PSYCHODRAME : Compte-rendu de play-test
Le coming out d'Yves
Deux amis Montpelliérains sont venus nous voir à Poitiers. Magali et moi leur avons proposé de faire une petite partie de Psychodrame.
J'ai choisi de la poster dans la rubrique Banc-d'essai pour la simple et bonne raison que certaines choses étaient encore expérimentales.
J'étais plein de questions avant cette partie, je suis plein de réponses désormais.
Nous étions donc 4 : Hièn, Nicolas, Magali et moi.
Je leur ai présenté le jeu comme la possibilité de créer une histoire en explorant des conflits psychologiques.
Nous avons créé les fiches de personnages un soir et nous avons joué le lendemain.
1- La création des fiches et du Problème
- Le choix du Problème :
Pour décider du problème central sur lequel allait se baser le jeu, nous avons fait un brainstorming, au cours duquel plusieurs bonnes idées ont surgit (notamment celle de jouer une famille recueillant un juif pendant la seconde guerre mondiale, certains pensant qu'il faut le dénoncer, d'autres qu'il faut le cacher).
De toutes les idées, nous avons ensuite voter pour en élire une. Ce fut : « Un jeune homme apprend à ses proches son homosexualité ».
C'était intéressant, car on pouvait sombrer dans le ridicule et donc, ça me permettait de tester la tendance tragique du jeu.
- Les Rôles :
Le but du jeu est de mettre de la tension entre les protagonistes, nous avons donc imaginé des positions initiales par rapport au thème de l'homosexualité :
Je jouais Yves, le jeune homosexuel
Hièn a choisi de jouer Lauriane ma fiancée (soupçonne son fiancé d'avoir une liaison avec une autre femme)
Magali a choisi de jouer ma mère Maryse (catho et traditionnaliste)
Nicolas a choisi de jouer Alexandre mon ami d'enfance (plutôt tolérant, mais accorde beaucoup d'importance en ce que sa confiance ne soit pas trahie)
Les Personnalités :
Yves (Dépendant)
Lauriane (Obsessionnelle-compulsive)
Alexandre (Passif Agressif)
Maryse (Histrionique)
Un petit détail : ces personnalités sont considérées comme normales, ce ne sont pas des pathologies psychiatriques, elles définissent des orientations psychologiques.
Ils ont vraiment apprécié le moment de découverte des Personnalités psychologiques. Le choix de la personnalité a quand même été assez long, il faudra que je clarifie un peu tout ça, mais le pire, c'est la création des traits... On a mis un temps fou... J'ai décidé de réduire le nombre de traits à créer. J'ai mis en application le conseil de Christoph de tisser des liens entre les traits des personnages, et je dois avouer que ça fonctionne très bien. Merci Christoph !
***
2- Le lendemain, on a donc commencé à jouer. Première scène, je me suis proposé de cadrer en premier pour donner l'exemple. Nous avons donc démarré la partie autour d'un repas (classique). J'ai décidé d'un enjeu lié au problème et à nos personnages : Ma fiancée veut vérifier si j'ai bien une liaison cachée.
Le conflit était assez calme, on tirait assez peu de cartes spontanément et c'était très bien comme ça, car ça nous a permis de sentir la progression de la tension tout au long de la partie.
Le conflit s'est terminé, je ne sais plus qui a gagné le conflit, mais je me suis rendu compte qu'en fait si rien ne m'obligeait à dévoiler si oui ou non j'ai une relation, je pouvais ne jamais rien dire à ce sujet. On a donc décidé pour le conflit suivant que celui qui gagne le conflit en surmisant de 2 cartes un des protagonistes pouvait obtenir l'enjeu du conflit. Et là, les choses on commencé à devenir croustillantes ^^
2ème conflit : Enjeu : Découvrir les tendances homosexuelles de Yves.
Dans le bureau, Maryse, ma mère, essaye de discuter un peu car elle s'est bien rendu compte que pendant le repas, une certaine tension se dessinait entre ma fiancée et moi. J'élude la question.
Lauriane décide d'écouter à la porte. Alors je décide de sortir du bureau et éventuellement de la surprendre. Sur ce, Hièn décide que Lauriane ne se cache pas et en profite pour me relancer sur la question de mes éventuelles tromperies... Et Maryse revient à la charge, bref, je suis submergé.
Dans le conflit, La mère et la fiancée commencent à se crêper le chignon et Alexandre descendant l'escalier en profite pour me prendre entre quatre yeux un peu plus loin. Il me dit que je peux me confier à lui, qu'il sent bien qu'il y a un problème. Alors je lui réponds que je n'aime plus Lauriane (pour utiliser mon trait). Et là il gagne le conflit...
Je lui annonce donc que « les femmes, c'est plus trop mon truc »...
Coup de théâtre à la fin de ce conflit.
Nos personnages gagnent en colère et en peur, la confiance tombe, ainsi que l'amour.
Le conflit suivant se joue entre Lauriane et Alexandre, celle-ci tente de lui tirer les vers du nez, mais, celui-ci, têtu et tenant à respecter sa promesse de ne rien dévoiler, finit par s'énerver.
Pendant ce temps, Maryse apprend à Yves que son père se travestissait dans des spectacles. Yves en déduit que si son père est parti du foyer quand il avait 12 ans, c'est sans doute parce qu'il a découvert comme son fils à présent qu'il préférait les hommes.
Lauriane entre alors dans le salon, suivie d'Alexandre et agresse Yves en lui demandant de lui dévoiler la vérité une fois pour toutes. Tout le monde a tiré énormément de cartes pendant ce dernier conflit, les retombées vont être salées !
Fin du conflit, Yves perdant décide de dévoiler, non sans joie qu'il est homosexuel.
***
Et là, petit problème : pour écourter la partie, on a décidé que le seuil critique des émotions se situait à 6 points au lieu de 10 points, résultat, 3 personnages sur 4 ont dépassé leur maximum en même temps (alors que normalement seul 1 ou 2 y arrivent).
Là, on discute pour définir l'émotion qu'il conviendrait de faire monter pour provoquer la fin de la partie. Cette émotion conditionne de façon évasive la fin du personnage et de l'histoire. Ce peut être un happy end ou un suicide collectif, tout est possible.
Problème, non seulement on n'arrive pas à se mettre d'accord, mais en plus, on commence à se disputer vaguement... D'une certaine façon, on pourrait dire « ouais, mais ton jeu est fait pour ça », j'avoue que ça ne me convient pas du tout, car la dispute (heureusement étouffée) ne portait sur rien d'intéressant (en apparence). Donc, pour moi, le fait de débattre des émotions était une erreur de game design, car cela conduisait à de la non argumentation ou un simulacre d'argumentation style Psychologie de comptoir. Nous avons donc décidé d'attribuer à une seule personne à la fois le choix des retombées sur un autre.
Au final, la partie a été un succès, nous avons joué des scènes très intéressantes, des moments de confidences, des moments de déchirement. Rien ne m'a paru surjoué ni abusif (sauf Maryse, car elle est histrionique, donc c'est son caractère d'en faire trop :) ).
J'ai regretté cependant notre frilosité. Le jeu s'est arrêté quand ça devenait intéressant. Il aurait fallu être plus rentre-dedans lors du cadrage des scènes, en faisant en sorte, par exemple, que Yves se fasse draguer par un mec et paraisse plutôt sous le charme...
On a ensuite discuté du fait que ce jeu n'était peut être pas « grand public » à cause de la façon dont les situation pouvant paraître sordides au départ, peuvent dégénérer et provoquer de la frustration, de la colère etc. En faisant en sorte que les débats entre joueurs soient réduits, je pense que je réduis le risque de disputes inutiles et sans rapport avec le jeu. Pour le reste, chaque joueur est responsable de son implication dans le jeu. Et arrêter avant le couac est un droit absolu.
Voilà, n'hésitez pas à me poser des questions ou à commenter