cours du cachot éclairée par des chandeliers, le professeur tentera d'expliquer à des enfants de onze ans que ce n'est pas la nature d'un être qui le rend mauvais mais ses actes. « On ne naît pas mauvais, on le devient par intérêt ou par rage. Certains parmi vous se laisseront tenter par l'attrait de la magie noire, mais vous êtes les seuls à pouvoir combattre votre monstre intérieur. » (discours que j'ai préparé avant la partie et ressorti tel quel pendant, c'est le genre de détails qui donnent toute leur substance aux scènes de cours, j'ai essayé divers moyens pour pouvoir les improviser, mais c'était toujours décevant.)
« Quoi qu'il en soit, il est primordial de vous apprendre à vous défendre contre les choses les plus sombres qui peuplent ce monde. Nous allons commencer par le sortilège du saucisson... »
Là, le professeur leur indique quelle formule et comment lancer le sort et les joueurs doivent lancer les dés pour avoir une chance d'apprendre le sort.
Alex, raillé par les autres Serpentard s'entraîne avec Philip Londubat (un aïeul du Londubat des romans), un de ses amis PNJ (les joueurs inventent des PNJ avant de commencer la partie). Alex veut tellement se faire bien voir de ses pairs qu'en lançant son sort d'immobilisation, il ridiculise Londubat, raillé par les Serpentard. Celui-ci lui en veut.
Je finis la scène en faisant parler des camarades de classe à la sortie du cours, disant que deux élèves : Walter Conroy et Lucy Midgewell ne sont pas venus en cours. Ce qui conduira à la scène suivante plus tard :

Scène 3 : le tableau du troisième étage
Alors qu'un PJ se rend en cours, il voit sur le sol, des traces de nourriture étrangement colorées. Soudain, un grand tableau représentant un puits l'avale. Il se retrouve dans un décor peint, permettant d'accéder à tous les autres tableaux de Poudlard. Il retrouve Walter Conroy et Lucy Midgewell coincés là. Alex saute dans le puits pour essayer d'en ressortir et il se retrouve dans un tableau donnant sur la salle des potions, il voit le professeur Slughorn (professeur des potions) donner une potion de couleur rouge sombre au professeur Liedes (professeur de défense contre les forces du mal), celui-ci la boit et semble pris de convulsions. Quelques instants après, il se relève, le remercie et s'en va, après des remarques désobligeantes de Slughorn.
Soudain, le tableau recrache Alex et les deux autres prisonniers, c'est Dumbledore qui leur explique que ce tableau n'en fait qu'à sa tête. Il leur dit qu'il est pressé et entre dans le tableau où ils le voient s'en aller.

Scène finale :
Fallen le père de Mary ann est reparu rachitique et prématurément vieilli. Il lui explique qu'il a travaillé pour Grindelwald, le terrible mage noir et que celui-ci lui a lancé une malédiction. Il demande à sa fille de trouver un orbe qui a été caché dans Poudlard, c’est le seul moyen de le sauver. Il ne peut pas entrer dans Poudlard car les sorciers le pensent encore mage noir, mais il s'est repenti. Mary-ann accepte.
Elle réunit ses amis Alex et Penny et ils trouvent l'orbe dans un dortoir. À ce moment-là, une brume étrange envahit les couloirs et des mains d'ombre griffues en émanent et essayent de s'emparer de l'orbe.
Les PJ lancent des sorts, courent et là, ils voient que la brume change de direction et en sortant, prend l'apparence d'êtres humanoïdes à tête de chauve souris.
Les PJ appellent les loups comme ils l'ont appris dans un cours au début de l'année, les loups se battent contre les créatures.
Fallen apparaît àç la lisière de la forêt et demande à sa fille de vite lui donner l'orbe.
Le professeur Liedes surgit en traversant une vitre et leur crie « ne faites pas ça ! ». Mary-ann veut donner l'orbe à son père, mais Alex lui lance un sort pour l'immobiliser. Il prend l'orbe de ses mains et le donne au professeur Liedes mais celui ci a les crocs qui poussent et les yeux injectés de sang, il dit qu'il ne peut pas garder l'orbe, qu'il doit le donner à un autre professeur. Alex court, entre dans le château, trouve un professeur et lui remet l'orbe.

Pendant ce temps, Fallen est capturé par Liedes.
Je fais un épilogue où le professeur Liedes leur explique ce que les joueurs n'avaient pas encore compris et voilà. Fin de la partie.

J'ai prévenu dès le départ les joueurs que ces scènes pouvaient avoir un aspect « cinématique » comme dans un jeu vidéo, ou parfois leur placer des enjeux à résoudre. Le fait de jouer « par scènes » avec des codifications connues à l'avance a aidé à l'intégration de scènes si différentes.

Remarques
Au final, j'ai quand même dû sacrifier quelques trucs :
  • la rapidité de mise en œuvre : en effet, écrire un scénar, fut-il de trois pages (Ce scénario en faisait 14 la première fois que je l'ai fait jouer), sous la forme d'une intro cinématographique, de cours récités, de longues descriptions et d'une intrigue complexe, c'est plus long et complexe qu'une situation initiale d'une page (comme je le proposais dans la précédente version de BaP, bien plus « académiquement forgien » si vous me permettez l'expression).
  • On n'avait pas énormément de temps pour jouer tout ce que le jeu exigeait : scènes des joueurs + scènes du MJ ; donc je me suis permis de couper court à la plupart des enjeux des scènes de MJ, pour en faire des successions de révélations, « révélées activement », cad, sans que les joueurs cherchent vraiment des solutions, en amenant des évènements assez rapidement les uns à la suite des autres.
En même temps, dans beaucoup d'épisodes d'Harry Potter (films et romans), ça se passe comme ça : l'intrigue de fond est juste constituée de quelques mystères et se dévoile complètement à la fin comme un coup de tonnerre.

Gaël était déçu qu'on n'ait pas placé les enjeux liés aux scènes du MJ, et donc à l'intrigue, plus tôt dans la partie, puisque tel qu'on l'a joué, c'est vraiment à la fin que l'intrigue s'est précisée et que des dangers sont survenus. Je pense que la prochaine fois j'essaierai pour voir si ça ne se parasite pas, de placer ces enjeux plus tôt dans la partie. Il n'empêche que le fait que les mystères (« c'est quoi ces voix dans ma tête ? » « Pourquoi tel prof est louche ? » Etc.) aient précédé les grande révélations, ça leur a permis d'être plus intenses et plus attendues.

L'aspect scénario n'est quand même pas aussi libre que dans un jeu classique : je m'astreins à beaucoup de contraintes et je compte écrire dans le texte du jeu un cadre et des règles précises pour écrire cette partie « scénar », sans forcément une structure préformatée.


Ce qui est remarquable, c'est que Gaël et Lionel avec qui je joue souvent ont découvert une autre facette de ma façon de mener théâtrale, énergique et enjouée et ça leur a plu, pourtant, ils sont rompus aux jeux forgiens, particulièrement Gaël qui est devenu très critique sur les jeux classiques.


Comment cette hybridation improbable a-t-elle fonctionné ?
De toute évidence, grâce aux fortes contraintes induites par la fiction qui tient pour modèle (les livres et films d'Harry Potter) et quelques parties rigides du système :
  • tout se passe dans une école fermée (on peut en sortir, mais ce n'est qu'élargir un peu ses frontières), tout le monde peut donc être présent à chaque scène facilement s'il le veut ;
  • le temps est prédécoupé : un épisode = une année scolaire. Donc, j'ai adapté ça sur une partie (plus ou moins longue) et ça oblige à ce que l'un des participants marque l'évolution du temps (bon, dans cette partie précisément, c'était pas clair puisqu'on a raccourci le temps de jeu et donc éludé la chronologie) ce qui justifie le fait d'imposer des scènes ;
  • le fait que les PJ soient dans une école, ils sont un emploi du temps imposé, ainsi, tout le monde trouve ça normal que j'impose des cours préparés en avance ;
  • comme dans la série des Harry Potter, il y a pas mal de « discours » sous forme de monologues de la part des professeurs, notamment pendant les cours, c'était bienvenue que je les prépare à l'avance pour les déclamer par cœur ou avec un peu de reformulation (voir en lisant un peu ou en se reportant au texte pour suivre sa structure) ce qui renforce la théâtralité de ces scènes et leur effet de réel ;
  • le découpage du jeu en scènes avec des règles précises : une scène par joueur centrée sur leurs objectifs (ou ce qu'ils veulent en réalité, mais les objectifs sont très importants pour augmenter ses chances de succès à la fin puisque chaque objectif résolu augmente le nombre de dés du joueur) puis, une scène du MJ ciblée sur des cours, des événements indépendants de la volonté des joueurs / une intrigue.
  • l'adaptabilité des mécaniques de résolution à toute situation, épreuve ou conflit ;
  • la suppression d'une dimension enquête au jeu (bien qu'elle demeure un peu dans la fiction et que le MJ peut amener des enjeux cool de type « que faire de l'orbe que le père de Mary-ann nous a demandé de trouver ? » ou « on est attaqués par des créatures vampiriques »...) ;
  • parce que l'ensemble du jeu converge vers un même point : les ados règlent leurs problèmes quotidiens pour pouvoir mieux affronter la puissante menace qui plane sur eux et sur ce qui est important pour eux ;
  • le canon d'Harry Potter est assez riche et le fait que tout le monde à la table ait lu les bouquins et vu les films a facilité grandement la cohésion autour de l'Espace Imaginé et Partagé.

Le fait d'avoir quelque chose d'extrêmement resserré en terme de structure nous a permis de varier grandement ce qu'il se passait dans chaque scène.

L'exact opposé est Démiurges : comme on n'a aucune idée des incidences géographiques, temporelles, humaines... des objectifs que vont choisir les joueurs (on peut jouer une campagne à huis clos dans un studio, ou durant un voyage, une épopée sur plusieurs pays), j'ai compris qu'il me fallait réduire le champ d'exploration que proposait le jeu afin d'en garantir la cohérence, la force et l'unité.
C'est Bliss stage de Ben Lehman qui m'a permis de comprendre cela.
C'est comme un vent libérateur qui souffle sur mes projets rôlistes.

Mon objectif de game design est réussi, il me reste à continuer les playtests, à affiner certaines choses et expliquer un maximum les mécaniques à l’œuvre (ce qui n'est pas une mince affaire).

J'aimerais avoir des retours des joueurs si possible et bien sûr pour les autres, n'hésitez pas à intervenir dans le sujet si vous avez des remarques, questions etc.
Frédéric
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Fabien | L'Alcyon » 19 Nov 2011, 22:26

Salut Fred ! Super ce projet, ça me semble intéressant de voir ce qu'on peut faire dans cette direction.

J'ai une première question, on verra si d'autres viennent ensuite.
Comment les joueuses/joueurs ont-ils accepté les scènes "cinématiques" pilotées par le meneur ou les révélations finales en « bloc » ? Est-ce que ça a participé de manière fertile à leur expérience de jeu ? Se sont-ils sentis frustrés ou est-ce que ça leur plaisait ? C'est bien entendu aussi une question pour Gaël, Lionel et Louise.
Je veux bien croire que c'est dans le canon d'Harry Potter, mais je pense que cet aspect est essentiel et doit être surveillé si tu veux injecter du traditionnel dans du forgien.
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 20 Nov 2011, 00:14

Bien vu, c'était ma principale appréhension avant de jouer et dans le texte du jeu, c'est la principale chose qu'il me faudra réussir à enrayer (avec le passage en force du MJ). En fait, tel que c'était, en dehors du fait que c'était plus "mis en scène" que le reste, c'était comme un enjeu supplémentaire qui pouvait menacer leurs autres objectifs. Je n'ai pas senti de baisse d'intérêt pour une phase de jeu ou une autre, je pense que les deux s'alimentaient : ça aurait été assez limité de ne jouer que des scènes de joueurs et dommage de ne jouer que des scènes de MJ. Je ne peux pas vraiment parler à leur place, mais je pense que ça a très bien fonctionné (grâce à toutes les contraintes listées au dessus, plus toutes celles que j'ai oubliées) je ne les ai pas senti frustrés, ils m'ont même dit qu'ils avaient aimé la partie, reste à voir leurs avis à froid. :)
Frédéric
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 21 Nov 2011, 02:21

J'ajoute pour les joueurs que je serais intéressé de savoir quelles scènes vous ont le plus plu et le plus marqué.
Frédéric
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 22 Nov 2011, 15:38

Louise m'a donné ses impressions sur la partie en privé en me proposant de les copier ici, voici donc son message :
Salut,

J'ai bien lu ce compte rendu avec l'attention qui s'impose. Cette partie était vraiment très chouette, et je te remercie pour les appréciations positives que tu y rapporte !
Voici donc mes quelques commentaires (si tu le souhaite tu peux copier ce message dans le forum) :

- On sentait que le scénario et même les discours était bien travaillés, ce qui, comme tu le dis, rend les choses beaucoup plus confortables pour les joueurs. Sans doute cela donne une partie plus 'cadrée' que si elle se déroule majoritairement en improvisation. Et non seulement le scénario était préparé avec soin, mais tu l'as mené visiblement avec beaucoup de plaisir.

- J'ai apprécié la 'simplicité' des mécaniques de jeu et de fonctionnement : pouvoir mettre en place entièrement une scène, la faire partir sur un point de départ totalement choisi en se basant sur les objectifs, cela contribue à donner plus d'idées en laissant une agréable large de manœuvre. A mon sens également, trois (quatre avec le MJ) est le bon nombre de joueurs, pour ne pas multiplier les objectifs et les profils de personnages, d'autant plus que s'ajoutent des PNJ. Et puis le fait de commencer par bien poser l'univers pour ensuite amener l'intrigue en bouquet final me semble reprendre la logique des ouvrages et apporte une bonne tension narrative.

- Il faut dire que les livres et films de cette saga sont particulièrement fertiles en références, en thématiques et en imagination. Jouer ce jeu, c'est retrouver tout ça : les grandes thématiques (popularité, réussite, épreuves de la vie), les typologies de personnage, et l'univers dans son ensemble. Et avec grande joie.

- Pour une fois, j'ai participé à une partie ou je connaissais bien l'univers de référence proposé.. Ce qui n'est pas toujours le cas, et ce qui a sans doute contribué à évoluer dans la partie avec aisance.

Sinon, dommage d'avoir dû accélérer faute de temps, il y avait des histoires que j'aurais aimé se voir développer. Mais les événements s'enchaînaient bien pour autant.

Voilà, j'espère que tout ça est constructif, merci encore pour cette partie, et si tu as de nouveau besoin de cobayes, j'en suis !

à bientôt

l.
Frédéric
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Gaël » 24 Nov 2011, 02:05

Avec cette partie, j'avoue avoir retrouvé le plaisir d'être spectateur et de s'immerger dans le monde partagé, sans pour autant être pieds et poings liés au moment de faire agir mon personnage. Les descriptions préparés par Frédéric (j'appelle ça des "cinématiques" en référence aux jeux vidéos) étaient vraiment plaisantes. L'avantage de la préparation donne moins d'hésitation, moins de balbutiements à des descriptions ou des dialogues habituellement improvisées sur le tas. J'ai particulièrement apprécié les scènes de cours, où les dialogues pré-écrits par Frédéric sonnait juste et étaient fidèles à la saga. Pour autant, dès la "cinématique" terminée, on pouvait faire ce qu'on voulait, faire agir notre personnage à notre guise, mais avec la contrainte créative du cours. L'un ne parasitait pas du tout l'autre, au contraire j'ai eu le sentiment qu'ils se complémentaient en fournissant le terreau fertile pour l'un et la créativité des joueurs de l'autre.

J'ai aussi beaucoup apprécié la scène de confession entre Mary-Ann et Penny. J'ai apprécié le fait de pouvoir nuancer le côté "garce" de mon personnage en lui apportant de l'humanité. D'autant que dans la saga, les personnages sont toujours un peu plus que leur simple caricature. Je pense notamment à Neville ou à Hermione par exemple.

La difficulté réside dans le timing de la partie. Entre les histoires quotidiennes des trois personnages et l'intrigue préparée, on a été obligé d'accélérer, ce qui à mon avis a beaucoup nuit au développement et à la cohérence de la partie. J'ai eu le sentiment que certaines choses n'avaient pas été explorées, un peu comme si on avait joué qu'1/3 de l'histoire et qu'on était passé directement à la fin. Je pense que dans le deuxième tiers, on aurait davantage exploré l'intrigue.

La question est de savoir si l'on peut jouer à fond sur une année à Poudlard en jouant et l'intrigue et les histoires quotidiennes sur une partie de 4h environ. Après cette partie j'ai le sentiment que c'est difficile si l'on ne veut pas bacler le tout. A voir peut être pour découper une année en 2 ou 3 parties, mais découpant également l'intrigue pour que les parties qui ne sont pas à la fin de l'année représente une étape décisive. Dans la saga, j'ai l'impression que c'est pas mal découpé selon les saisons (la rentrée, halloween, noël, le début du printemps et à l'été les vacances). Ça pourrait être par exemple 3 parties jouées avec automne, hiver et printemps (et on ne compte pas les vacances d'été).

Malgré tout, j'ai hâte d'y rejouer car c'est la version à mon sens qui s'approche le plus de Harry Potter. Et d'ailleurs, tout comme dans les romans, j'ai hâte de lire jouer la suite de l'histoire !
Gaël
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 24 Nov 2011, 15:26

Merci Gaël pour ton message, c'est vraiment motivant !

Pour le problème de temps qu'on a rencontré, il m'a fallu voir comment ça tournait pour me faire une idée d'une manière d'avoir un contrôle là dessus. Ça me permet de comprendre que je dois fixer la difficulté des objectifs personnels des PJ en fonction du nombre de tours de jeu, autrement ils risquent d'être résolus trop tôt ou trop tard. Et je dois décider du nombre de tours de jeux (donc une scène de MJ par tour de table) en fonction du temps de jeu désiré. Sachant qu'on peut estimer en moyenne qu'une scène durera 15 minutes.
(Bien sûr, si le MJ le souhaite, il n'y a aucun problème pour découper une année en plusieurs parties).

J'ai pas mal d'interrogations à présent, suite à un thread sur The Forge que m'a passé Christoph en privé, au sujet du type d'enjeux que je peux donner pendant les scènes du MJ. Ça demande de playtester, je m'en réjouis d'avance !
Frédéric
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Lionel (Arkel) » 03 Déc 2011, 14:17

[Depuis le temps que c'était commencé sur ma clé USB... Je profite d'un peu de temps pour compléter ce rapport de partie.. *profite du moment où les étudiants ne viennent pas me « déranger » ^_^*]

Aaah .. Harry Potter.. rien que le monde en lui même est porteur d'un imaginaire ancré depuis la publication des livres (qui empruntent également à d'autres références, contes & légendes) et les films qui adaptent et permettent de mieux visualiser ce monde bien particulier (avec la fameuse musique qui traine dans la tête.. *argh), Au final, l'immersion est facilitée par le simple fait de connaître les références (ne serait ce que pour avoir lu un seul des livres de la série ou même un film)
Pour le jeu lui même, c'est vraiment complet : du choix de création des élèves, à leur description via objectifs / talents et travers de personnalité : on a vraiment l'embarras du choix. On a obtenu des personnages très différents
Avec les lieux fétiches : la gare, l'école... les élèves et les professeurs (certains appréciés d'autres détestés,) et les ennuis qui surviennent tel le malheur sur le pov' monde.. tout çà contribue à la à « l'enchantement » de la tablée.

Ce que j'ai aimé :

- la facilité de création pour débuter une partie
- Les personnages très typés qu'on a obtenu, même si 2 personnages étaient de la maison Gryffondor pour 1 seul Serpentard
la possibilité d'effectuer / raconter des actions basé sur le trait utilisé (détermination, intelligence etc..) ce qui oblige a tourner le récit d'une certaine façon (et on entrevoit des solutions à des problèmes/confrontations, différentes de ce qu'on aurait pu choisir sans « guide »)
- Mary-Ann : Ouh la S... (*bip* ), enfant gâtée en plus,.. 2 baffes oui !!
-La dynamique de la partie : Oui, le temps de partie était restreint, mais en contrepartie, on a vraiment pas vu le temps passer, et tout s'est enchaîné sans accroc
- être d'ascendance moldu, qui m'a permis de jouer la méfiance et l'incrédulité face à la magie et même face au fameux coffret


Ce que j'ai moins aimé (parce que oui dans l'ensemble, c'était très bien ^^ ) :

- Les objectifs :
j'en avais 3 et franchement, j'avais envie de les introduire les uns après les autres. Mais il a fallu que je me décide finalement à en choisir un seul et et à m'y tenir par souci de cohérence et de facilité à les intégrer dans le récit. J'avais d'ailleurs au début l'impression de pédaler dans la semoule au vu de la difficulté assignée. Mais j'ai réussi malgré tout à en faire avancer un sur les 3,
- le temps limité de la partie : car oui, j'avais envie de faire plus de choses, des cours,d'autres découvertes et/ou coups fourrés, apprendre d'autres sorts et autres tours mineurs), développer et voir se développer les personnages et leurs relations...

Ma scène préférée :

La scène de bal où Alex (Moi) s'incruste avec Mary-Ann (Gaël) <qui doit subir mon intervention *hihi*>, et où l'on finit par se mettre d'accord pour une scène de manipulation/chantage bien sentie

@ Fabien
Pour les cinématiques & révélations en blocs à la fin, çà fait parti selon moi d'une mise en scène cohérente. Même si certaines choses ne peuvent pas changer, ce n'a que peu d'importance.
Il y a des jours où on veut être acteur / spectateur. Parfois je veux regarder un film ou lire un livre, d'autres fois me mettre à un jeu vidéo ou je prends une part plus active. L'un n'exclut pas l'autre, donc, tout va bien.

Bienvenue à Poudlard... La suite prochainement sur vos écrans :D

P.S : @ Fred., si tu bascules de l'autre coté, a quand un ADD ? :p
Lionel (Arkel)
 
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Re: Bienvenue à Poudlard – Hybridation maximale

Message par Frédéric » 03 Déc 2011, 15:01

Wow, merci Lionel pour cette contribution dithyrambique. ^^

Pour le problème des objectifs trop nombreux et trop difficile, j'ai trouvé une parade : le nombre de points de difficulté de tous les objectifs cumulés doit être égal au nombre de scènes que va jouer chaque joueur (qui est égal au nombre de scènes que prévoit le MJ).
Si le MJ prévoit 5 scènes, le joueur doit répartir lui-même 5 points de difficulté entre ses 2 ou 3 objectifs. Ainsi, ce sera nettement plus faisable (c'est vrai que j'avais exagéré pour les points de difficulté, mais je n'avais aucune idée des contraintes que ça imposait).

Merci pour tout le reste, je pense que le fait que vos scènes préférées soient des scènes de joueurs en dit long sur ce qui est vraiment au cœur des parties (sans diminuer l'intérêt des scènes du MJ).

Et pour ADD sûrement pas, mais attends de voir "Guerriers de l'ombre" ;p
Frédéric
 
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