J'ai eu le plaisir de jouer ce vendredi à la convention Éclipse à Rennes à BPRD, maîtrisé par notre Grümph national !
Nous étions 5 joueurs (+MJ) de divers horizons.
Malgré nos expériences et nos horizons sans doute très différents, nous sommes parvenus à harmoniser nos façons de jouer, je vais développer cela.
Le jeu nous permet d'incarner des membres de cette agence d'investigation (aux caractères surnaturels) tirée du comics Hellboy.
Le jeu a tout d'abord le bon goût de proposer aux joueurs des espaces de créativité assez consistants : les personnages possèdent par exemple des talents, le mien, sorte de réincarnation incertaine de la déesse Bastet, possède le talent "chat".
Cela me permet de mettre en œuvre toutes sortes de pouvoirs liés aux chats. Pendant la partie, je me suis donc transformé en un gros chat pour mieux me dissimuler derrière les buissons, j'ai employé mes griffes pour le combat (ça c'était gratos en points de magie, mais je pouvais le faire parce que j'avais ce talent), j'ai appelé des chats pour surveiller un lieu etc.
Et ce n'est pas tout, les traditionnelles compétences prennent la forme de métiers, de cette façon, on évite les champs d'action trop restreints, et le joueur peut faire en sorte d'interpréter à quel métier correspond son action pour obtenir des points bonus.
L'ensemble du système est propre, intuitif, cohérent (du moins pour les joueurs, car je ne connais pas la partie dédiée au MJ, mais je gage que ça ne doit pas être très compliqué). Il offre aux joueurs et au MJ une vision claire de ce qi va être possible ou pas possible, cohérent avec l'esthétique de la fiction voulue ou non, car chaque trait, talent ou métier balise les potentiels des personnages.
Nous avons donc été appelés à mener une enquête autour d'un étrange crash d'avion dans l'Ohio. Les indices nous mènent rapidement vers une piste paranormale : arracher une partie de la carlingue d'un avion à mains nues (selon les témoignages), ce n'est pas à la portée de tout le monde...
Je pense que la partie aurait gagné à expédier encore davantage la phase d'enquête, car notre MJ, dans le soucis de soutenir une esthétique pulp ne nous faisait pas faire de jets de dés pour trouver les indices, il répondait simplement à nos impulsions. Ce procédé a selon moi une importance capitale pour les jeux dans lesquels on ne veut pas s'embarrasser de freins au déroulement de l'histoire.
Ensuite, a eu lieu un combat avec un nazi quelque peu monstrueux, mais comme nous n'avions rien à lui envier sur le plan de la bizarrerie, on s'est sentis chez nous. Nous avions devancé l'individu et pour l'attendre, j'ai pris la peine de me cacher parce que je n'étais pas la bourrine du groupe, mais l'un des joueurs n'en a même pas pris la peine, il l'attendait de pied ferme, en haut des escaliers, dans une position de défi... Classe, non ?
Et là, pour l'esthétique de la fiction, le fait de savoir qu'on est plutôt balèzes nous a aidé, je pense, à ne pas nous auto-freiner. Il y a eu bien plus d'impulsivité de la part des participants que dans bien des parties de JDR que j'ai pu jouer : deux PJ qui se lancent sans préavis à pied à la poursuite du fugitif qui a 6h d'avance sur nous, une préparation à l'interpellation du fugitif atypique (celle dont je parle juste avant), un bain de sang sans sommation, bref, on était tous dans le bain, on était les protagonistes, ça allait chier, on mettait les pieds où on voulait et c'était souvent dans la gueule !
Deux choses étaient intéressantes également d'un point de vue des techniques de jeu :
Lors de la première baston (bon, il y en a eu deux sur toute la durée de la partie, c'est pas non plus du lattage permanent), j'ai bondi sur l'adversaire en décrivant bien l'attitude de chasseur des chats, afin de pouvoir utiliser mon métier "chasseur". Puis, j'ai lancé les dés... échec !
Le MJ m'a dit : et bien puisque tu es dans ton élan, tu peux décrire le résultat !
C'est donc avec joie et délectation que je me suis exécuté : j'ai bondi, mais mes griffes se sont plantées dans le sol, je me suis retrouvé dans une situation délicate : en 69 avec notre adversaire... gênant donc les autres PJ essayant de lui mettre une raclée.
Je regrette que LG ne nous ait pas davantage incité à produire des narrations de résultat, nous en avons un peu discuté après, et ça me fait penser que pour mettre en place ce genre de partage d'autorité, c'est difficile de le faire de manière implicite. Moi-même, si le texte de Dogs in the Vineyard ne proposait pas aux joueurs de narrer les résultats sur leurs PJ, je n'en aurai jamais eu l'idée.
Je pense qu'il peut être intéressant, si cela apporte au jeu, de le noter dans les règles.
La baston a fini de manière spectaculaire avec de la cervelle écrasée sur le poing d'un PJ...
Chose amusante : l'un des joueurs possédait un personnage atteint d'un syndrome de dédoublement de personnalité affectant ses capacités : une âme de bourrin maniant l'épée et un Nerd craintif. Le changement de personnalité était entièrement décidé par le joueur qui a de lui-même toujours cherché à justifier au mieux ces choix. Résultat, il n'a utilisé sa personnalité "bourrine" qu'une fois, vers la fin du deuxième combat. Cela a donné des scènes du genre : oh oh ! Le danger arrive... zut, zut... (je prend la personnalité nerd) éclats de rire autour de la table.
Bref, le joueur s'est fait un devoir de renforcer la crédibilité de la fiction et les conséquences sur la situation, plutôt que de chercher à optimiser nos chances de victoire. Je pense que tout le monde a apprécié cela.
Pour résumer, je tous les joueurs ont endossé le costume de leur personnage, ils s'y sont senti bien (je présume, mais c'est l'impression que ça m'a donné et moi j'étais bien en tout cas) et l'ensemble des éléments de la partie : choix, techniques, décor etc. ont été exploités par les joueurs et le MJ dans une direction précise : renforcer l'esthétique et la crédibilité de la fiction.