Hello
Je fais ici le point sur la version « Ashcan » (la 007) après cinq parties récentes (dont trois à Ludesco le weekend du 19-21 mars). Enfin, à vrai dire, seule la première était purement 007, les trois de Ludesco étaient déjà un peu plus avancées et la dernière était quasi 008.
J'aime
Les délires poétiques de certains joueurs, l'ivresse des joueurs découvrant la liberté créative que leur offre le jeu, l'ambiguïté constructive de l'incursion du surnaturel, l'agressivité que je peux déchaîner sans gêne sur les personnages. Exemples:
Poésie
« Une vaste plaine, un arbre, l'écorce qu'il faut dévorer, le nouveau-né délivré » C'est un homme dont la femme est morte en couche il y a bien longtemps qui a eu cette vision. Il en aura une deuxième, où il doit tuer le nourrisson. Plus tard, alors qu'il est presque mourant, un enfant lui propose de goûter un peu de sa jeune chair et le vieillard accepte. Sa femme s'incarne en lui dans ce grand moment d'agonie et il ne peut plus distinguer les corps. Il s'en sortira, pour se pendre en fin de compte à un arbre. (Frédéric, ça vient d'une des deux parties de Transsubstantiation)
Créativité
Dans le scénario Elévation spirituelle qui met en scène un passage entre divers mondes se déclare un pugilat entre l'assistant de l'ophtalmologue fou et le protagoniste militariste. Une arme à feu est pointée sur l'assistant qui parvient à dévier le canon juste à temps. Pris dans une clé au corps à corps, le féru d'armes semble cuit. Arrive l'ornithologue avec sa perruche préférée (attache). Pour sauver son ami, le jeune joueur décide de sacrifier la perruche: elle vole en ligne directe et arrache un oeil à l'assistant qui tombe à terre en tordant le cou au pauvre volatile. L'ornithologue le finit de deux balles du Smith & Wesson de son voisin. La secrétaire profite de l'agitation pour surgir et planter une seringue d'anesthésiant dans les deux protagonistes, sous les yeux du dernier protagoniste arrivé sur scène. Le garde de sécurité, sonné et à terre, s'était entretenu avant l'altercation avec le médecin. Suggestion: « Regarde dans ma poche! » (d8) Le garçon qui jouait le seul protagoniste pouvant vraisemblablement faire face à la secrétaire réfléchit, hésite, je lui donne quelques exemples bateau, puis il dit: « Je sais, mon perso trouve un appareil photo qui projette les gens dans une autre dimension! » C'est tout à fait plausible que l'ophtalmologue ait un tel objet, et c'est tout à fait plausible que notre militariste l'ait volé juste avant. « Je prends un d4 et je chasse la secrétaire dans un autre plan! » Réussite! Malheureusement pour lui, il est neutralisé à son tour par l'ophtalmologue qui s'était introduit sans être vu dans la pièce. L'autre garçon qui joue l'ornithologue zieute le dernier d4, se tâte, puis le saisit: « La perruche bouge à nouveau, elle se décompose rapidement, mais grandit. Elle se relève, c'est une énorme perruche mort-vivante et elle fond sur le médecin et lui bouffe la tête d'un coup de bec! Et disparaît dans un nuage de poussière juste après! »
Ambiguïté
L'autre partie de Transsubstantiation, je reprends l'enfant qui donne un bout de sa viande à goûter assis sur le capot de la voiture des protagonistes. Un des joueurs décide d'avoir un flashback (d20) à ce moment, il se revoit en campagne militaire en Afrique, confronté à un peuple cannibale et les rites impies qu'ils pratiquaient. Il projette violemment le gamin à terre et entre dans sa voiture. Le protagoniste prêtre qui est déjà complètement cinglé (Jésus communique avec lui depuis la chambre jaune derrière la hotte de ventilation) arrive sur le parking et je lui fais voir un agneau gisant au sol. Alors que le gars dans la voiture essaie de partir en trombe, le prêtre se met à genou juste devant pour s'occuper de « l'agneau » ... (en fait, il ne se fera pas écraser, mais l'agneau-enfant, devenu un hybride à moitié nu entre supérieur militaire et ancienne maîtresse du protagoniste soldat, explose sous l'effet d'un d4... cette partie était plutôt bad-tastienne en termes de visuels)
Agressivité
Un personnage tente de s'enfuir pour de bon? Je peux le blesser gratuitement? Pendant qu'il essaie fébrilement d'ouvrir la porte de sa voiture fermée à clé, le cuistot cannibale lui plante son couteau hachoir dans le dos. Le joueur sacrifie l'idéal de liberté de son personnage pour étouffer le cuistot avec sa veste en cuir (le cuistot avale la photo d'un paysage d'Ecosse, destination de rêve du protagoniste, qui était dans la poche intérieur), puis rampe à l'intérieur de la station service pour se faire achever par un des autres protagonistes. J'ai laissé les joueurs décrire cette mort plutôt que de tuer le perso moi-même (la liste du sort me le permettait) et je dois dire que cette notion de « tue le toi-même si tu ne veux pas que je le tue moi » est fort sadique et satisfaisante pour le gardien que j'étais...
Ce qui m'emmerde
Toute aide est la bienvenu sur ces trois points:
La gestion des persos morts
Actuellement, je crois que ça n'a échappé à personne, un joueur dont le personnage quitte la partie conserve ses dés acquis afin d'imposer des événements paranormaux aux protagonistes vivants. Evidemment, quelqu'un qui a pris beaucoup de dés aura plus d'influence que quelqu'un qui en aura pris peu. Je peine à voir la pertinence de cette règle.
La folie imposée
Lors de la partie avant le weekend Ludesco, j'ai joué avec Lionel, Ana, Jérôme et Xavier. Nous utilisions les règles 007 pures. Si mes souvenirs sont bons, deux personnages sont devenus fous sur un « 1 » alors que franchement, c'était pas très utile et enrichissant. Pour autant, les personnages qui ne deviennent pas officiellement fous ne sont souvent pas plus enviables d'un point de vue clinique. J'ai viré cela pour les trois parties suivantes et nous n'avons pas pour autant eu moins de fous parmi les protagonistes (souvent, c'est une conclusion tout à fait logique et satisfaisante pour un personnage).
La fin de partie
Une partie débute par une période calme, où l'on définit essentiellement les personnages et le contexte. Puis la tension monte... et hop révélation: « c'est lui le méchant, il a fait ça et ça! » Les protagonistes encore vivants amassent les dés restants, se font éventuellement aider par les morts et bam, le méchant est mort plus vite que son ombre. Hmm. En fait, j'aimerais bien un peu jouer cette phase! Si tout se passe bien, on a toute une panoplies de prémonitions, de visions et de connaissances amassées à ce stade, la révélation est bel et bien influencée par les divers Monologues. Et vlan! qu'on l'écrase aussitôt. Non non, ça ne va pas ça, c'est du gaspillage. On m'a toujours appris à finir mon assiette, il n'y a pas de raison que je ne fasse pas pareil pour ce jeu. Je vais donner au MJ un moyen de tisser les éléments afin de jouer une confrontation digne de ce nom (épique ou non). Et après, que meure qui doit mourir.
Nous avons fait une tentative ce weekend avec la règle suivante: pour se débarrasser de l'horreur finale, il fallait trois succès (donc implicitement au moins trois « scènes » ou unités d'action). Les deux protagonistes font irruption dans une galerie d'antiquités où se prépare un rituel, ça part en sucette, le personnage de Julien (Silver) se fait sacrifier sur une montage horloger absurde et son sang se mêlent avec la structure pour former petit à petit une créature indicible. Le personnage de Michael, après avoir mis hors d'état de nuire les cultistes de pacotille, fuit pour demander de l'aide à l'église. Un PNJ qu'on croyait mort l'accueille (Julien lui a imposé une hallucination...), Michael revient avec un crucifix énorme et abat le monstre. Le rallongement de la partie était discutable, mais j'ai trouvé sympa de retrouver le PNJ en pleine hallucination, avec néanmoins un effet concret sur les actions du protagoniste survivant. Je planche.
Ce qui me laisse perplexe
Je crois que je dois modifier ces points, mais je ne sais même pas par où commencer.
Le seuil de difficulté
Je suis globalement content de l'aspect « nager pour ne pas couler » qu'entraîne la difficulté grimpante et la possibilité de prendre toujours plus de dés, mais je crois qu'il monte trop vite au début et plus assez à la fin.
La liste du sort et la situation mystérieuse
Il me paraît toujours plus claire que ces deux outils sont enchevêtrés d'un manière problématique. D'une part, les situations mystérieuses contiennent a priori autant des éléments d'intrigue que des éléments de pure couleur, d'autre part la liste ne sert qu'à envoyer des effets bien colorés sur les protagonistes. Je crois que je dois passer la situation mystérieuse à du pur contenu, afin de laisser les coudées franches au MJ en ce qui concerne la couleur des effets paranormaux. Ainsi, il sera aussi plus à même de colorer le contenu brut de la situation avec les éléments apportés par les joueurs. En revanche, il y aura une échelle de paranormalicité afin que le MJ soit lui aussi contraint dans ses effets. Dans la partie de ce weekend, j'ai tenté de faire la distinction, mais je me suis un peu emmêlé les pinceaux, ce qui fait que je n'arrive pas vraiment à tirer de conclusion. Néanmoins, je dois dire que au final, c'était une partie à deux joueurs réussie, alors que je commençais à me dire que ce jeu n'était fait que pour trois ou quatre. Peut-être que c'est lié avec ce qui m'emmerde en fin de partie, mais que le problème se trouve à une autre échelle.
Nouveautés rigolotes
J'ai mélangé des idées d'Afraid et de Poison'd (par Vincent Baker): quand un perso subit une condition (blessé, perdu, enfermé, marqué par le Malin, etc.), je colle un post-it avec le mot-clé adéquat sur la table devant le joueur de ce perso. J'ai appliqué cette règle aux trois parties Ludesco et c'était assez utile. Ça donne un aspect tangible assez intéressant, qui n'est pas sans rappeler les sanctions infligées via la Death Note (si ton nom apparaît encore une fois...) L'accueil était moins enthousiaste ce weekend cependant.
Quelqu'un qui avait mangé de la chair humaine dans Transsubstantiation recevait une notice bonus: « repu ». Les joueurs appréciaient cette délicatesse...
J'ai aussi expérimenté avec l'idée de Frédéric qui proposait de réduire à trois les degrés d'effets (plutôt que les quatre de la version 007), mais ça demande un changement dans la manière de comptabiliser les noms sur la liste. Plus à ce sujet quand j'aurai testé quelques variantes (dont au moins une ce weekend à Orc'Idée!)
[modifié pour corrections d'orthographe]